Lac-Mégantic : au-delà de la voie de contournement

La semaine dernière avait lieu le triste premier anniversaire de la catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic. Lors de son passage dans la ville pour offrir son support, Philippe Couillard a été accueilli par un groupe citoyen réclamant la construction d'une voie de contournement de 13 km afin que des matières dangereuses ne circulent plus par le centre-ville. Bien que cette revendication soit justifiée par la dénivellation exceptionnelle et les courbes en cascade qui caractérisent l'entrée dans la ville, d'autres accidents ferroviaires survenus récemment dans d'autres régions remettent en question l'opportunité même de permettre le transport de pétrole par train au Québec.

Êtes-vous dans la « zone d'explosion »?

En même temps que l'on se recueillait à Lac-Mégantic, l'organisme environnemental américain ForestEthics mettait en ligne la carte interactive « Oil Train Blast Zone » (zone d'explosion des trains pétroliers), qui démontre de façon éloquente que le pétrole par train passe à travers la plupart des grands centres urbains québécois ainsi que des dizaines de villages. Il suffit d'entrer son adresse civique et on peut voir si sa résidence se situe ou non à l'intérieur d'une zone à risque de sinistre. Plutôt inquiétant.

Lac-Mégantic : camouflage de la vérité derrière l’échec de la réglementation

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La semaine dernière, 10 mois après la catastrophe qui a frappé la ville de Lac‑Mégantic, les procureur.e.s du gouvernement du Québec ont déposé des accusations criminelles contre trois employés de première ligne de la société Montréal Maine and Atlantic Railway (MMA).

Les suspects, qui ont dû défiler en public menottes aux poings dans le pur style américain de la « marche du condamné », ont été accusés de 47 chefs d’accusation de négligence criminelle ayant causé la mort.

La bulle financière du carbone

Dans un récent billet, j’ai fait une très courte recension des coûts associés aux catastrophes naturelles liées à la pollution. Sans surprise, j’incitais les politicien.ne.s et les économistes traditionnel.le.s à se sortir la tête des sables bitumineux et à regarder en face les dangers liés à la croissance de l’empreinte écologique au pays et dans le monde.

Bien que les coûts liés à la crise climatique soient majeurs, on n’a pas l’impression d’être réellement touché. Bien sûr, des fonds spéciaux financés à même les impôts pourraient servir à payer le prix d’éventuelles reconstructions, mais les effets sur notre avoir personnel semblent somme toute peu importants. Pourtant, l’éclatement de la bulle financière risque mener vers une des crises financières mondiales les plus importantes des dernières décennies.

Voici pourquoi :

Le prix de la pollution

Au Canada, on n’a pas l’habitude d’associer environnement et portefeuille. On a plutôt tendance à croire  (à tort) que les intérêts environnementaux nuisent au développement économique. Cependant, bien que pour certains investisseurs, la hausse des inquiétudes environnementales constitue un irritant, elle influence peu les décisions d’affaires. En termes économiques, la pollution est d’ailleurs considérée la plupart du temps comme une externalité, c’est-à-dire un effet négatif incalculable sur le bien-être que l’on ne prend d’ailleurs pas en compte.

Le dogme climato-sceptique

Alors que les sondages démontrent que plus de 97 % des scientifiques qui travaillent sur le climat s’accordent pour dire que le réchauffement climatique est causé par l’activité humaine, il reste encore une frange de la population qui nie le fait qu’il y a un réchauffement climatique ou que celui-ci est causé par l’activité humaine.

Qui sont-ils? 

Généralement nommés climato-sceptiques ou Climate change deniers, ils représentent autour de 10% des Québécois.e.s. Ils sont plus actifs dans les médias que leur réel poids démographique et semblent particulièrement apprécier s’épandre sur les commentaires de blogue.

Anticosti : l’or des fous

Dans la campagne électorale qui s'amorce, trois partis politiques sur quatre présents à l'Assemblée nationale s'entendent sur l'intérêt économique d'exploiter le pétrole de schiste d'Anticosti. Entre les risques environnementaux que représente l'exploitation d'hydrocarbures sur cette île du Golfe et 14 milliards de dollars en retombées économiques pour le gouvernement et la société québécoise, le choix semble s'imposer de lui-même : forons creux, mais forons bien. C'est-à-dire en respectant les « plus hauts standards environnementaux ». Même Daniel Breton, ancien ministre de l’Environnement et ancien militant écologistes'est rallié à l'idée qu'il faut au moins explorer le potentiel que représentent ces gisements détenus par le nouveau partenariat public-privé « Québec, Pétrolia, Maurel et Prom ».

Comment cacher un rapport sans se fatiguer

En juillet 2013, le PQ annonçait en grande pompe une vaste consultation sur les enjeux énergétiques du Québec qui devait servir de base à l’élaboration de la prochaine stratégie énergétique de la province. Cette consultation, coprésidée par messieurs Mousseau et Lanoue, avait pour mandat de dresser un portrait du secteur énergétique au Québec et de faire des recommandations pour répondre aux enjeux énergétiques, environnementaux et économiques à venir. Pour ce faire, la commission a rencontré nombre d’experts et recueilli plus de 460 mémoires provenant à la fois de l’industrie privée, des différents groupes environnementaux et de la population en général. Or, bien que le rapport ait été rendu le 20 janvier dernier, il aura fallu quelques mois et des demandes répétées de journalistes du Devoir pour que le volumineux document de plus de 300 pages contenant 57 recommandations soit rendu public. Vous pouvez d’ailleurs le consulter ici .

Élections : ce dont on ne parlera pas

Philippe Couillard a raison, le dépôt du budget d’hier annonce le début de la campagne électorale. Le Parti québécois voit une possibilité d’aller chercher une majorité, il va tenter sa chance. Une campagne électorale est, en théorie, l’occasion de discuter de ce que nous voulons comme société. Voyons quelques enjeux importants qui ont de bonnes chances d’être malheureusement mis de côté lors des prochaines semaines.

D’abord, la question centrale de notre siècle, l’environnement, risque d’être laissée de côté. Bien sûr, on parlera de ressources naturelles, plus particulièrement du pétrole à Anticosti. On parlera de rapport entre les risques d’exploitation et les revenus pour le Québec, ce qui revient à déguiser une discussion sur l’économie en discussion sur l’environnement.

Le projet Mine Arnaud de Sept-Îles est voué à l’échec

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Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a conclu dans son rapport rendu public hier que le projet de mine d’apatite Arnaud, pour lequel Investissement Québec souhaitait engager 465 M$ à titre de partenaire principal, n’est pas acceptable dans sa forme actuelle. Face aux perspectives plus qu’incertaines quant à la rentabilité à long terme du projet, en plus des maintes questions laissées sans réponse en matière de droits autochtones, d’environnement et de santé publique, il paraît aujourd’hui logique de mettre le projet de côté.

Rentabilité du projet : une impossibilité mathématique

Porté par Investissement Québec à 67 %, en partenariat avec le producteur de fertilisants Yara International à 33 %, le projet Mine Arnaud prévoit la production d’1,3 million de tonnes de concentré d’apatite par an sur l’horizon 2016-2040. Le minerai serait livré en Norvège via deux voyages de bateau par mois à partir du port de Pointe-Noire. L’exploitation permettrait la création de 330 emplois directs et de 425 emplois indirects.

Le Québec complice de la crise climatique?

Residents gather coins and other salvageable materials from the ruins of houses after Super Typhoon Haiyan battered Tacloban city in central Philippines

Le gouvernement du Québec a annoncé hier qu’il se faisait partenaire de Pétrolia, Corridor Ressources et Junex pour explorer le potentiel pétrolier de l’île d’Anticosti. Selon le raisonnement mis de l’avant, comme nous aurions besoin de pétrole pour encore longtemps, nous ferions aussi bien d’en exploiter directement chez nous, car en adoptant les meilleures pratiques, nous limiterions les impacts environnementaux liés à l’extraction pétrolière d’outre-mer.

Or, cette ligne argumentative repose sur des fondements factuels erronés. En réalité, exploiter le pétrole de l’île d’Anticosti serait bien plus dommageable que de poursuivre l’importation selon les paramètres actuels, pour le temps qu’il reste avant la nécessaire transition écologique de l’économie québécoise. En fait, exploiter le pétrole de l’île d’Anticosti aurait plutôt pour effet d’exacerber de façon significative le problème des émissions de gaz à effet de serre (GES) et ferait du Québec un participant actif dans la crise climatique imminente.