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L’évaluation monétaire de la nature

13 octobre 2016

  • CH
    Céline Hequet

Les préoccupations touchant les impacts environnementaux de l’activité économique ne sont pas nouvelles. Dès les 18e et 19e siècles, des économistes classiques tels qu’Adam Smith, Malthus et David Ricardo discutent déjà des limites de la croissance. On commence à réfléchir à l’usage des ressources agricoles et forestières au cours de la première moitié du 20e siècle, laissant place à l’économie de l’environnement et à l’économie des ressources naturelles comme disciplines à part entière.

Ces préoccupations se sont historiquement traduites par une régulation étatique du droit de polluer. Or, depuis la fin des années 1980, on assiste à un virage vers un environnementalisme de marché néolibéral. D’abord, les normes de pollution comme les quantités d’émissions permises par firme ont été remplacées par des approches de « gouvernance douce », comme le marché du carbone. Ensuite, certains services publics subventionnés par les impôts, comme les services d’aqueduc, ont fait place à une pleine tarification des consommateurs et consommatrices. Finalement, on observe une prolifération d’évaluations monétaires de la nature, principalement dans les pays anglo-saxons, mais également dans des pays aussi divers que l’Iran, la Finlande et ici même, au Québec. C’est le phénomène dont nous traiterons dans cette brochure.

Également appelé « monétisation » de la nature, il s’agit du processus par lequel on en vient à mettre une valeur en dollars (ou toute autre devise) sur un pan de nature, conceptualisé comme un «bien» ou un «service» environnemental. Jusqu’à son évaluation, on ne connaît pas cette valeur, car le « bien » ou le « service » en question n’a pas de prix, faute d’être échangé sur un marché. C’est pourquoi on le dit « non marchand ». Cela peut être une espèce animale qui n’est pas exploitée commercialement, comme le caribou forestier, la beauté d’un paysage, la capacité du sol à filtrer l’eau et bien d’autres choses encore. Une étude d’importance, publiée dans la prestigieuse revue Nature en 1997, estimait en moyenne à 33 000 G $ US la valeur économique totale produite annuellement par la biosphère.

La présente brochure veut examiner l’utilité et les limites de ces évaluations. Dans une première partie, nous expliquerons ce à quoi elles servent et comment elles fonctionnent. En deuxième lieu, nous démystiferons plusieurs croyances à leur sujet. Finalement, dans une troisième et dernière partie, nous montrerons dans quelles conditions nous pensons que ces évaluations peuvent servir et quelles solutions de rechange existent lorsque ces conditions ne sont pas réunies.

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