Le bulletin du Conseil du patronat: beaucoup de bruit pour rien

Pour une 5e année consécutive, le Conseil du patronat du Québec (CPQ) nous fait l'honneur de publier son bulletin de la prospérité. Encore une fois, la note conférée au Québec (C) donne l’impression que nous n’en ferions pas assez pour favoriser la croissance économique.

La fiscalité est bien entendu au centre des critiques, tout comme les coûts de rémunération des salarié.e.s ou encore la forte présence syndicale qui distingue le Québec des autres provinces canadiennes. Cela n’a pas grand-chose de surprenant : le CPQ nous a toujours habitué à privilégier ses propres intérêts à ceux de l’ensemble de la population.

Burger King et Tim Hortons : est-ce que le Canada a gagné à la loterie de l’exode fiscale?

Dans un précédent billet, nous avons expliqué pourquoi le Canada était une juridiction intéressante sur le plan fiscal pour y déménager son siège social. Nous y exposions que le Canada participait à la fois à faciliter les planifications fiscales agressives pour les multinationales et offrait par le fait même une ouverture alléchante de ses frontières pour l’exode fiscal que connait actuellement les États-Unis.353382-sepik1

Au-delà des considérations d’une planification fiscale agressive de la part de 3G Capital et de Burger King, nous pourrions tout de même nous réjouir du déménagement et des retombées anticipées pour le Canada. L’ampleur de ces retombées est encore inconnue, et présentement à l’étude par le gouvernement conservateur.  Il est impossible de nier qu’il y aura quelques emplois de créés pour faire rouler le siège social, mais cela risque d’être assez marginal

Burger King et Tim Hortons : le Canada est-il devenu un paradis fiscal?

L’acquisition de la chaine canadienne par Burger King et 3G capital a fait beaucoup de bruit dans les médias cette semaine. Plusieurs spécialistes parlent du taux d’imposition du Canada favorable aux entreprises et des fabuleux revenus que cette transaction apportera chez nous. Pour vous, l’IRIS a décidé d’ajouter son grain de sel et de se pencher sur la question en deux billets de blogue.

Donut_burgerL’achat de la chaine de restaurants Tim Hortons par Burger King et 3G Capital a mis à l’avant-scène le problème de l’inversement fiscal. Le terme d’exode ou d’exil fiscal semblerait cependant plus approprié, puisque le but de l’opération est de déménager le siège social d’une multinationale vers un autre pays dans le but, avoué ou non, de sauver de l’impôt. Présenté de cette façon, nous pouvons trouver que cette transaction ressemble au mouvement massif de délocalisation d’entreprises débuté au cours des années 90 et encore en pleine expansion aujourd’hui.

Dans ce cas-ci, on parle principalement d’entreprises qui déménagent leurs usines dans des lieux où il est plus avantageux sur le plan des normes du travail et de la fiscalité d’y avoir pied à terre. Sur l’impôt plus spécifiquement, il est facile de comprendre qu’une entreprise qui est imposée par exemple à 38% soit plus tentée de l’être à 15%. La majorité des spécialistes qui se sont penchés sur le déménagement du siège social de Burger King vers Oakville en Ontario reprenaient cette analyse, et semblaient s’étonner du même coup que le Canada offre des taux d’imposition beaucoup plus bas qu’aux États-Unis. Nous avons d’ailleurs déjà écrit un billet de blogue qui faisait la comparaison entre le Québec et certains états américains.

Il a été rapporté que l’actuel directeur général, Daniel Schwartz, considérait qu’il n’y avait pas d’économies fiscales majeures à envisager. Et il n’a pas complètement tort lorsque l’on regarde les taux effectifs (réellement payés) des deux compagnies. Le taux en Ontario est de 26.5% (contrairement aux États-Unis, il n’y a pas de palier d’imposition pour les entreprises au Canada) et l’an dernier, Burger King aurait eu un taux effectif de 27.5%. Sur plusieurs de milliards de profit, c’est une somme considérable, mais moins de 1%, entendons-nous que ce n’est pas l’El Dorado non plus. Alors pourquoi parler d’exode fiscal? Tout simplement parce que l’avantage fiscal ne se situe pas dans les taux d’imposition, mais dans le déplacement du capital. Il est impossible de saisir toutes les ramifications et avantages fiscaux que va accorder le déménagement du siège social, mais en voici quelques-uns qui exposent en partie le potentiel des planifications fiscales agressives qu’offre le Canada aux multinationales étasuniennes.

Les inégalités à l’abri des crises économiques

Les inégalités sont à la hausse. Depuis maintenant une trentaine d’années, on ne compte plus les publications, les rapports et les études qui appuient sur la sonnette d’alarme. Un monde plus inégalitaire, c’est non seulement un monde dans lequel la pauvreté est à la fois plus dure et plus étendue; ce sont aussi des sociétés qui se disloquent : problèmes de logement, d’alimentation, de santé, de transport, etc.

La question que l’on peut se poser est alors la suivante : pouvons-nous espérer un retournement de situation ou bien s’agit-il d’une réalité bien ancrée dans notre époque? Maintenant que les élites politiques appliquent depuis plus de 30 ans le même type de gouvernance néolibérale de l’État et des finances publiques et que la mainmise du secteur financier sur le reste de l’économie s’avère presque entière, pouvons-nous espérer un retournement de situation?

Lac-Mégantic causée par la lutte au “red tape”?

Le directeur du Centre Canadien des Politiques Alternatives (CCPA), Bruce Campbell, vient de publier un second rapport à propos de la tragédie de Lac-Mégantic. Il y fait le bilan des audiences tenues par le Bureau de la sécurité des transports (BST) qui remettra son rapport demain – mais aussi de toutes les informations qu’il a lui-même révélées dans son premier rapport et qui ont depuis été publiées dans les médias. Les 25 pages du rapport de Bruce Campbell sont accablantes pour Transport Canada, à chaque étape du processus mis en place pour protéger le public contre des catastrophes, on voit des exceptions, des règles floues, des vérifications qui ne sont pas faites… Derrière cette meurtrière incompétence que retrouve-t-on? La guerre du gouvernement fédéral contre le red tape.

La lecture complète du rapport vaut le coût, mais sortons quelques exemples particulièrement inquiétants. Allons-y en vrac :

Un graphique qui annonce le prochain tsunami?

Le citoyen moyen, tout comme la citoyenne moyenne d’ailleurs, est exposé sans arrêt à des nouvelles économiques sous forme d’indices et de taux qui prennent régulièrement les analystes et les expert.e.s par surprise parce qu’ils s’avèrent meilleurs ou pires que les prévisions initiales (dont on se questionne parfois sur la provenance…). Une semaine, c’est la confiance des consommateurs aux États-Unis qui est à la hausse, la suivante c’est la balance commerciale qui se creuse au Canada, ou encore c’est l’inflation, les mises en chantier, la vente au détail ou bien entendu, la progression (ou le ralentissement) du produit intérieur brut (PIB).

L’odeur du pari passu excite les vautours

VautourLe 16 juin dernier, l’Argentine a échoué à faire entendre à la Cour suprême des États-Unis un appel de la décision prononcée par un juge new-yorkais dans une affaire qui l’oppose à deux fonds vautours, NML Capital et Aurelius. Ma collègue Julia Posca a déjà parlé de cette affaire dans un billet publié il y a dix-huit mois. Les péripéties des dernières semaines ont suscité de nombreuses spéculations, projections et analyses dans l’univers de la finance. Cette affaire est importante puisqu’elle traite de dette souveraine à une époque où l’endettement public est une préoccupation généralisée. Et dans laquelle les vautours mangent de la dette.

*****

2001, l’Argentine est en faillite. Elle avait pourtant été une « élève modèle du Fonds monétaire international (FMI) » et appliqué à la lettre les diktats ultralibéraux des années 80-90 : « Elle a, en effet, mis en œuvre avec application et persévérance des programmes d'ajustement structurel, gouvernés par trois principes, qui font partie intégrante du "Consensus de Washington" : la flexibilité, l'ouverture de l'économie et le retrait de l'État, réduit à des fonctions régaliennes strictes. » (La documentation française). Mais la prospérité n’était pas au rendez-vous. Au contraire, la seule « grande classe moyenne » de l’Amérique latine a sombré avec l’économie du pays.

Poissons gluants et malabars

goldfish_frontview

Un ami m’a déjà dit que Michel Foucault – sur qui il faisait sa thèse – est comme un poisson gluant. Quand on pense l’avoir attrapé, il nous glisse des mains. Cette métaphore illustre bien comment je me sens devant plusieurs concepts économiques. Cette science qui se prétend impitoyablement froide repose en fait sur quelques idées étonnamment fuyantes.

La première fois que j’ai été frappé par ce constat, c’est en me penchant sur le concept de productivité pour un billet sur ce blogue. En apparence, l’idée est à la fois solide et vitale au processus économique. Elle est l’ennemie du gaspillage. Or, comment peut-on aimer le gaspillage? Surtout à l’époque des 3R-V. On veut faire le plus possible dans le moins de temps de travail possible. C’est logique, mais pas si simple que ça à calculer. À l’époque, je rappelais qu’on procède en général de façon simpliste pour calculer la productivité. On compte l’argent produit par un secteur et on le divise par le nombre d’heures travaillées dans ce secteur. Un secteur est productif s’il génère beaucoup d'argent avec peu d’efforts. Viennent alors à l’esprit la mafia et la spéculation financière et l’avenir promet d’être radieux. Plus sérieusement, le voile de la monnaie obscurcit tellement la question de la productivité, on se demande si elle finit par vouloir dire véritablement quelque chose.

L’heure est au décrochage

VictorVPhonograph

Qu’il s’agisse de rigueur budgétaire ou d’austérité, nous savons quelle direction entend prendre le gouvernement de Philippe Couillard dans les prochains mois.

Certain.e.s, l’IRIS notamment, sont d’avis qu’il s’agit d’un très mauvais choix de politique publique. Tel que nous l’anticipions il y a un an, la résorption trop hâtive du déficit budgétaire a nui à la relance économique, amenuisant ainsi les recettes de l’État et contribuant au maintien d’un déficit.

D’autres s’époumonent à faire écho aux nombreuses remises en question des politiques d’austérité qui nous viennent d’Europe et d’ailleurs. Le FMI, l’OCDE, la Commission européenne, les États-Unis ont tous remarqué que l’austérité apparaît comme contre-productive. Les plus dogmatiques des néolibéraux insistent pour garder le cap, mais ces institutions s'effraient de l'instabilité que pourrait générer l’accentuation des conséquences socio-économiques de ces politiques.

Le hockey, un sport pas pour tout le monde

Pendant les séries, le Québec tout entier vibre au rythme des Canadiens de Montréal. Pourtant, l’euphorie suscitée par les exploits sportifs de P.K. Subban ou encore le profond désespoir causé par la blessure de Carey Price ne peuvent complètement effacer le malaise que suscite ce spectacle de haut niveau. Si, comme plusieurs, j’écoute avec passion tous les matchs à la télévision ou dans les bars de la métropole, je ne peux m’empêcher de trouver que quelque chose cloche avec notre sport national.

Ce n’est pas seulement le fait de voir des millions être offerts à des gars qui ont comme seul talent de savoir patiner et lancer des rondelles qui dérange, mais bien de constater que le hockey est de moins en moins abordable. En fait, si on veut jouer au hockey, si on veut y initier nos jeunes ou encore se payer une soirée au Centre Bell, force est de constater que de tels plaisirs ne sont pas accessibles à toutes les bourses.

Qu’est-ce qui cloche avec la science économique?

unnamed

En cette journée du 5 mai 2014, 22 associations et collectifs étudiants en économie de 18 pays, dont fait partie le Mouvement étudiant québécois pour un enseignement pluraliste de l’économie, signent un manifeste international réclamant des changements profonds à la manière dont l’économie est présentement enseignée dans nos universités. Isolement face aux autres courants de pensée, isolement face à la critique, isolement face aux autres sciences sociales; les reproches adressés à la science économique traditionnelle ratissent large et ne sont pas nouveaux. Face à un modèle d’enseignement dont l’influence est internationale, la critique s’organise aujourd’hui à l’échelle globale.

Pourquoi il ne faut pas privatiser Postes Canada

Dans les derniers mois, on dirait que Postes Canada a tout fait pour qu’on veuille privatiser ses services. D’abord, on nous annonce que la distribution à domicile ne se fera plus dans certaines villes. Ensuite, on hausse radicalement le prix du timbre, le faisant passer à 1$. Beaucoup de gens y verront une bonne raison de se dire : pourquoi continuer à avoir un service public dont on pourrait éventuellement avoir à payer les déficits si c’est pour avoir des diminutions de services et des hausses de tarifs? Prenons garde à ce réflexe, la privatisation de Postes Canada pourrait bien mener à multiplier ces problèmes plutôt qu’à les résorber.