Enbridge et le rôle de l’État

Vendredi dernier, la commission parlementaire sur l’inversion de l’oléoduc 9B d’Enbridge déposait son rapport moins de 48 heures après la fin des audiences. Sans surprise, le rapport est favorable à l’entreprise albertaine tout en tentant d’amenuiser les risques pour la population d’inverser un oléoduc vieux de 37 ans qui passe sous des quartiers résidentiels. Rappelons que le dernier exercice du genre réalisé par Enbridge a causé la plus grande catastrophe environnementale en sol américain. Les coûts de réparation de ce désastre sont estimés à plus de 1 milliard $.

Par ailleurs, Enbridge a un triste bilan de près de 70 déversements chaque année depuis 10 ans.  Certains experts devant la commission ont mesuré à 90 % les chances qu’un tel évènement se produise sur la ligne 9B. Pour compenser, la commission parlementaire recommande qu’Enbridge fasse les tests de sécurité minimalement adéquats pour éviter un désastre environnemental. Il est désolant de constater que le gouvernement doit faire ce type de recommandations alors qu’il s’agit de sécurité élémentaire. Pour le réchauffement climatique, l’impact du projet est clairement négatif puisqu’il implique d’extraire 300 000 barils supplémentaires par jour d’un des pétroles les plus polluants du monde.

Le gouvernement fédéral est-il responsable du mal-financement des universités?

On se souvient tous et toutes du printemps érable de 2012. Comment ne pas s’en rappeler? De la grève étudiante aux manifestations en passant par les concerts de casseroles, ce printemps a laissé sa trace. À l'arrière-plan de ces événements souvent spectaculaires, un débat de chiffres n’a pas cessé de se tenir. La hausse des droits de scolarité étant le plus souvent justifiée par les besoins financiers des universités, plusieurs, dont l’IRIS, ont fortement critiqué cette manière simpliste de voir les choses.

Pour le dire sommairement, les universités québécoises ne souffrent pas d’un « sous-financement », mais bien d’un « mal-financement ». Une part de plus en plus importante de leur budget va aux projets immobiliers, à la recherche commercialisable et à l’appareil administratif. Bref, le problème n’est pas tant un manque de fonds, mais bien que le financement de l’enseignement, qui est pourtant ce qui doit être au cœur d’une université,  se voit systématiquement marginalisé. Résultat des courses, plus on met de l’argent dans une machine universitaire devenue dysfonctionnelle, plus on aggrave le problème.

La politique du charognard

Le 28 juillet 2009, l’armée du Honduras décide d’en finir avec l’élan démocratique du pays. Coup d’État. On attrape le président chez lui en pyjama, on le met dans avion et on l’expédie à l’étranger. Les classes dominantes du Honduras ne voulaient plus rien savoir de ce président, Manuel Zelaya, qui s’était mis en tête de réécrire la Constitution du pays, le 2e plus appauvri des Amériques, après Haïti. Quelques assassinats et quelques tractations plus tard, une nouvelle élection est organisée et un nouveau président est élu. Le Canada peut maintenant entrer en scène.

Il y a une semaine, c’était les élections générales au Honduras. Il s’agissait des premières « véritables » élections depuis le coup d’État de 2009. Celles qui avaient eu lieu quelques mois après cet événement avait surtout servi à avaliser le putsch des élites. Xiomara Castro, l’épouse du président Zelaya renversé en 2009, était candidate à la présidence pour le parti LIBRE (Libertad y Refundacion). Au moment d’écrire ces lignes, le parti de la candidate Castro ainsi que d’autres formations politiques contestent les résultats de l’élection en raison des nombreuses irrégularités dont elle a fait l’objet.

Les employé.e.s du secteur public : des gras durs? Vraiment?

On entend souvent dire que les employé.e.s du secteur public sont des gras durs, des privilégiés. Que leurs conditions salariales sont exceptionnelles. En fait, à entendre certains commentateurs travailler pour le gouvernement québécois équivaut à des salaires mirobolants et des conditions de travail hors de l’ordinaire.

Soyons honnête, trouver un emploi au gouvernement est en général une bonne nouvelle. Pour la plupart des gens, ça signifie un emploi relativement stable et relativement bien payé avec de bons avantages sociaux. En fait, les employé.e.s du secteur public québécois sont une bonne part de ce qui constitue la classe moyenne au Québec. Par rapport à l’ensemble de la planète et à bien des gens au Québec (chômeuses et chômeurs, prestataires d’aide sociale, travailleuses et travailleurs précaires, etc.) c’est une position somme toute confortable, on s’entend. Par contre, les employé.e.s de l’État québécois jouissent-ils pour autant de privilèges imposants par rapport aux autres travailleuses et travailleurs du Québec? Le prétendre relève d’un préjugé.

Et si on donnait de l’argent à tout le monde

Les Suisses aiment les référendums. À chaque année, ils se déplacent à de multiples reprises pour donner leur avis sur des enjeux sociaux et politiques. Récemment, de nombreuses questions économiques ont été lancées. Au-delà des discussions à l’intérieur du pays, ces débats sont suivis et nourris par des intervenant.e.s de partout à travers le monde, curieux et attentifs aux orientations que prendra la Suisse.

Au mois de mars, appelés à se prononcer sur les rémunérations « abusives » des dirigeant.e.s d’entreprises cotées en bourse, plus des deux tiers des votes sont allés en faveur d’un meilleur contrôle de la part des actionnaires. La semaine dernière, c’était au tour d’une proposition de limiter les salaires des patrons à un maximum de 12 fois celui du plus petit salaire de leur entreprise à faire l’objet d’une consultation. Bien que l’initiative n’ait pas recueilli les majorités nécessaires pour devenir texte de loi, le sujet a permis de mettre en lumière quelques cas d’écarts de revenus indécents entre les patrons et les employé.e.s.

Hydrocarbures: ne pas laisser l’industrie à elle-même

Chaque année, l’Institut Fraser mène un sondage auprès des dirigeants d'entreprises pétrolières et gazières afin de déterminer où sont les endroits les plus intéressants pour les investissements de cette industrie. Cette année le «  Global Petroleum Survey » réunit les opinions de représentants de 762 entreprises locales ou internationales.

Depuis deux ans, aux yeux de l'Institut Fraser basé à Calgary, le Québec fait piètre figure. L’an dernier, il occupait la 101e place et cette année, il se place au 141e rang sur 157. Ainsi,  il y aurait sur la planète 140 lieux (provinces ou pays) qui ouvriraient plus facilement ses portes aux hydrocarbures que le Québec.  Voyons pourquoi :

La vie privée est une marchandise comme une autre

L'IRIS publiait dernièrement une brochure qui exposait de quelle manière les avancées technologiques se retrouvent au service de la spéculation boursière. Il n'y a rien de bien surprenant de constater que la technologie est utilisée dans le but de générer encore plus de profit. On dirait que l'autonomisation du traitement de l'information nous ramène à de vieux classiques de la science-fiction. Sauf que cette fois-ci, la réalité a peut-être dépassé la fiction. Aujourd'hui, avec la technologie numérique, le fait d'être branché partout, tout le temps est devenu si commun que l'on parle de 81,6% des ménages au Québec qui sont branchés ou encore de 2 personnes sur 3 qui possèdent un cellulaire. Et, il ne faut pas oublier qu'à cela s'ajoute l'engouement de créer des villes intelligentes comme la ville de Québec. Ça fait tellement partie de nos vies que l'on oublie par moment que la technologie que nous possédons nous facilite la vie, mais a pour raison d'être et d'existence d’être viable économiquement. 

Nous dirigeons-nous vers la fin de la pauvreté?

Au printemps dernier, le réputé magazine The Economist faisait sa « une » avec une affirmation saisissante : nous serions mondialement en voie de mettre fin à la pauvreté. De 1990 à 2010, près d’un milliard de personnes seraient passées au-dessus du salaire de 1,25$ par jour. Ce montant est reconnu comme le seuil de l’extrême pauvreté.

Comment aurions-nous collectivement réussi cette réduction de la pauvreté? D’abord, par la croissance des économies en voie de développement, en particulier la Chine et ensuite, par les mesures qui réduisent les inégalités. Pour The Economist, la solution à la pauvreté est donc simple : laissons faire le marché, réduisons l’intervention de l’État et signons des accords de libre-échange. Bref, continuons comme nous l’avons fait, ça nous a si bien servi jusqu’à maintenant. 

11 novembre : jour du souvenir de l’inégalité salariale

En 1996, le gouvernement du Québec votait à l’unanimité une loi visant l’équité salariale qui souhaitait corriger le fossé de revenu entre les femmes et les hommes. Où en sommes-nous en ce qui concerne l’égalité des salaires au Québec après 17 ans du vote de cette loi et trois ans après les délais légaux fixés pour y arriver?

En reprenant les données sur le taux horaire de Statistique Canada, on remarque que l’égalité de revenu est loin d’être atteinte. En 2010, la différence était de 11,9%, tandis qu’aujourd’hui elle se chiffre à 12,1% : cela fait donc trois ans que ça stagne. Ceci veut aussi dire qu’un homme gagne en moyenne 3$ de l’heure de plus qu’une femme. Donc, un homme qui travaille à temps plein gagnerait environ 5000$ de plus par année qu’une femme qui travaillerait le même nombre d’heures. Il pourrait arrêter de travailler aujourd’hui et il aurait atteint le même revenu, au total, qu’une femme à la fin l’année.

De Wal-Mart à Denis Coderre : la privatisation tranquille

L’idée selon laquelle il faut diminuer l’emprise de l’État sur nos vies et notre économie est sans doute un des lieux communs les plus persistants de la pensée néolibérale. Cette position s’appuie sur la croyance que l’État brime les libertés individuelles et l’initiative privée (on trouve un exemple de ce point de vue ici), en plus de nuire à la compétitivité des entreprises (ce point de vue est exprimé ici) en mettant d’innombrables obstacles sur le chemin de la croissance de leur profit (taxes, impôt, réglementations environnementales, normes du travail, etc.).

Sans nier l’importance des pouvoirs publics dans les sociétés actuelles, on se demande tout de même si cet acharnement contre la supposée toute-puissance de l’État ne nous empêche pas de voir l’extraordinaire emprise qu’ont en revanche les grandes entreprises sur nos vies, sur l’économie et sur nos gouvernements.

Libre-échange avec l’Europe : des médicaments plus chers

En début de semaine, j’écrivais sur le peu d’attention donnée à l’Accord de libre-échange que le Canada a signé avec l’Union européenne et qui attend sa ratification. Une étude publiée aujourd’hui par nos collègues du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) montre comment cet accord mènera à une hausse du coût des médicaments.

Même si les négociations ont été tenues en secret et que le texte de l’accord demeure inaccessible aux citoyennes et citoyens, certains éléments ont filtré. Ainsi, nous savons qu’il :

La solidarité à 20$

Agnès Maltais nous apprenait aujourd’hui que les prestations d’aide sociale seront augmentées de 20$ par mois pour les personnes seules et bonifié par la suite jusqu’à un supplément de 50$ en 2017. Associée à cette mesure, la ministre annonçait également une nouvelle conception de l’aide et du soutien aux personnes qui se retrouvent sur l’assistance économique de dernier recours. Fini la lutte à la pauvreté. Maintenant, la solidarité, elle est durable.

Dans les faits, qu’aura comme effet la hausse annoncée? Est-ce qu’elle aidera vraiment la situation des personnes qui touchent ces prestations? D’abord, rappelons que les montants reçus de l’aide sociale sont déjà très bas, bien en dessous du seuil de faible revenu pour une personne seule. Entre 2006 et 2009, on a cru pertinent de ne pas indexer complètement les prestations au coût de la vie. Résultat? Les plus pauvres sont encore plus pauvres et un rattrapage est nécessaire. Ainsi, le 20$ de plus qui sera versé aux prestataires, s’il augmente leurs revenus, ne sera même pas suffisant pour les ramener à ce que ces personnes obtenaient en 2006. Et les sommes demeurent bien en-deçà du seuil de faible revenu. En fait, les deux premières années de ce “réinvestissement” ne couvrent même pas les compressions de 19 M$ réalisées par le gouvernement péquiste.