Pourquoi un autre lock-out pour les pressiers et pressières de Québecor?

Vous l’avez peut-être lu quelque part (ici ou ), il y a un peu plus de deux semaines, les pressiers et pressières du Journal de Montréal (qui impriment aussi le 24H et Le Devoir) sont en lock-out. C’est 44 travailleurs et travailleuses qui sont dans la rue. On peut se demander pourquoi une si grosse entreprise en arrive à des moyens aussi brutaux avec un si petit nombre de gens? J’ai tenté de rassembler quelques données pour nous permettre de comprendre.

Le luxe de la sécurité financière

Alain Bouchard, pdg du groupe Alimentation Couche-Tard, a affirmé en mai dernier à l’occasion d’une causerie organisée par le Cercle canadien de Montréal, un club sélect réunissant des membres de la communauté des affaires, que « l’acquisition de connaissances économiques stimulerait la création de richesse ». Venant de quelqu’un dont l’entreprise au Québec paie les personnes qu’elle emploie à peine au-dessus du salaire minimum, cette déclaration a de quoi surprendre. M. Bouchard, lui, a touché un salaire avec compensations de 7,9 millions de dollars en 2014. Mais ce n’est pas tout. Cette année-là, il a aussi décroché la 28e position dans le classement 2015 des plus grandes fortunes canadiennes selon le Canadian Business, et ce, grâce à une richesse évaluée à 2,5 milliards de dollars.

Les gadgets anti-impôt de l’Institut Fraser

Comme il le fait chaque année, l’Institut Fraser publiait la semaine dernière son «Indice d’imposition des consommateurs canadiens» (Canadian Consumer Tax Index). Organisation promarché, le Fraser est aussi connu pour un autre gadget anti-impôt, le fameux Tax Freedom Day (la vidéo qui l’accompagnait cette année valait vraiment le détour). Il y a ces moments dans la vie où il y a tant de manières de s’objecter à une idée bébête qu’elles s’engouffrent toutes en même temps et qu’on reste un moment figé, déstabilisé par tant de simplisme. C’est la réaction que peut provoquer l’indice en question.

Étude Godbout—St-Cerny sur l’évolution des revenus – Deuxième problème de méthode : la fiabilité des données

Je poursuis ici mes réflexions sur l’étude de Luc Godbout et Suzie St-Cerny portant sur l’évolution des revenus des ménages. Dans un précédent billet, j’ai exposé ma première réserve méthodologique (très importante me semble-t-il) à propos du choix des années. J’aimerais me concentrer maintenant sur une partie très précise de l’étude, partie à laquelle on a offert une importante couverture médiatique.

 

Étude Godbout—St-Cerny sur l’évolution des revenus – Premier problème de méthode : le choix des années

À la fin du mois de juin, Luc Godbout et Suzie St-Cerny publiaient une étude portant sur l’évolution des revenus des ménages de 1976 à 2011. Le document défend la thèse que si l’on prend en considération les changements de composition des ménages et la diminution de la taille de ceux-ci, nous observons une hausse importante des revenus pendant cette période. Les deux auteur∙e∙s nous offrent un portrait différent des analyses statistiques précédentes à propos de l’évolution des revenus, analyses qui stipulent plutôt une baisse ou une stagnation des revenus pendant la période étudiée. 

Les politiques pro-productivité, bonnes pour les travailleurs ?

Il y a deux ans, l’IRIS publiait une étude montrant que la rémunération des travailleurs et travailleuses du Québec a augmenté moins rapidement que la productivité du travail pendant les dernières décennies. On peut bien s’évertuer à créer de la richesse, concluait l’étude, mais encore faut-il que les gens qui la génèrent puissent en profiter…

 

Santé mentale: et si le problème c’était le travail?

Au début du mois de mai se déroulait la semaine nationale de la santé mentale. Cette semaine visait principalement à faire de la sensibilisation sur la dépression. Nous ne sommes évidemment pas dans un processus nouveau : déjà en 2007, une publicité reflétant les principaux stéréotypes et clichés sur la question était au centre de la campagne « Mettons fin à nos préjugés Â». Ces campagnes de sensibilisation n’empêchent malheureusement pas les problèmes d’accessibilité aux soins, et ce, particulièrement dans un contexte d’austérité. Et si nous parlions un peu plus des causes afin d’élaborer des politiques de prévention?

Le ruissellement ne fonctionne pas, vive le ruissellement!

Le FMI a tranché. La fameuse doctrine de l'économie de ruissellement (trickledown economics) ne fonctionne pas. Donner des avantages aux plus riches pour qu’ils redynamisent l’économie par leurs choix judicieux aurait été un échec sur plus de 30 ans. Il semblerait, au contraire, que c’est en misant sur l’augmentation des revenus des 20 % les plus pauvres qu’on parvient à avoir véritablement un effet positif sur la croissance, et ce, tant dans les sociétés en voie de développement que dans les économies avancées.

La croissance à tout prix

Les dernières semaines nous ont gâté en matière de bonnes nouvelles économiques. À Québec, l’entreprise suédoise IKEA ouvrira enfin un centre de cueillette pour les commandes faites en ligne ou par téléphone. À Montréal, non seulement le gouvernement du Québec a éliminé les restrictions concernant les heures d’ouverture des commerces de détail pour certains quartiers du centre-ville, mais en plus, l’entreprise Carbonleo a annoncé qu’elle consacrerait 1,7 milliard de dollars à la construction du centre Royalmount Ã  l’angle des autoroutes 15 et 40, « un pôle urbain multifonctionnel d’avant-garde Â» qui comprendra non moins de 160 boutiques spécialisées, plus d’une cinquantaine de restaurants, deux hôtels, une salle de spectacle de 3000 places de même qu’un centre aquatique. Difficile dans ces circonstances de contenir son enthousiasme. Pour les plus rabat-joie, sachez que bon an mal an, la consommation des ménages représente environ les deux tiers du produit intérieur brut au Canada. Alors plus on consomme, mieux se porte l’économie !

Réponse à Jean-Jacques Samson : sortir des lieux communs et rendre réellement hommage aux travailleurs et travailleuses

Dans sa chronique « Hommage aux bas salariés » publiée le 1er mai dernier, Jean-Jacques Samson défend la thèse qu’une hausse du salaire minimum pousserait les assisté.e.s sociaux à retourner sur le marché du travail. Son analyse implique que ces dernières et ces derniers sont paresseux alors que dans les faits, ils et elles survivent à peine. Il affirme ensuite en se référant à notre note sur le salaire viable qu’une majoration du salaire minimum à un salaire viable engendrerait une spirale inflationniste.