Le Bonhomme Sept Heures

Le président du Conseil du trésor a ouvert son allocution de mardi en voulant nous rappeler des chiffres. D’abord le service de la dette, ensuite le montant absolu de la dette. Une fois ces mots prononcés, tout était clair et plus rien n’était possible. Sans les mettre en rapport avec rien, par leur seule valeur en soi, ces chiffres exigeaient impérieusement, d’eux-mêmes, les changements que M. Coiteux allait par la suite nous présenter.

Au Québec, mais ailleurs aussi soyez-en assurés, la dette est un Bonhomme Sept Heures. Comme pour les enfants indisciplinés qui refusent d’aller se coucher, la dette publique sert à mettre fin aux discussions sur les finances publiques. Vous pouvez avoir n’importe quelle bonne idée, offrir une réflexion originale ou importante, on vous répondra systématiquement: «oui, mais la dette» comme si sa seule évocation suffisait à clore le débat. Mon collègue Francis Fortier et moi nous sommes penchés sur l’état de la dette du Québec pour voir dans quelle situation nous étions réellement et si la dette justifiait vraiment tous les sacrifices.

Comment vont les gras durs?

Le salaire des employé.e.s du secteur public défraie la manchette non seulement à cause de la loi 3, mais aussi à cause des négociations du secteur public qui approchent. Comme toujours, on présente nos fonctionnaires comme des « gras durs » profitant de conditions de travail hors du commun. L’année dernière, j’avais mis évidence les mythes que l’Enquête sur la rémunération globale de l’Institut de statistique du Québec (ISQ) venait déboulonner. Cette année encore, cette étude confirme le retard de rémunération globale des employé.e.s du public face à leurs collègues des autres secteurs. Cependant, les résultats de cette année exigent une analyse plus fine afin de bien comprendre les réactions contradictoires qu’elle suscitera.

La rigueur, c’est pour les autres

Dimanche dernier, Lucienne Robillard, ex-ministre libérale, présentait les premières recommandations de la Commission de révision permanente des programmes En juin, le gouvernement Couillard a donné au comité le mandat de cibler des économies potentielles de 3,2 G$ afin de tenter de redresser les finances publiques du Québec ainsi que de réduire le paiement des intérêts sur la dette du Québec.

Ce rapport préliminaire de 176 pages (dont 55 pages blanches…) propose des économies d’environ 2,3 G$ en ayant recours à l’abolition de programmes, à la réduction de transferts ou à une tarification accrue. Divers domaines sont touchés, mais on a pour l’instant plutôt épargné la santé et l’éducation. Il faudra attendre à juin pour un rapport plus complet qui abordera tant ces secteurs publics importants ainsi que les sociétés d’État. Malheureusement, les propositions présentées sont très peu élaborées et ne sont pas mises en contexte, ne permettant pas de juger de leur réelle pertinence. Ainsi on propose des coupes au cœur même de l’État social sans même questionner les impacts et les répercussions des mesures proposées. L’austérité à son meilleur.

Pas si déficitaire, le Québec

Le 19 novembre dernier, Statistique Canada publiait des données sur les finances publiques des provinces canadiennes pour la période de 2008 à 2012. L’événement est passé complètement inaperçu dans les médias québécois. Pourtant, c’est la première fois depuis 2009 que des données plus à jour sont présentées, ce qui revêt un intérêt certain. En effet, Statistique Canada présente des données fondées sur une même méthodologie pour toutes les administrations publiques, ce qui rend les comparaisons possibles, alors que les pratiques comptables sont fort diversifiées. Qu’est-ce qui en ressort ?

Les assistés sociaux

Une étude conjointe du Center for Effective Government et de l’Institute for Policy Studies publiée hier révèle que le montant versé aux PDG de 7 des 30 plus grandes corporations américaines est plus élevé que celui qu’elles ont payé en impôt fédéral en 2013. Malgré des profits avant impôt de 74 milliards de dollars, elles ont reçu un remboursement global de 1,9 milliard de la part du Internal Revenue Service (IRS, l’équivalent de notre agence du revenu). Sur les 100 PDG les mieux payés aux États-Unis, 29 ont en outre touché une rémunération supérieure à ce que leur entreprise a versé au fisc l’année dernière. L’étude souligne aussi que les entreprises où travaillent ces fortunés dirigeants exploitent globalement 237 filiales dans des paradis fiscaux.

La politique selon Martin Coiteux

Dans le cadre d’un portrait de l’actuel président du Conseil du Trésor, Martin Coiteux, un journaliste m’a demandé mon opinion au sujet de ce monsieur. N’ayant croisé la personne qu’à une ou deux reprises dans ma vie et ne l’ayant lu que quelques fois dans les journaux, j’étais bien incapable de fournir une opinion informée à son sujet. Fait rare, le journaliste en question avait du temps devant lui, j’ai donc pu prendre quelques jours pour parcourir environ deux cent pages de ses écrits : surtout des textes publiés dans La Presse, mais également des rapports de recherche et quelques articles scientifiques.

Pétante de santé, la classe moyenne?

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Une étude publiée il y a un peu plus d'une semaine par François Delorme, Suzie St-Cerny et Luc Godbout de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke soutient que la classe moyenne québécoise n’est pas en train de s’éroder, contrairement à une opinion largement répandue. Ces résultats, qui expriment une stabilité de la part des ménages québécois dont le revenu se situe entre 75% et 150% du revenu médian ajusté (la définition choisie par les auteurs pour désigner la classe moyenne) apparaissent d’abord comme une annonce positive. Malgré les obstacles, la classe moyenne québécoise résisterait à travers le temps. Faut-il y voir une nouvelle rassurante dans une époque marquée par l’accroissement des inégalités économiques?

Pour essayer d’en finir avec le rapport Demers

Dans un texte précédent, j’ai présenté quelques points saillants du Rapport du chantier sur l’offre de formation collégiale (ou rapport Demers), afin d’illustrer en quoi les recommandations proposées s’inscrivaient directement dans une perspective de marchandisation de l’éducation. J’aimerais offrir ici un regard critique un peu plus développé sur quelques éléments abordés la dernière fois.

Je ne me souviens plus

Le propre d’un institut de recherche comme l’IRIS est d’analyser de la manière la plus rigoureuse qui soit des données socioéconomiques afin de mesurer, autant que faire se peut, l’impact des politiques publiques et de notre structure économique sur le bien-être de la population. Ce faisant, nous sommes grandement dépendants, comme quiconque s’intéresse à la société en général, des données que produisent les scientifiques du gouvernement, les organismes de statistiques au pays de même que les universitaires dont les recherches sont financées par des fonds publics.

Comment vont les riches?

Depuis la fin de la crise, le gouvernement n’a cessé de nous dire qu’il faut se serrer la ceinture. Tout le monde doit mettre l’épaule à la roue pour sortir le gouvernement du déficit dans lequel il s’est embourbé.

La stratégie du gouvernement est simple : compresser la croissance des dépenses de l’État. À première vue ça n’a pas l’air trop méchant, réduire la croissance des dépenses : elles continuent quand même d’augmenter. Or, comme le gouvernement doit maintenir une croissance rapide de ses dépenses en santé, notamment à cause du salaire des médecins et du coût des médicaments, réduire la croissance des dépenses globales signifie des coupures de postes et de services dans plusieurs ministères.

Pour l’instant, cette stratégie n’a pas donné des résultats très excitants, que ce soit pour la croissance, l’emploi ou l’équilibre budgétaire. Le Québec – comme plusieurs pays dans le monde – vit une période économique plutôt morose.

Morose? Peut-être pas pour tout le monde. 

Messieurs, vous pouvez arrêter de travailler: l’équité de revenu est atteinte pour cette année

C’est aujourd’hui, le 10 novembre, que les hommes du Québec peuvent arrêter de travailler pour le reste de l’année et que le 31 décembre prochain à minuit, en échangeant des vœux de bonne année, ils auront gagné le même revenu de travail que les femmes. Qu’est-ce qui explique que les femmes gagnent moins que les hommes au Québec?