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Budget du Québec 2012: timidité et omissions

20 mars 2012


En ce 20 mars, le ministre des Finances du Québec, Raymond Bachand, a déposé son 3e budget. Cet exercice budgétaire s’inscrit dans la foulée des dernières années. Le gouvernement insiste encore cette année sur la transformation du financement des services publics dans la logique de la révolution tarifaire si chère à M. Bachand, sur le développement du Plan Nord et des réformes à apporter au régime de retraite.

Les limites des redevances

Le gouvernement nous annonce en grande pompe les résultats de sa réforme des redevances minières. Si, de 2006 à 2010, la moyenne annuelle des redevances recueillies par l’État ne se sont élevées qu’à 42 M$, l’année 2011-12 promet d’être généreuse avec des redevances projetées de 365 M$. Toutefois, le régime actuel, basé sur les profits des entreprises et non sur la valeur du minerai extrait, a comme conséquence de priver l’État québécois de 410 M$ sur  une base annuelle. Avec une production minérale d’une valeur de 7,7 G$, l’imposition d’un taux de redevance pourrait faire grimper les sommes recueillies par l’État à 775 M$.

De plus, le gouvernement crée une nouvelle section à Investissement Québec, Ressources Québec, qui sera dotée à terme d’un budget d’investissement de 1,2 G$. La nouveauté de cette entité sera de voir à la prise de participation, par l’État, dans les entreprises étrangères d’exploitation des ressources naturelles. Les profits générés par cette participation étatique dans la propriété des entreprises bénéficiant de l’aide publique ne seront toutefois pas destinés au financement des missions de l’État, mais bien au financement de nouveaux projets d’exploitation du Nord. Le ministre Bachand accepte donc de prendre des parts dans les entreprises privées afin de mieux les soutenir par la suite.

Retraites privées et financiarisation

Afin de fournir un revenu de retraite décent à tous et toutes, le ministre Bachand désire mettre en place un régime volontaire d’épargne-retraite (RVER). Inspirés des REER, les RVER consistent à imposer l’entièreté de l’effort financier aux travailleurs et travailleuses et les laissent seul-es devant les risques financiers liés aux fluctuations de la bourse. Avec les RVER, le gouvernement préfère confier la gestion des retraites des Québécois et Québécoises à des gestionnaires de fonds privé afin de satisfaire aux demandes de Bay street.

Avec ce régime, les employeurs seront complètement dédouanés de leur responsabilité vis-à-vis du financement de la retraite de ses employé-es. Malgré cela, les employeurs seront responsables de gérer les sommes en cause et d’assurer un suivi avec le gestionnaire de fonds sélectionné.

Le financement à l’activité en santé

Bien qu’aucune annonce de nouveaux tarifs ne soit incluse dans le budget de cette année, le gouvernement ouvre la porte à la transformation du financement dans le réseau de la santé. Les établissements jouissent actuellement d’un financement historique, soit une enveloppe stable et prévisible leur permettant de répondre aux besoins de la population. Dès cette année sera créé un groupe d’experts destiné à étudier le financement à l’activité des établissements.

Cette réforme, qui s’inspire de la réforme du début des années 2000 dans le monde universitaire, aura comme conséquence de lier le financement des établissements de santé à leur capacité de se montrer plus efficace et concurrentiel que leur voisin. Si le gouvernement suit cette voie,  ce n’est plus les besoins de la population qui déterminera le niveau de financement des établissements de santé, mais bien la rencontre d’objectifs d’efficacité organisationnelle déterminée d’en haut par le ministère. Nous avons déjà présenté une réflexion sur cette question sur ce blogue.

Les failles méthodologiques

Par ailleurs, deux fascicules visent à faire le bilan de l’action gouvernementale sur le revenu disponible des Québécois et sur la lutte à la pauvreté. Or, ces bilans comportent d’importantes omissions.

On nous dit que les inégalités sont en diminution au Québec, mais dans la plupart des calculs du ministère on omet de considérer le 10% le plus riche. Pourtant les revenus de cette part de la population ont crû de façon importante dans les dernières années. Par exemple, le revenu moyen des ménages de 250 000$ et plus est passé de 482 000$ à 517 000$ de 2005 à 2009. De la même manière, le gouvernement se lance dans une série d’étude de cas pour affirmer que les Québécois ont plus de revenus disponibles. Pourtant, dans son budget, le gouvernement ne mentionne pas une seule fois l’endettement des ménages qui est pourtant en augmentation constante. Si le revenu disponible est en telle croissance, comment expliquer l’endettement croissant des ménages?

Conclusion

Bref, il s’agit d’un budget sans annonce surprenante ou majeur. De l’aveu même du ministre, il comporte de maigres investissements d’un peu plus de 200 M$. Le gouvernement surf sur ses mesures régressives des dernières années, refuse de considérer des mesures plus adéquates que la tarification pour financer les services publics et s’entête à ne pas demander des redevances minières dignes de ce nom. Le résultat est donc prévisible, les Québécois et les Québécoises seront encore cette année sommés de se serrer la ceinture contrairement aux minières et aux institutions financières.

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