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Non, hausser les taxes à la consommation n’est pas une bonne idée

19 septembre 2014


Vous en avez surement entendu parler, le gouvernement de Philippe Couillard a mis sur pied cet été une commission en charge d’examiner la fiscalité québécoise pour «pour accroître l’efficacité, l’équité et la compétitivité du régime fiscal». La commission est en pleins travaux présentement et devra présenter un rapport d’étape quelque part en octobre. Bien que les résultats de la commission ne sont pas encore publics, voici ce que nous savons toutefois : elle est présidée par Luc Godbout, fiscaliste de l’Université de Sherbrooke qui, depuis plusieurs années, publie au sein de la chaire, dont il est le chercheur principal, de nombreux papiers ventant les mérites d’une hausse des taxes à la consommation au Québec. De plus, le ministre des Finances Carlos Leitao se disait très intéressé à envisager cette option il y a quelques semaines. On serait donc assez peu surpris si la commission favorisait cette option.

Est-ce que c’est une bonne idée? Mon collègue Francis Fortier et moi nous nous sommes penchés sur les arguments avancés par Luc Godbout pour défendre cette idée. D’abord, selon lui, les taxes à la consommation ne sont pas des taxes régressives – c’est-à-dire qui demandent plus d’efforts aux plus pauvres qu’aux plus riches – comme  on le croit habituellement. Ensuite, le Québec devrait rattraper son « retard » sur les pays scandinaves qui utilisent davantage ce mode de taxation que nous et qui sont des pays très égalitaires. Après avoir étudié ces arguments en profondeur, nous sommes en désaccord avec les deux affirmations.

Quand on prend les données les plus récentes disponibles et qu’on observe l’effet de l’ensemble des taxes à la consommation du gouvernement du Québec – non seulement la TVQ, mais aussi les taxes sur l’essence, le tabac et l’alcool – on constate, contrairement à ce que prétend Luc Godbout, que les taxes à la consommation sont régressives. En effet, en 2011, un ménage qui avait un revenu disponible (donc après impôts et transferts) de 14 000$ a consacré 8,7% de son revenu au paiement de ces taxes. À l’inverse, un ménage avec un revenu disponible de 110 000$ y a consacré 4,8%. On demande donc plus d’efforts aux plus pauvres qu’aux plus riches. On leur met cette pression alors que leurs revenus stagnants depuis des années n’arrivent pas à couvrir leurs dépenses courantes. Hausser ces taxes, c’est amplifier l’endettement des ménages.

Quand on compare le Québec avec les pays scandinaves, on doit être très prudent. S’il est vrai que les pays scandinaves ont des taux de taxe à la consommation plus élevés, il faut tout de suite ajouter qu’ils ont eu tendance dans les 30 dernières années à diminuer la part de cette taxation dans leur régime fiscal. Cette diminution a été compensée par une hausse de l’impôt des entreprises et des cotisations sociales. Étrangement, sur cette question, M. Godbout ne nous propose pas de les suivre.

Ce que Luc Godbout s’abstient aussi de mentionner sur la Scandinavie, c’est qu’on y trouve des structure économiques et fiscales très différentes des nôtres, ce qui a un effet sur les inégalités sociales. En fait, avant ou après impôt, ces sociétés sont systématiquement plus égalitaires que le Québec. Ainsi, une hausse des taxes à la consommation au Québec se ferait dans une société plus inégalitaire, ce qui amplifierait d’autant leur effet régressif.

Bref, à partir des données les plus récentes sur la question, il est clair que la hausse des taxes à la consommation est une mauvaise idée qui participera à augmenter deux problèmes déjà en croissance au Québec : les inégalités et l’endettement des ménages.

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