Les inégalités entre locataires et propriétaires vont-elles se creuser au Canada?
29 novembre 2023
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Avec la crise du logement en cours au Québec, il est pertinent de s’interroger sur l’évolution des inégalités de richesse entre les propriétaires et les locataires canadien·ne·s. Or, de récentes données laissent croire qu’elles pourraient s’accroître à la faveur du recul de l’accès à la propriété au Canada.
Des nouvelles données de Statistique Canada nous permettent d’évaluer la richesse nette des propriétaires et des locataires, soit la somme de tous les actifs financiers et non financiers (y compris les biens de consommation durables) qu’ils possèdent, déduction faite de tous leurs passifs (dettes). On constate que l’écart de richesse est resté relativement stable depuis 2010, ce qui suggère une persistance des inégalités entre ces deux groupes. Les propriétaires canadien·ne·s étaient en moyenne cinq fois plus riches que les locataires entre 2010 et 2023. Si une part significative de cette disparité découle évidemment de la valeur des biens immobiliers détenus par les propriétaires (treize fois plus élevé), d’autres facteurs sont en cause. Les propriétaires possèdent aussi en moyenne plus d’actifs que les locataires. Les actifs financiers des propriétaires sont 3,5 fois supérieurs à ceux des locataires, et les actifs non financiers autres qu’immobiliers environ 2,7 supérieurs. Avec l’augmentation des prix et la faiblesse de l’offre sur le marché immobilier, il sera encore plus difficile pour les locataires d’accéder à la propriété. Il est donc peu probable de voir cet écart de richesse se renverser.
En effet, alors que la maison est l’élément principal du patrimoine pour la majorité de la population, la diminution du pourcentage de propriétaires au Canada laisse penser qu’il est plus ardu aujourd’hui d'accéder à la propriété. Entre 2011 et 2021, le taux d’accession à la propriété est passé de 69,0% à 66,5% au Canada, et de 61,2% à 59,9% au Québec. Le Canada se tient aujourd’hui au deuxième rang des pays de l’OCDE en termes d’inabordabilité. Selon la Banque du Canada, il s’agit du pire niveau d’accessibilité à la propriété depuis 1990. Avec l’augmentation des prix des propriétés, l’accessibilité financière au logement a chuté (Graphique 1). Quant aux locataires canadien·ne·s, ils et elles devaient consacrer jusqu’à onze années de revenu pour couvrir le coût d’une propriété en 2022, comparativement à neuf ans en 2010.
Graphique 1. Évolution de l’accessibilité au logement, 2010-2022, Canada
Source: Statistique Canada 2023b, ACI 2023 et SCHL 2023
Le contexte économique actuel contribue à cette tendance. En effet, la hausse des taux d’intérêt appliquée par la Banque du Canada depuis le début de l'année 2022 a entraîné une hausse des taux hypothécaires (Graphique 1). Cette hausse du coût de l’endettement a conduit les banques canadiennes à resserrer les conditions d'octroi des prêts hypothécaires selon une enquête de la Banque du Canada. Ce faisant, il est devenu plus difficile d'accéder au marché immobilier résidentiel au Canada et de se constituer un patrimoine à travers la détention de ce type d’actif.
On constate par ailleurs que la pandémie n’a guère changé le portrait des inégalités entre propriétaires et locataires. Certes, les transferts gouvernementaux comme la prestation canadienne d’urgence ont réduit les inégalités de revenu au pays. Ces transferts ont permis d’atténuer les pertes de revenus pour les ménages à faibles revenus qui sont principalement des locataires. Statistique Canada précise toutefois que cette diminution des inégalités pourrait n’être que de courte durée en raison de la nature temporaire des transferts reçus par les particuliers durant la pandémie. De plus, cette période exceptionnelle s’est accompagnée d’une flambée des prix des actifs, en particulier immobiliers et financiers. Cette situation a donc contribué à la croissance de la richesse des propriétaires.
Alors que la crise du logement qui sévit à l’échelle canadienne met en péril le droit à un logement abordable, les tendances récentes sur le marché de l’immobilier résidentiel ont aussi de quoi inquiéter. Malgré la réduction temporaire des inégalités au pays durant la pandémie, l’augmentation des prix des loyers qui pourrait résulter du projet de loi 31, ainsi que l’augmentation des prix de l'immobilier alimentée par la hausse des taux d’intérêt, laissent de fait entrevoir une intensification de l’écart de richesse entre locataires et propriétaires dans les années à venir.
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La diminution du nombre de propriétaires au Canada montre deux tendances: il est plus ardu de devenir propriétaire et le profil du propriétaire devient de plus en plus corporatif.
Cela a ouvert le logement familial au très corrosif monde de la spéculation.
Il est temps que nous établissions ce que sont les biens premiers afin de les mettre à l’abri de toute forme de spéculation.