Nous le savions déjà, l’endettement des ménages québécois est un problème de plus en plus alarmant. De l’autre côté, on apprend qu’au Québec, près de 40% des ménages dans lesquels il y a au moins une personne qui travaille dépensent l’ensemble et souvent même plus de leur salaire au fur et à mesure. Ce qui veut dire aucune possibilité d’épargne, peu de remboursements de dette, mais surtout, cela signifie vivre d’une paie à l’autre sans être en mesure de faire face à des imprévus.
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Et les revenus dans tout ça?
Depuis son élection, le Premier ministre Couillard fait tout pour éviter d’utiliser publiquement les termes austérité et coupures. Il préfère parler de « changements budgétaires ». Dans la réalité, nous nous doutons bien que les résultats risquent d’être pas mal les mêmes. Nous avons déjà écrit un billet de blogue sur les effets des politiques d’austérité déjà annoncées sur la vie du commun des mortels au Québec. Comme notre premier ministre, nous ne sommes évidemment pas contre la lutte au gaspillage des fonds publics. Cependant, considérant que depuis le début de la quête de l’atteinte du déficit zéro, l’exercice budgétaire se rapproche davantage à un acharnement à réduire la taille de l’État plutôt qu’à une réelle volonté d’améliorer l’accessibilité et le fonctionnement des services, il faut peut-être se demander si les coupures budgétaires n’ont pas plutôt nui à l’économie au lieu de la favoriser.
Du « grand fiou » à la transition
Vous êtes ministre des Finances et vous annoncez à grands cris une catastrophe à venir. Lorsque vous présentez finalement des changements plus timides, tout le monde pousse un grand « Fiou! » de soulagement : on l’a échappé belle. Personne ne porte alors attention aux transformations bien réelles en cours. De toute évidence, Carlos Leitão connaît bien cette stratégie baptisée « le grand fiou » par le groupe d’humoristes Les Zapartistes.
Budget Leitão : faire l’austérité sans la nommer
Avant le dépôt du budget, comme pendant sa présentation, le ministre des Finances Carlos Leitão a parlé de rigueur et de sérieux, mais jamais d’austérité. Pourtant, il est bien question d’austérité dans ce budget, plusieurs ministères obtiendront moins d’argent l’an prochain qu’ils n’en ont cette année. Voici les compressions :
Papa a raison
Nouveau gouvernement, nouveau rapport d’experts, nouveau trou « inattendu » dans le budget, nouveau rappel qu’on vit au-dessus de nos moyens. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’on nous brandisse le « bon père de famille », cette figure mythique que l’État n’incarnerait plus depuis longtemps et dont l’absence explique notre situation économique catastrophique. La dette nous étouffe! Il faut que ça balance! Vous, votre budget, vous le gèreriez comme ça?
Mais avant de s’attaquer au fond du problème, parlons un peu de la forme et de cette notion désuète de « bon père de famille ». Elle laisse entendre qu’il existe qu’un seul (bon) modèle de père qu’on imagine traditionnel, autoritaire, mais juste, celui qui disait non quand votre mère disait oui (ou est-ce le contraire?)… Une bonne mère gèrerait son budget autrement? Ce sont les mères monoparentales qui doivent être déçues.
Éloge de la gratuité
La situation budgétaire du Québec en inquiète plus d’un (comme il est possible de le voir ici, ici et ici). Les Québécois-e-s, au travers leur État et leurs institutions publiques, vivraient bien au-dessus de leurs moyens, et ce, depuis fort longtemps. En conséquence il faudrait augmenter les tarifs exigés des utilisateurs des services publics. C’est exactement ce principe qu’a suivi Mme Marois il y a quelques semaines en annonçant une augmentation des tarifs des services de garde, ceux-ci devant passer de 7$ par jour à 9$.
Ce principe, que l’on nomme souvent « l’utilisateur-payeur », repose sur une idée toute simple voulant qu’il n’existe pas une telle chose qu’un service public gratuit, quelqu’un quelque part devant payer la facture (pour les infrastructures, les salaires, l’administration, etc.). Il serait donc injuste d’imposer le paiement de ce coût à l’ensemble de la population.
Québec dans le rouge : la faute à DiCaprio
C’est reparti. L’approche du budget du Québec entraîne les frappes préventives de la droite économique. La semaine dernière, la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke marquait le début de la saison budgétaire en évoquant le « choc » qui frappera le Québec « d’ici 2050 ». Aujourd’hui, c’est au tour du Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) de HEC Montréal de publier son bilan de la productivité du Québec, un véritable exercice annuel d’autoflagellation à propos de l’économie québécoise et des finances publiques.
Les constats sont connus. Le Québec n’est pas assez productif, il ne crée pas suffisamment d’emplois et les impôts sont trop élevés. Par ailleurs, l’État, comme les ménages, vivent au-dessus de leurs moyens. Le premier dépense une fortune dans les services publics et les deuxièmes sont surendettés parce qu’ils manquent de littératie financière. Vient enfin le vieillissement de la population qui assène le coup de grâce aux contribuables québécois excessivement oisifs qui vivraient « à l’européenne ».