Nuisibles ballounes

Les gouvernements aiment tester leurs idées. Pour le faire, ils envoient dans l’espace public ce qui a été baptisé des «ballons-sondes» par les médias. Les ballons sont des idées de politiques publiques, pas encore ficelées qu’on propulse – par une fuite ou par une mention lors d’une entrevue – dans l’oreille de la population pour tenter de mesurer sa réaction. On comprend l’idée : les politiques et les gens qui les entourent veulent savoir s’ils auront à affronter ou non l’opinion publique sur un enjeu.

Les logiciels libres, un an plus tard

passersacommandeCette semaine, c'est la Semaine québécoise du logiciel libre et plusieurs ateliers et conférences sont organisés sur ce thème un peu partout au Québec. J'en profite pour faire un retour sur la note de recherche sur les logiciels libres que nous avons publiée il y a environ un an. Nous avions alors soutenu que le choix des logiciels libres pour le gouvernement du Québec pourrait contribuer à réduire significativement les coûts et à accroître son autonomie technologique. Que s'est-il passé depuis?

La stagnation permanente : Krugman contre Gordon

stagnation

On s'inquiète de plus en plus de la forte baisse de la croissance économique des dernières années. Par exemple, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) soulignait récemment les conséquences tragiques de cette absence de croissance notamment sur l'augmentation du chômage de longue durée. En plus, on commence à se demander si cette situation ne perdurera pas.

Le Centre for Economic Policy Research (CEPR), centre londonien de recherche en politique économique, a justement diffusé récemment un livre gratuit sur Internet portant sur ce sujet, livre intitulé Secular Stagnation: Facts, Causes and Cures (La stagnation permanente, les faits, les causes et les solutions). Ce livre regroupe 14 textes écrits par des économistes de renom. J'ai lu environ la moitié de ces textes (malgré des différences de points de vue, cela devient répétitif…) et en présenterai deux dans ce billet, car ce sont ceux qui représentent, selon moi, le mieux les divergences de points de vue.

« L’erreur de l’IRIS » selon Vincent Geloso : une blague?

Vincent Geloso nous fait le plaisir de répondre à l’étude que Francis Fortier et moi avons publié mercredi. Je savais qu’il était économiste et qu’il avait étudié à la prestigieuse London School of Economics, mais je ne savais pas qu’il avait également des talents d’humoriste comme il nous l’a montré hier. Il a décidé de démarrer sur un gros punch en prétendant dans son titre que nous faisions erreur sur les taxes à la consommation. Voyons voir ce qu’il en est. 

Non, hausser les taxes à la consommation n’est pas une bonne idée

Vous en avez surement entendu parler, le gouvernement de Philippe Couillard a mis sur pied cet été une commission en charge d’examiner la fiscalité québécoise pour «pour accroître l'efficacité, l'équité et la compétitivité du régime fiscal». La commission est en pleins travaux présentement et devra présenter un rapport d’étape quelque part en octobre. Bien que les résultats de la commission ne sont pas encore publics, voici ce que nous savons toutefois : elle est présidée par Luc Godbout, fiscaliste de l’Université de Sherbrooke qui, depuis plusieurs années, publie au sein de la chaire, dont il est le chercheur principal, de nombreux papiers ventant les mérites d’une hausse des taxes à la consommation au Québec. De plus, le ministre des Finances Carlos Leitao se disait très intéressé à envisager cette option il y a quelques semaines. On serait donc assez peu surpris si la commission favorisait cette option.

Le Saint Graal

Il ne passe presque plus une journée sans que l’on nous rappelle combien l’économie est dans un piètre état. La semaine dernière c’était au tour de l’ONU de s’inquiéter de la lenteur avec laquelle l’économie mondiale et surtout les pays occidentaux retrouve le chemin de la croissance. Dans un rapport de la Conférence de l’ONU sur le commerce et le développement, l’organisation internationale enjoint les gouvernements d’adopter des mesures pour favoriser la demande (la consommation) et l’activité productive (les investissements des entreprises) et non d’alimenter des bulles spéculatives en favorisant la liquidité sur les marchés financiers. Les conséquences sociales de la morosité actuelle, tel que la hausse inquiétante du chômage de longue durée en Europe, expliquent cette « nostalgie de la croissance ». Les signes d’une reprise économique se font aussi rares au Québec. Tout indique en fait que nous traversons une période de stagnation économique, que viennent renforcer les politiques d’austérité du gouvernement provincial. Ceci se reflète par exemple dans la situation de l’emploi, qui est au beau fixe depuis 2012.

Tarif des CPE: la phobie de l’impôt

Une semaine avant la rentrée parlementaire à Québec, le gouvernement Couillard place déjà ses pions en laissant couler de l’information sur son intention de revoir le fonctionnement du financement des CPE. Du tarif unique, les fameuses garderies à 7 $, on propose de passer à un système de participation proportionnel aux revenus des parents.

Tant mieux! diront certain.e.s. Quoi de plus normal que quelqu’un qui va porter ses enfants à la garderie en BMW paie plus que les autres? En s’attaquant au principe d’universalité, qui veut que les mêmes conditions s’appliquent à tout le monde pour avoir accès aux services publics, le gouvernement prétend s’en prendre à une vache sacrée du modèle québécois. 

Et les revenus dans tout ça?

Depuis son élection, le Premier ministre Couillard fait tout pour éviter d’utiliser publiquement les termes austérité et coupures. Il préfère parler de « changements budgétaires ». Dans la réalité, nous nous doutons bien que les résultats risquent d’être pas mal les mêmes. Nous avons déjà écrit un billet de blogue sur les effets des politiques d’austérité déjà annoncées sur la vie du commun des mortels au Québec. Comme notre premier ministre, nous ne sommes évidemment pas contre la lutte au gaspillage des fonds publics. Cependant, considérant que depuis le début de la quête de l’atteinte du déficit zéro, l’exercice budgétaire se rapproche davantage à un acharnement à réduire la taille de l’État plutôt qu’à une réelle volonté d’améliorer l’accessibilité et le fonctionnement des services, il faut peut-être se demander si les coupures budgétaires n’ont pas plutôt nui à l’économie au lieu de la favoriser.

Vos préjugés sur les pauvres démentis par les faits

Les préjugés sur les pauvres sont nombreux. Souvent on entend dire qu’ils dépensent mal le peu d’argent qu’ils ont. J’ai étudié les données pour le Québec de l’Enquête sur les dépenses des ménages de Statistiques Canada pour voir ce qu’il en était pour vrai. Pour simplifier ce texte je n’indiquerai pas les années pour chacune, elles s’étendent de 2009 à 2011 en fonction de la disponibilité des données.

Les pauvres boivent plus

La fameuse caisse de 24 qui, dit-on, traîne sur le balcon des plus démunis : mythe ou réalité? Pour le vérifier, il est intéressant de soulever que le 20% le plus pauvre de la population dépense par année, en moyenne, 289$ en alcool acheté au magasin. À 30$ la caisse de 24, ça en fait dix par année. On constate aussi que seulement 57% des plus pauvres ont acheté de l’alcool dans l’année, donc plus du tiers n’en achète même pas une goutte.

Maintenant, allons voir le 20% le plus riche de la population. Les chiffres sont passablement différents : 1653$ d’achat d’alcool en magasin (soit 55 caisses de 24) et 93,9% qui en a acheté dans l’année.

Le Canada: marchand d’armes

La semaine dernière, le Premier ministre du Canada a complété un séjour de quelques jours dans l’Arctique. M. Harper en a profité pour s’en prendre à son vis-à-vis russe, le président Vladimir Poutine. La raison? La Russie serait la grande responsable de la militarisation de l’Arctique ce qui, il va s’en dire, a de quoi inquiéter de ce côté-ci du pôle Nord. Cependant, quand on connait bien la place centrale donnée au budget de la Défense nationale ainsi qu’aux des symboles militaires par le gouvernement conservateur, cette inquiétude a de quoi faire sourire. Est-il possible que notre Premier ministre reproche à notre lointain voisin de faire exactement ce qu’il fait lui-même?

Je ne vais pas m’attarder ici à faire l’analyse des politiques russe et canadienne d’occupation et de revendications territoriales du Nord. Seulement, M. Harper, avec sa manie de reprocher aux autres ce que lui-même fait a piqué ma curiosité. Se peut-il qu’en plus de la militarisation de l’État canadien, nous assisterions à la militarisation de notre économie? Avec quelques 109 000 emplois directs ou indirects, notre complexe industrialo-militaire gagne en importance.

1832% et des poussières

Selon l’Institut Fraser, la famille canadienne moyenne paierait en 2013 1832% de plus de taxes qu’en 1961. 1832%. Près de 20 fois plus. Ces statistiques donnent mal à la tête. Mais au-delà de la monstruosité du nombre, que veut-il dire?

Comme ça arrive trop souvent, le nombre a comme principale caractéristique d’être sans commune mesure. Et il n’est pas seul. Dans le rapport, on nous dit que, si on considérait les déficits comme des taxes reportées, on arriverait à 2075%. Vous sentez la migraine poindre? Prenez une grande respiration. On va essayer de la traiter avec une bonne dose de précisions et de nuances.

D’abord, dégonflons un peu le pourcentage avec lequel on tente de nous faire peur. L’augmentation qu’il représente est celui des taxes et tarifs… en dollars courants. Ainsi, dans le temps où on pouvait s’acheter un hamburger chez McDonald’s à 15¢, on payait aussi moins de taxes. Le rapport est ainsi comme notre vieil oncle Gilbert qui nous parle avec nostalgie de l’époque où on pouvait, avec seulement 5$, payer la tournée à tout le bar. Sans doute. Mais combien d’heures fallait-il travailler pour obtenir ce 5$? En effet, les choses coûtent plus cher, mais l’argent n’a plus non plus la même valeur. L’Institut Fraser admet du bout des lèvres qu’on pourrait bien utiliser un autre indicateur, ajusté au coût de la vie. L’augmentation devient alors 147% plutôt que 1837%. Un peu moins.