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Santé et sécurité au travail. Le déficit de participation dans les milieux non-syndiqués au Québec

29 février 2024

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60min


Alors que la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST), adoptée en 1979, devait donner à toutes les personnes salariées les moyens de faire entendre leurs préoccupations quant aux effets de leur travail sur leur santé, seule une minorité de secteurs économiques ont été couverts par des dispositions visant la création, sans obligation systématique, de comités de santé et de sécurité du travail. En 2021, une nouvelle loi devait remédier à cette situation. Or, si cette loi introduit une obligation de créer un comité de santé et de sécurité et aux salarié·e·s le droit de choisir les personnes qui les représenteront, dont l’une disposera de temps rémunéré pour agir en prévention, ni cette loi ni le règlement qui doit la compléter ne répondent aux difficultés rencontrées par les personnes non syndiquées. Cette note socioéconomique documente les difficultés de mise en application de la loi québécoise en matière de participation des salarié·e·s non syndiqué·e·s, soit la majorité des salarié·e·s du Québec.

Introduction

Malgré l’adoption par l’Assemblée nationale du Québec d’une nouvelle loi en 2021 venant modifier le régime québécois de santé et sécurité au travail, mis en place en 1979, mais jamais appliqué à la majorité des travailleuses et travailleurs, le cadre législatif québécois ne permet toujours pas de garantir les droits des salarié·e·s non syndiqué·e·s de participer à la prévention de la santé et de la sécurité au travail1. Face aux craintes initiales d’une poursuite de l’autorégulation dans les milieux de travail2 étant donné l’inefficacité d’un régime longtemps dépourvu d’obligations concrètes et de contrôle effectif, la nouvelle loi étend formellement les droits de participation à toutes les personnes salariées et en fait une obligation pour les employeurs. Cependant, le régime québécois de prévention comporte toujours d’importantes difficultés pour les travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s, dont les emplois souvent précaires les rendent particulièrement vulnérables3. Rappelons qu’en 2021, le taux de présence syndicale était de 40,1 % au Québec4. Bien que la majorité des travailleuses et travailleurs du Québec ne soit pas syndiquée, le régime, même réformé, ne prévoit pas l’accès à une ressource externe dont le rôle serait de les soutenir dans l’exercice de leur droit à la participation en prévention en santé et en sécurité du travail.

Dans les législations des pays du capitalisme avancé, les droits des travailleuses et travailleurs en participation se traduisent principalement par l’existence de comités5 et de représentant·e·s6 en santé et sécurité du travail7. La littérature scientifique, tant canadienne qu’internationale, démontre depuis longtemps l’importance de la participation des salarié·e·s à la prévention des lésions professionnelles. Une revue des connaissances démontre que les résultats en santé et sécurité du travail sont supérieurs en contexte de participation des salarié·e·s par rapport aux milieux de travail où l’employeur administre seul la prévention8.

Dans la pratique, comment les personnes désignées par leurs collègues pour les représenter auprès de l’employeur agissent-elles pour améliorer les conditions de travail qui affectent la santé et la sécurité ? Une fois la réforme complétée, le « représentant en santé et en sécurité » se verra attribuer différentes fonctions lui permettant d’identifier les risques, d’assister les travailleurs et travailleuses dans l’exercice de leurs droits et de faire des recommandations au comité paritaire de santé et de sécurité, dont il sera membre. Les études internationales9 offrent un portrait des pratiques de ces représentant·e·s :

↘ Interagir avec leurs collègues et les représentant·e·s de l’employeur ;

↘ Identifier et évaluer les risques (inspection, enquête et consultation);

↘ Signaler les dangers et informer la direction des problèmes ;

↘ Participer aux réunions du comité de santé et de sécurité ;

↘ Informer, former et soutenir les salarié·e·s dans l’exercice de leur droit de refuser d’effectuer un travail dangereux ;

↘ Faire appel à l’inspectorat ;

↘ Rechercher des mesures préventives, participer à leur implantation et s’assurer de leur efficacité réelle.

Une étude10 effectuée en Ontario auprès d’un vaste échantillon de représentant·e·s des salarié·e·s en santé et en sécurité du travail a mis en évidence que certain·e·s, dans un contexte moins favorable, ont des activités plus limitées et moins efficaces, centrées sur les réunions du comité, des inspections et la vérification de la conformité aux règlements. Les représentant·e·s les plus efficaces, obtenant le plus de changements, passent plus de temps à faire des recherches et sont plus présents sur le terrain pour recueillir les préoccupations des collègues, comprendre les dangers, et convaincre l’employeur qu’il est possible de les éliminer, sinon de les contrôler. Ces pratiques sont certainement plus difficiles à mettre en œuvre en milieu non syndiqué, lorsqu’on traite de situations où il n’y a consensus ni sur le problème ni sur la solution, et que les travailleuses et travailleurs peuvent craindre des représailles.

Diverses recherches associent la présence syndicale à des effets positifs en santé et sécurité au travail et l’absence de représentation syndicale à des effets défavorables11. Il est aussi démontré que l’effectivité réelle des droits de participation des travailleuses et travailleurs est influencée par la présence syndicale et par les efforts syndicaux en prévention12. Des études états-uniennes démontrent que la présence d’un syndicat renforce la probabilité que des inspectrices et inspecteurs en santé et en sécurité visitent les lieux de travail et exigent des mesures préventives13. Or, dans les milieux de travail non syndiqués, où les personnes sont plus souvent soumises à une diversité de vulnérabilités, des études observent un « déficit de mise en application » des lois du travail14. Une autre étude a établi que les salarié·e·s précaires ont six à sept fois plus de risque de craindre que le signalement des dangers pour la santé et la sécurité se traduise en impacts néfastes pour leur emploi15. Aux États-Unis, le recul de la syndicalisation découlant de lois restrictives (mal nommées « Right to Work laws ») a été associé à une augmentation de 14,2 % des accidents de travail mortels16.

On pourrait penser que l’obligation de mettre en place un comité de santé et de sécurité du travail, comme c’est le cas depuis 2021 au Québec dans tous les secteurs d’activité économique, compenserait cet écart avec les milieux de travail non syndiqués. Une autre étude provenant des États-Unis17 montre que l’introduction d’une telle obligation a simplement accru l’écart entre les milieux de travail syndiqués et non syndiqués. Cela suggère que la seule obligation de mettre en place un comité de santé et sécurité peut s’avérer insuffisante pour les salarié·e·s non syndiqué·e·s. Une revue systématique des études sur l’efficacité de ces comités18 conclut qu’ils sont nécessaires, mais pas forcément efficaces : un environnement de travail syndiqué augmente la probabilité d’une représentation efficace, d’un bon fonctionnement des comités et d’une attention réelle de la direction envers les recommandations des comités. L’effectivité des droits de participation des salarié·e·s non syndiqué·e·s nécessite un soutien extérieur au milieu de travail19.

Cette note socioéconomique vise non seulement à mettre en lumière les difficultés rencontrées par les salarié·e·s non syndiqué·e·s dans l’application des droits de participation en santé et sécurité du travail au Québec, mais également à proposer des solutions pour garantir l’application effective de ces droits. Nous effectuons d’abord un examen du contenu, de l’évolution et de l’application du cadre législatif québécois de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Nous montrons qu’en matière de participation, dans sa mouture actuelle, le régime québécois de prévention en santé et en sécurité du travail perpétue la vulnérabilité des personnes non syndiquées en ne prévoyant pas le soutien dont elles ont besoin pour exercer réellement leur droit à faire entendre leur voix. Le projet de règlement sur les mécanismes de prévention et de participation en établissement, publié le 3 janvier 202420, ne vient pas remédier à cette situation.

Afin d’illustrer les difficultés rencontrées par les salarié·e·s non syndiqué·e·s, nous présentons une analyse de rapports d’intervention de la CNESST obtenus par demande d’accès à l’information, et de témoignages de travailleuses œuvrant dans deux secteurs, les entrepôts du commerce et les garderies non syndiquées. Avant de conclure et de proposer des recommandations, nous présentons des solutions adoptées ailleurs au Canada et dans le monde.

Évolution du cadre législatif et obstacles pour les salarié·e·s non syndiqué·e·s

Depuis les débuts de l’industrialisation aux 18e et 19e siècles, les mouvements de travailleuses et travailleurs ont dénoncé les effets néfastes du travail sur la santé physique et mentale21. Au début du 20e siècle, la mise en place de l’État-providence a « normalisé » les accidents du travail22 sur la base d’un « compromis historique » : on obligea les employeurs à financer les régimes publics d’indemnisation des accidents du travail tout en interdisant aux salarié·e·s victimes d’accidents de poursuivre leur employeur pour faute en responsabilité civile23. Après la Deuxième Guerre mondiale, la « longue route » des travailleuses et travailleurs vers la protection de leur santé et de leur sécurité connut un tournant, alors que s’élevèrent des revendications en matière de participation des salarié·e·s à la prévention dans les milieux de travail24. Devant l’adoption de lois, dans la seconde moitié du 20e siècle, reconnaissant les droits des salarié·e·s à la participation à la prévention, les mouvements de travailleuses et travailleurs ont malgré tout dû poursuivre leurs efforts pour assurer l’application de ces droits devant la résistance des associations d’employeurs25.

En 1981, la convention no 155 de l’Organisation internationale du travail (OIT) a édicté les principes de consultation et de représentation des travailleuses et travailleurs en santé et sécurité du travail (SST). L’article 19 de cette convention prévoit le droit aux salarié·e·s et à leurs représentant·e·s d’« examiner tous les aspects de la sécurité et de la santé liés à leur travail et [d’être] consultés à leur sujet par l’employeur ; à cette fin, il pourra être fait appel, par accord mutuel, à des conseillers techniques pris en dehors de l’entreprise26 ». Le Canada ne figure pas parmi les pays signataires de cette convention pourtant ratifiée par 80 pays. Cette absence de ratification apparaît préoccupante en regard du déficit de mise en application, depuis quatre décennies, des droits de participation en SST des travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s du Québec.

L’adoption par l’Assemblée nationale, en septembre 2021, de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) est venue modifier le régime québécois de prévention de la SST, établi en 1979. L’application concrète du cadre législatif québécois en SST repose en partie sur l’adoption de règlements par le conseil d’administration (CA) paritaire de la CNESST. Regroupant des représentant·e·s de centrales syndicales et du patronat, le CA de la CNESST n’inclut pas de représentant·e·s des salarié·e·s non syndiqué·e·s. La LMRSST stipule que cette instance de gouvernance paritaire doit adopter un règlement sur les mécanismes de prévention et de participation au plus tard le 6 octobre 2024, sans quoi le ministre du Travail définiera et édictera ce règlement, en vertu de son obligation prévue dans la loi, au plus tard le 6 octobre 202527.

Si les changements adoptés en 2021 étendent les mécanismes de participation des travailleuses et travailleurs en matière de prévention en SST à tous les secteurs d’activité économique et en font une obligation, mettant ainsi fin à l’inaction des gouvernements successifs depuis les années 1980, la définition des modalités concrètes de ces droits proposées par le projet de règlement, publié le 3 janvier 2024, ne vient pas remédier aux difficultés de mise en application des droits des personnes non syndiquées.

Afin de comprendre les obstacles auxquels font face les salarié·e·s non syndiqué·e·s dans l’application de leurs droits en prévention de la SST au Québec, nous examinerons maintenant le cadre législatif régissant la participation des travailleuses et travailleurs à la prévention28.

Le cadre législatif de la LSST de 1979

Au Québec comme ailleurs, les régimes publics de SST reposent principalement sur deux missions centrales : la prévention des atteintes à la santé et à la sécurité découlant du travail, et la réparation de leurs conséquences, notamment par l’indemnisation des lésions professionnelles29. En 1979, alors que, sous l’impulsion des mouvements ouvrier et syndical, on reconnaissait de plus en plus la nécessité de réduire les risques au travail30, le Québec fit de la prévention la mission prioritaire de son régime public. Déplaçant la responsabilité de la prévention des mains du ministre du Travail et de la Main-d’œuvre vers la Commission de la santé et sécurité du travail (CSST)31 créée par la même occasion32, la LSST de 1979 visait « l’élimination à la source même des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physiques des travailleurs33 ». La LSST allait ainsi jeter les bases du régime québécois de SST en énonçant les droits et obligations des travailleuses et travailleurs et des employeurs en matière de prévention, y compris les droits des salarié·e·s à la participation et à la représentation en prévention.

Étant donné l’ampleur des changements apportés par la LSST de 1979, son application devait être progressive. Le calendrier de quelques années reposait sur la catégorisation des secteurs d’activité économique en six « groupes prioritaires », établis en fonction d’une évaluation du niveau de risques pour la SST. Le tableau 1 présente ces six groupes dans lesquels sont classés 33 secteurs d’activité économique34.

Les groupes prioritaires 1 à 3 comprennent par exemple la plupart des industries lourdes, le bâtiment, les services gouvernementaux et le transport, alors que les groupes 4 à 6 comprennent notamment des industries plus légères, le commerce, plusieurs services, l’agriculture, la santé et les services sociaux, et l’enseignement35. Les groupes prioritaires 1 à 3 affichent une forte majorité masculine, alors que les femmes représentent plus des trois quarts des salarié·e·s des groupes 4 à 636.

Parmi les dispositions qui devaient être appliquées successivement à chacun des groupes de secteurs d’activité, le programme de prévention et le programme de santé37 visent l’identification systématique des risques, alors que le comité de santé et de sécurité et la ou le représentant·e à la prévention prévoient la participation des salarié·e·s. Le comité de santé et de sécurité, composé paritairement de représentant·e·s de l’employeur et des salarié·e·s, participe notamment à l’identification et à l’analyse des risques pour la SST. Il était prévu que dans un milieu de travail non syndiqué des groupes prioritaires 1 et 2,

les représentants des travailleurs au sein du comité sont désignés par scrutin, lors d’une assemblée convoquée à cette fin par un travailleur de l’établissement. Avis [sic] du scrutin et de l’assemblée de mise en candidature doivent être affichés dans l’établissement au moins 5 jours avant leur tenue afin de permettre à tous les travailleurs d’y prendre part. Ceux qui, parmi les travailleurs candidats, obtiennent le plus de votes sont désignés comme représentants38.

Dans ce cadre, la loi prévoyait (art. 87 à 89, LSST) le droit pour les membres du comité représentant les travailleuses et les travailleurs de désigner un « représentant à la prévention », contribuant à l’effectivité de la loi grâce à l’accès à de la formation en prévention et à des heures de libération hebdomadaires dont le minimum était établi par règlement39.

Or, dès 1985, l’application du Règlement sur les comités de santé et de sécurité du travail (S-2.1, r.5) et du Règlement sur le représentant à la prévention dans un établissement (S-2.1, r.12), une fois promulgués pour les groupes prioritaires 1 et 2, fut aussitôt bloquée, en l’absence de consensus au sein du CA paritaire de la CSST. Selon certain·e·s, ce changement de direction s’explique par l’orientation de l’État, en tant qu’employeur catégorisé dans le groupe 3, vers des politiques néolibérales d’« allégement réglementaire », alors que l’obligation de nommer des représentant·e·s des travailleuses et travailleurs était considérée trop dispendieuse par des membres du patronat40. La perspective d’une telle obligation représentait une importante brèche dans le droit de gérance des employeurs.

Alors que le gouvernement dispose de la possibilité d’adopter de tels règlements si la CSST/CNESST ne le fait pas dans un délai raisonnable (art. 225, LSST), « la grande majorité des établissements, des travailleurs et surtout des travailleuses (groupes 4, 5, 6) n’ont été couverts par aucun des mécanismes clés de la LSST. La protection se limitait à l’obligation générale de l’employeur (art. 51 de la LSST) et aux droits généraux des [travailleuses et travailleurs] (droit de refus, droit de retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite, etc.)41. » De plus, même dans les groupes 1 et 2, la LSST n’a jamais prévu pour les employeurs une obligation systématique d’application des mécanismes de participation. L’obligation n’était prévue que si un syndicat ou, en son absence, un certain pourcentage ou nombre de travailleuses et de travailleurs en faisaient la demande42.

En somme, la LSST de 1979 faisait dépendre le pouvoir de réglementation sur les mécanismes de prévention de la gouvernance paritaire de la CSST, ce qui est toujours le cas aujourd’hui. Dans ce contexte, l’application des dispositions de la loi en matière de droits des salarié·e·s à la participation en prévention a été bloquée. Nous savons que les salarié·e·s non syndiqué·e·s risquent davantage de rencontrer des obstacles étant donné la relation étroite, mentionnée plus tôt, entre la présence syndicale et l’exercice des droits de participation représentative43. De plus, la loi de 1979 ne prévoyait aucun mécanisme de participation pour les salarié·e·s des petits établissements de 20 salarié·e·s et moins. Pourtant, la recherche établit clairement que les risques tant ergonomiques que physiques ou chimiques y sont plus présents, et les accidents, plus fréquents44.

La paralysie dans l’application de la LSST de 1979 a conduit à une « déréglementation de facto » en matière de participation à la prévention45, particulièrement46 dans un contexte de précarisation des statuts d’emploi et dans les milieux de travail non syndiqués et à majorité féminine47. Rappelons qu’au Québec, de 2012 à 2021, le taux de présence syndicale dans le secteur privé a diminué de 17,8 à 15,2 % chez les hommes et de 12,1 à 10,4 % chez les femmes48. En bout de piste, pendant plus de quatre décennies, le régime de 1979 a signifié, en pratique, une absence de droits à la participation pour la majorité des travailleurs et pour une plus forte majorité de travailleuses49.

Le régime intérimaire de la LMRSST de 2021

Avec la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST), entrée en vigueur le 6 octobre 2021, le gouvernement du Québec est venu modifier à plusieurs égards la LSST de 1979. En matière de participation à la prévention, la LMRSST a mis en place un régime intérimaire, en vigueur depuis le 6 avril 2022. Ce régime intérimaire sera effectif jusqu’à l’éventuelle adoption d’un règlement sur la prévention par le CA de la CNESST, au plus tard le 6 octobre 2024. En l’absence de consensus, le ministre du Travail devra édicter un tel règlement devant entrer en vigueur au plus tard le 6 octobre 2025. Le tableau 2 présente une synthèse des mécanismes de participation des travailleuses et travailleurs en prévention prévus par la LMRSST de 2021.

Le régime intérimaire vient apporter des modifications aux mécanismes de prévention en instaurant une obligation quant à l’identification et à l’analyse des risques, ainsi qu’aux mécanismes de participation, en distinguant selon les groupes prioritaires et entre établissements de 20 salarié·e·s ou plus et de moins de 20 salarié·e·s. Pour les groupes 1 et 2 déjà dotés d’un comité et d’un·e représentant·e, les règlements sur les comités de SST (S-2.1, r.5) et sur les représentants à la prévention (S-2.1, r.12), en vigueur depuis 1983, sont maintenus, et ce, « jusqu’à l’entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires sur les mécanismes de prévention50 » mettant fin au régime intérimaire.

Dans les établissements des groupes 1 et 2 qui ne disposaient pas d’un comité ou d’un représentant à la prévention, et dans tous les établissements des groupes 3 à 6 de 20 travailleurs et plus, les membres du comité de santé et de sécurité qui représenteront les travailleurs et travailleuses et un·e représentant·e en santé et en sécurité doivent être désignés par les travailleurs. Pour les salarié·e·s syndiqué·e·s, la prise de décision relève de la vie associative des organisation syndicales ; dans les établissements où les travailleurs et travailleuses ne sont pas représentés par une association accréditée, la procédure prévue est celle déjà évoquée, reprise par le projet de règlement, soit la tenue d’une assemblée et d’un scrutin

selon un mode de nomination qui est déterminé entre eux. La personne qui occupe la fonction d’agent de liaison en santé et en sécurité est protégée par la [LSST]. Ainsi, l’employeur ne peut donc pas la congédier, la suspendre ou la déplacer de son poste pour le motif qu’elle exerce ses fonctions51.

Bien que la LSST prévoie des recours pour tous les travailleurs et travailleuses en cas de sanction découlant de l’exercice de leurs droits, et une protection au représentant en santé et en sécurité, elle est silencieuse sur le soutien accordé à l’agent de liaison, un énorme obstacle pour la participation effective des salarié·e·s non syndiqué·e·s.

Malgré une extension de l’obligation d’appliquer les mécanismes de prévention52 et de participation pour les entreprises de toutes tailles et de tous les secteurs d’activité, le régime intérimaire implique une réduction des ressources dont disposent les travailleuses et travailleurs (par rapport au cadre législatif et réglementaire existant depuis 1979) et un maintien des obstacles pour celles et ceux qui ne sont pas syndiqué·e·s53. Premièrement, en vertu du régime intérimaire, un employeur administrant plus d’un établissement pourrait mettre en place un seul programme de prévention, ne créer qu’un seul comité et ne reconnaître qu’un seul représentant en SST, en considérant cependant la distance entre les différents établissements et la capacité du représentant à remplir ses fonctions54. Cette possibilité pose de potentiels problèmes aux comités et aux représentant·e·s quant à leurs rapports avec les travailleuses et travailleurs et à leur connaissance des différents établissements.

Deuxièmement, la LMRSST confère toujours des heures de libération aux représentant·e·s en SST, mais ce temps est réduit à environ 25 % de celui prévu au règlement adopté sous la loi de 1979 et s’appliquant aux groupes 1 et 255 56. On crée ainsi une iniquité entre secteurs traditionnellement masculins et secteurs à majorité féminine, les femmes se retrouvant majoritairement dans les groupes 3 à 6. Le projet de règlement augmente le nombre d’heures pour plusieurs secteurs, mais plusieurs demeurent avec des ressources réduites par rapport à ce qui était prévu à l’origine en 1979. Troisièmement, dans les milieux de travail de moins de 20 salarié·e·s, le nouvel agent de liaison a accès au « temps nécessaire » pour remplir ses fonctions et à de la formation, mais dans les établissements de 20 employé·e·s et plus, aucun temps de libération minimal n’est prévu contrairement à ce qui est prévu pour la ou le représentant·e. De plus, contrairement à ce qui prévaut pour les représentant·e·s, la CNESST ne possède pas le pouvoir réglementaire de fixer des exigences minimales en matière de formation de l’agent·e de liaison ou encore celui de fixer un minimum de temps de libération.

On peut douter des retombées réelles de cette nouvelle disposition en matière de prévention dans la mesure où un soutien effectif n’est pas offert aux agent·e·s de liaison. Non seulement les petits milieux de travail se caractérisent par une faible présence syndicale, mais, comme le montre un rapport de l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail, les mesures de prévention en SST y rencontrent plusieurs obstacles57. Les conclusions de cette étude québécoise rejoignent celles des études similaires menées ailleurs dans le monde58.

Enfin, bien que la nouvelle loi ait donné à la CNESST une nouvelle responsabilité de développer un programme d’aide à la mise en place des mécanismes de prévention et des mesures visant à soutenir les salarié·e·s non syndiqué·e·s (art. 167, LSST), l’incertitude persiste quant au contenu et à l’ampleur des éventuelles initiatives destinées aux salarié·e·s vulnérables. Face aux craintes initiales d’une poursuite de l’autorégulation dans les milieux de travail59 étant donné l’efficacité limitée d’un régime longtemps dépourvu d’obligations concrètes dans la majorité des secteurs d’activité, la LMRSST a certes rendu obligatoires les mécanismes de prévention, la participation des salarié·e·s et la formation des membres des comités et des agent·e·s de liaison, mais « des conditions nécessaires à leur mise en œuvre réelle et à leur efficacité, établies par la recherche sur le plan international font toujours défaut60 ».

De plus, la LMRSST ne propose aucune augmentation des amendes maximales imposées aux employeurs, alors que leur niveau est beaucoup plus faible au Québec que dans les autres provinces canadiennes61. Une étude parue en 2003 a d’ailleurs classé la législation québécoise comme la moins contraignante en matière de prévention parmi 63 territoires administratifs du Canada et des États-Unis, en considérant notamment les sanctions prévues pour les employeurs fautifs62. L’extension des obligations en matière de prévention, prévue par la nouvelle loi, et la complexité de l’application des mécanismes de participation exigeraient une importante augmentation du nombre d’inspectrices et d’inspecteurs et du temps passé à inspecter les milieux de travail63. D’ailleurs, la pratique de la CNESST qui consiste à annoncer à l’avance certaines de ses visites d’inspection dans les établissements peut nuire à la capacité des inspectrices et inspecteurs d’observer les conditions réelles dans lesquelles s’effectue le travail. Les salarié·e·s en situation de précarité sont ainsi mal placé·e·s pour signaler la situation à l’inspectrice ou à l’inspecteur.

En somme, malgré les modifications apportées par la LMRSST et la publication, le 3 janvier 2024, du projet de règlement sur les mécanismes de prévention et de participation en établissement, le cadre juridique québécois ne prévoit toujours pas les conditions pour que les salarié·e·s non syndiqué·e·s puissent véritablement exercer leurs droits à la participation en matière de prévention.

Témoignages de travailleuses non syndiquées et rapports d’inspection de la CNESST

Afin d’illustrer concrètement les difficultés d’exercice des droits des salarié·e·s non syndiqué·e·s à la participation en prévention dans un secteur traditionnellement masculin et dans un autre à majorité féminine, nous avons choisi de nous pencher sur des entrepôts du secteur du commerce et sur les services de garde (pour la méthodologie, voir l'encadré).

Méthodologie : témoignages et rapports d’inspection

Dans le cas des entrepôts du secteur du commerce, nous présentons ici certains résultats d’une étude menée dans le cadre du projet Mobiliser pour la santé et la sécurité du travail dans les entrepôts (projet « Mobiliser64») portant sur la situation dans les entrepôts de Dollarama et d’Amazon. Les résultats présentés ici n’ont pas été publiés dans le rapport du projet « Mobiliser» en 2023. L’équipe de recherche du projet Mobiliser a obtenu, par une demande d’accès à l’information, les plaintes et les rapports d’intervention en prévention-inspection concernant six entrepôts de Dollarama et des six établissements de l’entreprise Amazon assimilables à des entrepôts dans la grande région de Montréal, pour la période entre l’entrée en vigueur du régime intérimaire le 6 avril 2022 et le 31 décembre 202365.
Dans le cas des services de garde, nous avons obtenu, en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, les rapports d’intervention en prévention-inspection effectués auprès de garderies privées (subventionnées et non subventionnées) et les rapports produits à la suite de la réception d’une plainte à la CNESST provenant de ces établissements, pour la période allant de l’entrée en vigueur du régime intérimaire, le 6 avril 2022, au 6 octobre 202366. Le personnel responsable de l’accès à l’information de la Direction des affaires juridiques de la CNESST a procédé à l’extraction de ces rapports en utilisant les mots clés « LMRSST » ou « Loi modernisant », en combinaison avec les termes « garderie subventionnée », « garderie privée subventionnée », « garderie non subventionnée » ou « garderie privée non subventionnée ».

Nous avons obtenu 16 plaintes provenant de garderies non syndiquées de moins de 20 travailleuses et 4 provenant de garderies non syndiquées de 20 travailleuses et plus. Nous avons également obtenu 20 rapports d’intervention-inspection concernant des garderies privées non syndiquées de moins de 20 travailleuses et 3 rapports effectués auprès de garderies privées non syndiquées de 20 travailleuses ou plus. Pour compléter les informations disponibles dans ces documents, nous avons dans certains cas consulté la Liste des centres de la petite enfance (CPE) et des garderies en fonction (répertoire des installations) du ministère de la Famille du Québec (2023-12-0167). Lorsque l’information concernant l’accréditation syndicale d’un établissement n’apparaissait pas sur les documents de la CNESST, nous avons eu recours à la Liste des conventions collectives en vigueur au Québec du ministère du Travail (2023-11-1768) . Nous avons ensuite exclu les documents obtenus concernant les services de garde syndiqués. Les informations pertinentes présentes dans ces documents ont été extraites sous forme de tableau au moyen d’un logiciel tableur.

Enfin, nous avons aussi effectué trois entrevues semi-dirigées avec trois personnes salariées non syndiquées, dont deux du secteur des entrepôts du commerce et une d’un service de garde. Nous avons préalablement obtenu le consentement des personnes interviewées au moyen d’un formulaire standardisé, précisant les mesures garantissant leur anonymat et la protection des informations recueillies.

Le secteur des entrepôts du commerce : Dollarama

Les données analysées par l’équipe du projet « Mobiliser » (voir l’encadré méthodologique page suivante) indiquent que, sur les six établissements de Dollarama visés, un seul a été visité durant la période étudiée, alors que ce secteur d’activité se caractérise par un niveau de risque élevé69. Selon cet unique rapport d’inspection, l’entrepôt visité compte environ 1 050 salarié·e·s employé·e·s par environ 9 agences de placement. La visite fait suite à une plainte concernant notamment les méthodes de manutention et les risques liés à la circulation des chariots élévateurs70.

Ce rapport d’inspection indique qu’« un comité santé sécurité (CSS) est en place et se réuni [sic] hebdomadairement. Il est composé de représentant [sic] de chacune des agences et de membres du personnel de l’établissement ». La formulation ne permet pas de savoir si des travailleuses ou des travailleurs des agences sont effectivement représenté·e·s au comité. Elle permet du moins de supposer que les représentant·e·s des agences siègent au comité a titre d’employeurs. Le rapport n’examine pas la composition du comité en regard de la loi, ne donne aucune indication sur la présence d’un·e représentant·e en santé et sécurité, bien que ce soit une obligation, et n’annonce pas de visite de suivi. Le rapport ne donne aucune indication sur la manière dont les employé·e·s des agences peuvent faire entendre leur voix dans leur lieu de travail. En fait, ni la loi, ni le site de la CNESST, ni son guide pratique intitulé « Membre représentant les travailleurs au sein du comité de santé et de sécurité »71, ni le projet de règlement ne donnent d’indication sur la représentation des travailleuses et travailleurs d’agence, mis à part que la LMRSST s’applique à l’agence elle-même. La loi prévoit pourtant, afin de déterminer le nombre d’employé·e·s dans un établissement et si un comité et un·e représentant·e de santé et de sécurité doivent y être désignés, qu’il faille considérer « ceux dont les services sont loués ou prêtés à l’employeur » (art. 150, LMRSST).

Dans ce contexte, les salarié·e·s qui voudraient agir pour représenter leurs collègues auraient particulièrement besoin du soutien de personnes de confiance. Le rapport de recherche du projet « Mobiliser72 » montre que les interventions de la CNESST à la suite des plaintes anonymes donnent peu, sinon pas de résultats concrets : sur sept plaintes suivies d’une visite, deux seulement entraîné une correction.

Le secteur des entrepôts du commerce : Amazon

Les données analysées par l’équipe du projet « Mobiliser » montrent que cinq des six établissements d’Amazon dans la grande région de Montréal ont été visités par la CNESST entre le 6 avril 2022 et le 31 décembre 2023. Ces établissements comptent de 120 à plus de 500 salarié·e·s. Au total, 16 rapports d’inspection ont été obtenus pour la période. Précédemment, lors d’un appel anonyme à l’inspecteur de garde à la CNESST, un travailleur d’un des établissements d’Amazon a signalé des risques importants de troubles musculosquelettiques, une charge de travail insoutenable et un nombre élevé de blessures73. Cette plainte n’a donné lieu à aucun avis de correction.

Selon les rapports, dans tous les établissements d’Amazon concernés, un comité était déjà présent. Les rapports ne donnent cependant aucune indication sur la manière dont les membres des comités ont été désignés, sauf dans un cas, où l’employeur aurait sollicité les travailleuses et travailleurs de l’établissement à plusieurs reprises et aurait accepté tous les volontaires, ce que les témoignages reçus à la suite de la publication du rapport «Mobiliser» contredisent. Dans aucun des dossiers, la présence d’un·e « représentant·e en santé et sécurité » au sens de la LMRSST n’est mentionnée au moment des premières visites. Dans l’un des établissements, le représentant de l’employeur (Amazon) et les membres du comité indiquent n’avoir pas été au courant, avant la visite de l’inspecteur, que les membres du comité représentant les employé·e·s devaient être élu·e·s, ni de la procédure à respecter pour les élections. Dans les cinq établissements, les rapports, qui sont destinés à l’employeur et doivent être remis aux membres du comité, comportent des informations au sujet des nouvelles obligations, mais le niveau de précision varie considérablement. Pour trois établissements sur cinq, à l’exception d’un lien vers le site de la CNESST dans deux cas, le texte des rapports ne comporte pas d’indication sur la nécessité d’une assemblée de mise en candidature, convoquée par une travailleuse ou un travailleur de l’établissement, dont l’avis doit être donné au moins cinq jours à l’avance « afin de permettre à tous les travailleurs visés d’y prendre part », ni sur l’obligation de tenir un vote pour choisir les membres du comité représentant les travailleuses et travailleurs et la ou le représentant·e en santé et sécurité74.

À la fin de la période étudiée, aucun avis de correction n’a été émis en vertu de la LMRSST concernant les comités existants ou l’absence de représentant·e. Il en va de même pour l’un des cinq sous-traitants d’Amazon dont les employé·e·s assurent la livraison des colis à partir de l’un des établissements visités : si le sous-traitant reçoit des avis de correction relativement aux obligations générales en prévention, il n’en reçoit pas pour l’absence de comité ou siègeraient des membres élu·e·s par ses 150 employé·e·s non syndiqué·e·s, en majorité des livreurs.

Les données analysées par l’équipe du projet « Mobiliser » indiquent que même une grande entreprise comme Amazon ne veille pas à ce que ses gestionnaires de site soient au courant et appliquent la procédure à respecter pour l’élection des représentantes des salarié·e·s au comité. On ne peut douter que les travailleuses et travailleurs aient aussi besoin d’en être informés. Au total, dans deux des entrepôts d’Amazon sur les cinq visités, après que l’information ait été transmise, aucun suivi n’a été annoncé quant aux exigences de la LMRSST en matière de participation représentative, et ce, malgré la non-conformité, du moins quant à l’absence de représentant·e. Dans un troisième cas, le sujet est traité dans deux rapports successifs; les informations inscrites au rapport concernent le représentant en santé et sécurité, dont il est dit qu’il doit être « nommé par les travailleurs » ; le rapport « invite donc les parties à en discuter lors de la prochaine rencontre du comité de santé et de sécurité » et indique que « [d]ans les circonstances, considérant l’implication des travailleurs, la collaboration des parties et la présence d’un comité de santé et de sécurité, aucun avis de correction ne sera émis ». Le rapport suivant ne fait toujours pas explicitement référence à la nécessité d’une assemblée et d’un vote ; l’inspecteur note que le point est à l’ordre du jour de la prochaine réunion du comité et annonce un suivi.

Dans un quatrième entrepôt, une plainte a été adressée à la CNESST concernant la composition du comité de santé et de sécurité prévue par le régime intérimaire. L’inspecteur transcrit ainsi la plainte : « En lien avec LSST, art 290 ? Obligation formation CSS paritaire. Le représentant des travailleurs aurait été nommé par l’employeur et non élu par ses pairs. » Dans les rapports d’intervention qui suivent, l’inspecteur écrit comprendre que le comité existant est paritaire, rappelant toutefois à l’employeur que l’ajout, le remplacement ou le renouvellement des membres du comité devraient se faire par une assemblée et un scrutin, citant alors le Règlement sur les comités de santé et de sécurité. Il explique les exigences quant à l’élection d’un représentant en santé et sécurité, également par assemblée et scrutin, quant à laquelle il annonce un suivi. Lors de la visite suivante, on l’informe que le comité a décidé d’un vote à l’aide d’une application et de codes QR, à la suite d’un appel de candidatures pour deux postes de représentants (jour et soir) par des annonces en début de quarts et lors d’une « réunion générale trimestrielles [sic] des employés ». Malgré l’absence d’assemblée, l’inspecteur indique que « [s]elon les informations recueillies, le processus […] semble adéquat et respecte les exigences législatives en ce sens prévues à la LMRSST ».

Le cinquième entrepôt est celui où le suivi est le plus soutenu, les mécanismes de participation représentative des travailleurs et travailleuses étant traités dans trois rapports successifs. Les informations transmises sont détaillées ; bien qu’elles aient été explicites quant à la nécessité d’une assemblée et d’un scrutin pour la désignation du représentant en santé et en sécurité, les rapports suivants ne mentionnent pas qu’une assemblée a eu lieu, mais font état de son élection, par un vote avec code QR. C’est cependant le seul établissement où un rapport indique que « le processus de s’assurer que les travailleurs de l’établissement sont d’accord d’être représentés par les travailleurs présents au comité n’a pas été fait comme le demande le régime intérimaire ». L’inspecteur inscrit qu’« [i]l est entendu lors de la rencontre de faire un processus à l’interne qui confirmera la représentation des travailleurs sur le CSS », et que « la prochaine élection de tous les membres se tiendra en janvier 2024 ». Trois autres rapports concernent le décès d’un camionneur, employé d’un sous-traitant d’Amazon, dans la cour de l’établissement.

Pour interpréter la portée et les limites des interventions de la CNESST et comprendre les difficultés que peuvent rencontrer les personnes salariées, il est utile d’évoquer l’expérience de deux personnes salariées d’Amazon, dont nous avons recueilli les témoignages. La première décrit une situation où le processus prescrit par la LMRSST n’a pas été suivi :

Je ne connaissais pas le règlement […] concernant l’élection de représentants en santé-sécurité. Il y a des affichages aux toilettes qui changent chaque mois, mais cela n’a jamais été annoncé. J’ai découvert qu’il existait un comité en allant un jour à AmCare75. Il y avait une petite affiche disant qu’il y a un comité et qu’on pourrait appliquer pour en devenir membre en envoyant un courriel. […] Ce n’était pas une annonce de la tenue d’une élection. On pouvait simplement postuler pour en faire partie, puis attendre pour voir si on était accepté […] par la direction. On m’a dit que le comité se réunit [jour de la semaine et heure] une fois par mois. Cette heure n’était pas dans mon quart, et je ne serais donc pas payé pour ce temps. […] Les membres du comité ne sont pas des représentants des travailleurs. Ce ne sont pas des gens vers qui les travailleurs peuvent se tourner. Ils n’ont pas de formation en SST. […] Ça ferait énormément de différence si les travailleurs avaient des représentants de confiance, des gens formés, protégés et soutenus. (Traduction libre de l’anglais.)
– Personne salariée d’entrepôt 1

Une seconde personne salariée d’Amazon explique son expérience avant et après l’élection d’au moins une partie des membres au comité :

Amazon avait installé des affiches invitant les travailleurs à se joindre au comité de SST. J’ai demandé à AmCare : puis-je m’y joindre ? Ils ont pris mon nom, mais n’ont jamais communiqué avec moi. Quelques mois plus tard, j’ai essayé de nouveau. Ils m’ont posé plusieurs questions. C’est à cette période qu’ils ont commencé à parler d’une élection des représentants en SST. Mais, sans [prise de contact avec un organisme de défense des salarié·e·s non syndiqué·e·s], je n’aurais pas été informé·e des règles exigeant une assemblée des travailleurs. L’employeur n’en a jamais parlé. Eh bien, je me rappelle du moment où les élections ont commencé : après que des travailleurs en ont réclamé [dans un autre entrepôt Amazon]. [...] C’était trop rapproché dans le temps pour être une coïncidence. [...] Les « élections » ont eu lieu comme suit : trois personnes sont apparues à l’écran dans la cafétéria où nous avons des rencontres avant les quarts de travail. Il y avait un peu d’information sur les candidats. Et nous avons été invités à voter pour un des candidats à l'aide d'un code QR. Il n’y a pas eu d’assemblée des travailleurs […] (Traduction libre de l’anglais.)
– Personne salariée d’entrepôt 2

Cette personne salariée ajoute que si le comité de santé et sécurité se réunit lors d’un quart de travail durant lequel un membre ne travaille pas, il doit s’y rendre sur son temps personnel et n’est pas rémunéré.

Les témoignages de personnes salariées d’Amazon suggèrent de nombreux écarts par rapport au processus prescrit par la loi, et documentent une série de difficultés rencontrées au quotidien par les personnes souhaitant utiliser ces nouveaux droits. Dans le cas de la seconde personne interviewée, c’est le contact avec un organisme communautaire de défense des droits qui lui a permis de connaître les obligations légales de son employeur.

Outre les lacunes du processus, on comprend que les représentant·e·s en santé et sécurité, une fois élu·e·s, ne disposent pas d’emblée de l’information nécessaire pour jouer leur rôle.

Une personne ayant été élue a commencé à porter une veste différente. Elle se promenait et observait. Mais je ne l’ai jamais vue faire grand-chose ni parler aux travailleurs. Je lui ai donc demandé quelle était sa fonction et ce qu’elle faisait. La personne m’a répondu : « Rien, vraiment ; je ne suis qu’un·e employé·e » [...] Je lui ai demandé si elle avait les pouvoirs de parler aux travailleurs et de rapporter leurs plaintes. Elle m’a dit qu’elle n’avait pas de tels pouvoirs. Je lui ai demandé de m’expliquer la procédure qu’un employé victime d’accident doit suivre. Les explications que j’ai reçues étaient très confuses et n’incluaient pas les étapes exigées. Certains de ses propos étaient même erronés. (Traduction libre de l’anglais.)
– Personne salariée d’entrepôt 2

Ces représentant·e·s ont besoin non seulement de connaissances sur la législation et la réglementation, mais aussi sur l’identification des risques, les mesures préventives et leurs conditions d’efficacité. Il y a également un besoin de formation et de soutien sur l’exercice de leur rôle, tant auprès des salarié·e·s que de l’employeur.

Le secteur des services de garde

Nous avons ensuite choisi de porter une attention particulière aux garderies privées, subventionnées et non subventionnées, car le taux de présence syndicale y est presque nul et la main-d’œuvre est à forte majorité féminine. Au Québec, il existe environ 3700 installations de services de garde, dont on distingue 3 principaux types76 : les centres de la petite enfance (CPE), les garderies privées subventionnées et les garderies privées non subventionnées77. Les statistiques les plus récentes du ministère de la Famille du Québec remontent à 2014 et signalent une présence syndicale de 49,1 % dans les CPE, de 1,5 % dans les garderies privées subventionnées et de 0,5 % dans les garderies privées non subventionnées78.

Parmi les 20 rapports produits à la suite de la réception d’une plainte que nous avons obtenus provenant de services de garde non syndiqués, seulement deux concernaient, entre autres choses, la participation représentative à la prévention. Sur les 20 rapports d’intervention-inspection que nous avons également obtenus et qui visaient des garderies privées non syndiquées de moins de 20 travailleuses, un seul mentionne la présence d’une représentante en santé et sécurité79, alors que seulement deux indiquent l’existence d’une agente de liaison, comme l’exige la LMRSST. Au contraire, dans au moins 9 cas sur 20, il y a absence d’agente de liaison, alors que 9 autres rapports ne donnent aucune indication sur l’existence ou non d’une personne occupant cette fonction. Dans 12 rapports sur 20, l’inspectrice ou l’inspecteur mentionne la nécessité de désigner une agente de liaison. Alors que 10 rapports comportent au moins un ou des avis de correction concernant l’identification de risques, la tenue des lieux ou la gestion de substances dangereuses, aucun rapport d’inspection n’émet d’avis de correction pour manquement aux dispositions législatives sur la participation des salariées. Dans aucun des rapports, l’inspectrice ou l’inspecteur ne mentionne prévoir un suivi de conformité quant à ces dispositions.

Nous avons aussi obtenu trois rapports d’intervention en prévention-inspection dans des garderies privées non syndiquées de 20 travailleuses et plus. De ce nombre, aucun ne rapporte l’existence d’un comité de santé et de sécurité, deux indiquent l’absence de représentante, et le dernier ne fournit pas d’information quant à la présence ou non d’une représentante. Dans ces trois rapports, les inspectrices et inspecteurs ont émis un avis de correction, mais aucun ne concerne les comités et les représentant·e·s et aucun suivi n’est annoncé.

Le témoignage de la travailleuse de CPE non syndiqué que nous avons recueilli signale la présence d’un comité de santé et de sécurité, mais témoigne d’un non-respect de l’exigence d’un processus d’élection des membres du comité par les travailleuses et même d’un laxisme dans les activités du comité et dans les mesures de prévention, malgré la participation de l’employeur à une mutuelle de prévention.

Il y avait un comité paritaire, […] mais les employées n’étaient pas élues – ce sont des gens qui se portaient volontaires. Ce comité a été créé avant la nouvelle loi. Quand la loi a été adoptée, j’ai dit à la directrice qu’il fallait élire et former les membres du comité. Elle ne semblait pas me croire […] Dans ce comité, on parlait de créer des capsules pour la prévention, mais on ne les a pas vraiment faites. Aux assemblées générales, on ne parlait pas de prévention. Normalement, un comité devrait inspecter le lieu de travail au moins annuellement. Mais quand j’ai regardé le registre, j’ai trouvé que les inspections se faisaient tous les deux ou trois ans. […] On n’était vraiment pas formées en prévention. […] J’aurais beau dire à la direction que mon groupe est difficile et que j’ai besoin d’aide, je ne serais pas entendue. Mais s’il y avait des personnes élues, des personnes qui ont la confiance des travailleuses, cela aurait un impact. J’avais quand même une certaine peur […] [La mutuelle de prévention a] contesté mon dossier [de demande d’indemnisation à la CNESST pour lésion professionnelle] pour que les cotisations coûtent moins cher à l’employeur. Mais je [n’ai jamais vu la mutuelle] pour offrir de la formation en prévention aux éducatrices […] Un comité élu et formé en prévention ferait une différence. Les travailleuses auraient moins peur de parler et de revendiquer. S’il y avait des personnes de confiance, formées, elles pourraient donner de l’information et insister sur des mesures de prévention.
– Travailleuse de garderie non syndiquée

En plus de lacunes dans le processus de formation du comité et dans les mesures de prévention, notamment quant au rôle d’une mutuelle de prévention en matière de prévention en SST, ce témoignage illustre la peur que peuvent ressentir les personnes non syndiquées accidentées ou malades lorsque vient le temps de communiquer à l’employeur la présence de risques et de situations dangereuses au travail. Dans un contexte où la mise sur pied d’un comité de SST ne découle pas d’une initiative des travailleuses, cette peur se frappe en plus à un manque de confiance de la travailleuse à l’égard de l’instance, extérieure mais non indépendante de l’employeur, dont elle pourrait espérer une action préventive.

Les rapports d’inspection de services de garde non syndiqués que nous avons obtenus ne comprennent pas d’indications sur le mode de désignation des membres des comités de santé et sécurité. Dans aucun cas l’inspectrice ou l’inspecteur ne vérifie la conformité du processus d’élection des représentantes, lors d’une assemblée des travailleuses, ou de nomination des agentes de liaison. Cependant, à l’instar du cas du secteur des entrepôts, les rapports réfèrent à des pages du site Web de la CNESST présentant des indications sur le vote et renvoyant, par l’intermédiaire d’un autre hyperlien, à des indications plus détaillées prévues au Règlement sur les comités de santé et de sécurité.

L’analyse des documents de la CNESST concernant le secteur des services de garde corrobore certaines conclusions du rapport de recherche du projet Mobiliser80. Comme dans le cas d’Amazon, les exigences de la LMRSST y sont en général mentionnées, mais sans qu’y soient explicitement nommées la nécessité d’un vote et les conditions minimales pour assurer un processus indépendant de l’employeur. À la suite de plaintes anonymes, les inspectrices et inspecteurs soulevant des lacunes quant à la participation des salarié·e·s informent les personnes rencontrées, mais plusieurs ferment les dossiers sans aviser d’un suivi visant à assurer la conformité aux exigences légales. Le faible nombre d’avis de correction au sujet des comités, des représentant·e·s ou des agent·e·s de liaison témoigne d’un transfert de la responsabilité de l’application des droits des salarié·e·s dans les mains des employeurs.

De plus, les témoignages de travailleuses présentés ci-dessus illustrent qu’en l’absence d’un processus adéquat et conforme à la loi d’élection des représentantes ou de désignation d’agentes de liaison dignes de confiance, les salarié·e·s non syndiqué·e·s risquent de se retrouver sans ressources et dans la crainte d’éventuelles représailles dans leurs milieux de travail. Comme l’indiquait, en 2019, le Rapport du Comité d’experts sur les normes du travail fédérales modernes81, « [d]es études révèlent que de nombreux travailleurs n’ont pas tendance à s’exprimer sur les problèmes vécus en milieu de travail s’ils n’ont pas accès à des mécanismes de voix collective, parce qu’ils craignent les représailles. Cette situation est tout particulièrement vraie chez les travailleurs non syndiqués, ceux qui occupent une forme d’emploi atypique, de même que chez les femmes ». On peut ainsi comprendre que les employé·e·s non syndiqué·e·s, souvent des femmes et des personnes migrantes occupant des emplois précaires82, risquent d’hésiter à se prévaloir de leur droit à la participation, a fortiori celui de refuser d’exécuter un travail dangereux.

Des solutions existent ailleurs pour soutenir les salarié·e·s non syndiqué·e·s

Les lacunes du régime québécois de prévention en SST et son application en l’absence de soutien extérieur au milieu de travail génèrent des obstacles pour les salarié·e·s non syndiqué·e·s dans l’exercice de leurs droits à la participation. La CNESST accorde pourtant des subventions aux associations sectorielles paritaires (ASP), lesquelles fournissent de l’information et du soutien en SST aux travailleuses et travailleurs et aux employeurs83. Les ASP ne peuvent toutefois pas soutenir les salarié·e·s non syndiqué·e·s dans l’exercice de leurs droits à la participation en prévention en l’absence de collaboration de la part de l’employeur. En effet, il est difficile de concevoir qu’une ASP interviendrait sans une demande paritaire, par un·e représentant·e de l’employeur et un·e représentant·e des travailleuses et travailleurs. En l’absence de collaboration de l’employeur, l’existence d’une ASP ne répond donc pas aux besoins des salarié·e·s non syndiqué·e·s. De plus, les ASP n’existent que dans certains secteurs d’activité84. En comparaison, les employeurs et les salarié·e·s syndiqué·e·s peuvent avoir accès directement à du soutien, sans demande paritaire. En effet, la CNESST offre du financement « aux associations syndicales et aux associations d’employeurs à vocation sectorielle et multisectorielle qui veulent offrir à leurs membres des activités de formation et d’information sur la santé et la sécurité du travail85 ».

Il est nécessaire de tirer des leçons des meilleures pratiques en vigueur dans d’autres territoires dans le but d’améliorer le régime québécois et de garantir l’effectivité des droits des salarié·e·s non syndiqué·e·s. Tournons-nous donc vers des solutions implantées en Suède et au Royaume-Uni, soit les représentant·e·s itinérant·e·s en SST, et en Ontario et en Colombie-Britannique, soit les bureaux de conseillers86. Ces solutions sont complémentaires et doivent s’accompagner d’un renforcement des mesures législatives et réglementaires assurant la participation des salarié·e·s non syndiqué·e·s en prévention de la SST.

Soutien aux salarié·e·s en matière de santé et de sécurité du travail

En 1976, l’État suédois a légiféré sur la SST, sur la base d’une entente nationale de « codétermination » dans les milieux de travail survenue entre les associations syndicales et patronales, pour donner aux représentant·e·s des salarié·e·s sur les comités de santé et sécurité une majorité de voix ainsi que des pouvoirs décisionnels ne se limitant pas à la simple recommandation87. Depuis les années 1970, il existe ainsi en Suède un réseau de représentant·e·s régionaux itinérant·e·s en SST couvrant presque l’ensemble des petites entreprises, y compris les milieux de travail non syndiqués et dépourvus de comités de SST. Nommés par les organisations syndicales, ces représentant·e·s ont pour fonctions d’assurer la formation de représentant·e·s locaux, d’encourager la participation des salarié·e·s, d’inspecter l’application des mécanismes de SST et de prescrire des améliorations en matière de prévention88. Un rapport de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail indique qu’il existait en Suède en 2015 un·e représentant·e pour 45 salarié·e·s et plus de 1500 représentant·e·s régionaux itinérant·e·s formant un réseau couvrant plus d’un million de travailleuses et travailleurs de petites entreprises89.

Également implanté en Italie et en Norvège90, le modèle des représentant·e·s régionaux en SST a aussi fait ses preuves au Royaume-Uni. Une étude a analysé un projet de représentant·e·s itinérant·e·s désigné·e·s par des organisations syndicales et de conseillères et conseillers indépendant·e·s ambulant·e·s en SST dans deux groupes d’établissements, un groupe contrôle et un groupe d’intervention, du secteur de l’agriculture. Le groupe de fermes dans lequel ont été mis en place des représentant·e·s et des conseillères et conseillers itinérant·e·s a démontré de réelles améliorations en matière de gestion de la SST91.

Soutien aux salarié·e·s et à leurs représentant·e·s en cas de sanction

Pour que les mécanismes de participation des salarié·e·s fonctionnent, les représentant·e·s doivent être adéquatement protégé·e·s dans le cadre de leurs fonctions et doivent avoir accès à du soutien. Tous les provinces et territoires du Canada à l’exception du Québec ont mis en place des bureaux de conseillères et conseillers des salarié·e·s ou des employeurs et, dans certains cas, des bureaux de défense des travailleuses et travailleurs92. Ces organismes sont en général financés par les employeurs, à travers leurs cotisations aux régimes provinciaux d’indemnisation des lésions professionnelles, mais sont indépendants des organismes publics responsables de la SST. Offrant des services gratuits d’aide aux personnes non syndiquées victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles en matière de gestion des dossiers de réclamation et d’indemnisation, certains bureaux provinciaux offrent du soutien plus large en matière de SST.

Par exemple, en Ontario, le Bureau des conseillers des travailleurs (BCT) et ses 15 antennes régionales soutiennent les salarié·e·s dans les questions de représailles en matière de SST. Comme le bureau ontarien l’indique,

le BCT peut vous aider en prenant les mesures suivantes : vous donner des conseils sur vos droits et la façon de les faire respecter ; vous représenter dans la présentation d’une demande à la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO); vous représenter lors d’une médiation, d’une consultation ou d’une audience devant la CRTO ; vous remettre des documents en ce qui concerne les représailles en matière de santé et de sécurité ; vous indiquer d’autres organismes qui peuvent vous aider93.

En Colombie-Britannique, en plus d’offrir des renseignements et de l’aide aux salarié·e·s au sujet des dossiers de réclamation d’indemnités, le Workers Advisers Office informe également les travailleuses et travailleurs de leurs droits de refuser d’exécuter un travail dangereux, de déposer des plaintes et de participer aux réunions de SST sans pénalité financière94.

Dans les provinces canadiennes autres que le Québec, les bureaux de conseillères et conseillers contribuent à aider les salarié·e·s non syndiqué·e·s et même les petites entreprises à se frayer un chemin dans la complexité des régimes de prévention et d’indemnisation en SST95. Les gouvernements auraient même avantage financièrement à mettre en place de tels organismes de soutien des travailleuses et travailleurs qui contribueraient à réduire tant la pression sur les services publics que la judiciarisation des régimes de SST. Comme l’indiquaient les Plans d’activités du BCT de l’Ontario, publiés en 2013 et en 2016, de tels organismes indépendants contribuent à réduire la pauvreté chez les travailleuses et travailleurs les plus vulnérables en leur facilitant l’accès aux indemnités pour lésions professionnelles tout en réduisant « les pressions qui s’exercent sur les programmes de services sociaux et les recettes du gouvernement96 » et en « aid[ant] les employeurs puisque les différends se règlent rapidement et efficacement sans procédure potentiellement coûteuse devant les tribunaux97 ».

Renforcement des dispositions législatives et réglementaires

Pour améliorer la participation des salarié·e·s à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, l’existence de mécanismes de participation en SST est une condition essentielle mais insuffisante : différentes conditions sont nécessaires à leur efficacité. Surtout dans les milieux de travail non syndiqués et les petites entreprises, la participation des salarié·e·s doit être soutenue par un cadre législatif adéquat et concrètement appliqué98.

Une étude99 menée au Royaume-Uni suggère la nécessité d’un renforcement législatif de la participation en SST en fournissant davantage de pouvoirs aux représentant·e·s des salarié·e·s, tels que les droits d’intervenir dans les cas de dangers graves et imminents, d’agir dans les situations de conflits ou de manque de collaboration de l’employeur et de participer davantage à l’évaluation des risques en SST. La même étude propose d’exiger de l’employeur qu’il réponde aux demandes de représentation des salarié·e·s et veille au respect du temps de libération pour la formation des représentant·e·s. Enfin, le cadre législatif doit réglementer adéquatement les fonctions de l’inspectorat, notamment en ce qui concerne les droits de participation des salarié·e·s dans les milieux de travail100.

Ni la loi réformée en 2021 ni le projet de règlement du CA de la CNESST, publié le 3 janvier 2024, ne comportent de telles dispositions avancées. En fait, leur texte comme leurs modalités d’application ne répondent pas aux conditions nécessaires à l’effectivité et à l’efficacité de la participation et de la consultation des travailleuses et travailleurs en matière de SST. En s’appuyant sur une vaste revue des études internationales et sur des analyses statistiques et des études de cas menées au Royaume-Uni, David Walters101, alors professeur à l’Université Cardiff et directeur du Cardiff Work Environment Research Centre, dresse une liste de ces conditions préalables, présentée au tableau 3.

Nous avons montré les lacunes du régime québécois quant à la première et à la deuxième conditions : le cadre législatif québécois ne permet pas de garantir la mise en pratique des droits de participation à la prévention de la SST des personnes. Quant aux troisième et quatrième conditions, qui concernent les employeurs eux-mêmes, le contrôle externe au milieu de travail qu’effectue la CNESST, notamment par l’inspection, doit être resserré, comme l’illustrent les témoignages et les rapports d’inspection que nous avons analysés. Dans les milieux non syndiqués, la réalisation des deux dernières conditions, soit la représentation autonome par et pour les salarié·e·s et la communication entre les représentant·e·s et leurs collègues, est très peu probable sans la mise sur pied d’un organisme indépendant de soutien aux personnes non syndiquées (voir les recommandations ci-dessous).

Conclusion

Depuis 2016, les lésions indemnisées par la CNESST sont en augmentation102 (à l’exception de la période de réduction de l’activité économique durant la pandémie de COVID-١٩) et l’incitation à la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles est un phénomène reconnu au Québec103. La diversité des risques affectant la santé et la sécurité des travailleurs et en particulier des travailleuses se révèle de plus en plus grande en raison, par exemple, de la surcharge de travail du personnel des services publics de santé et d’éducation ; de la violence de la clientèle dans le secteur des services ; des troubles musculosquelettiques, non seulement dans le secteur manufacturier, mais aussi dans les soins et les services ; et des risques biologiques rendus visibles par la pandémie de COVID-19.

Nous avons pourtant vu que les employé·e·s non syndiqué·e·s, qui représentent 60 % de l’ensemble des salarié·e·s du Québec, ne bénéficient d’aucun soutien extérieur qui leur soit spécifiquement dédié et financé par le régime public de SST et ayant pour mandat de leur fournir de l’information et de l’aide en matière de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Nous avons vu que l’efficacité de la participation des travailleuses et travailleurs à la prévention en SST a été amplement démontrée dans la littérature scientifique. Des études montrent que sans soutien extérieur, la participation effective des salarié·e·s non syndiqué·e·s en prévention est difficile et souvent pratiquement impossible.

Pendant 40 ans, les droits des travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s, soit la majorité des salarié·e·s du Québec, de participer à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, pourtant inscrits clairement dans la loi québécoise, ne se sont pas, sinon peu, concrétisés. Cette absence d’effectivité des droits s’explique soit parce que les règlements correspondants n’étaient pas promulgués dans tous les secteurs d’activité économique, soit parce que dans les faits, les salarié·e·s non syndiqué·e·s rencontrent des obstacles pour connaître et exercer leurs droits. En 2021, une nouvelle loi était appelée à remédier à ce déficit de mise en application. Malheureusement, la nouvelle loi comporte des lacunes, en particulier pour les personnes non syndiquées, et son application par la CNESST ne permet toujours pas de résorber la situation de manière systématique et élargie. Sans soutien extérieur et indépendant, la participation des personnes non syndiquées à la prévention, quoiqu’elle soit formellement prescrite par la nouvelle loi et dictée par un souci pour la santé et la dignité des travailleuses et des travailleurs, est vouée à rester un vœu pieux.

Dans les rapports d’inspection de la CNESST analysés, nous constatons que les exigences de la LMRSST y sont en général mentionnées, mais souvent sans expliciter la nécessité d’une assemblée et d’un vote. Les conditions minimales pour assurer un processus indépendant de l’employeur dans l’élection des comités et des représentant·e·s en SST n’apparaissent pas. Dans les conditions actuelles, l’application par la CNESST du régime québécois de SST n’assure pas systématiquement la conformité aux exigences de la loi en matière de participation des salarié·e·s et ne répond donc pas au principe de « prise en charge » de la prévention au sein des milieux de travail.

Les témoignages de travailleuses que nous avons recueillis illustrent qu’en l’absence d’un processus rigoureux et conforme à la loi d’élection de représentant·e·s en assemblée ou de désignation d’agent·e·s de liaison dignes de confiance et adéquatement soutenu·e·s, certain·e·s employé·e·s non syndiqué·e·s souhaitant travailler dans des conditions saines et sécuritaires craignent de faire l’objet de représailles dans leur milieu de travail. Les salarié·e·s non syndiqué·e·s, ce qui est plus souvent le cas pour les femmes, dans le secteur privé, et a fortiori les personnes migrantes occupant des emplois précaires risquent d’hésiter de recourir au droit de refuser d’exécuter un travail dangereux.

Au-delà du fait qu’il ne soit pas conforme aux exigences réglementaires de la CNESST, pourquoi un processus d’élection sans assemblée pose-t-il problème dans un milieu de travail non syndiqué ? En bref, les personnes qui seront représentées doivent pouvoir faire un choix éclairé, ce qui ne peut reposer sur une communication à sens unique des candidat·e·s vers leurs collègues, encore moins si cela se fait par écrit seulement. La fonction d’une assemblée est de permettre une véritable délibération, condition d’une prise de décision éclairée.

En milieu syndiqué, des occasions formelles d’échanges entre les travailleuses et travailleurs existent, indépendantes de l’employeur, où les participant·e·s peuvent définir collectivement leurs intérêts et comment elles et ils souhaitent les défendre. Les élu·e·s doivent rendre des comptes périodiquement à leurs collègues. De telles occasions n’existent pas en milieu non syndiqué, et les rencontres organisées par l’employeur ne peuvent jouer ce rôle. La prévention en SST ne soulève pas seulement des enjeux partagés à la fois par l’employeur et les employé·e·s : par exemple, il y a contradiction entre santé et sécurité, et surcharge de travail. On peut très bien imaginer que des employeurs n’apprécient pas que des problèmes soient nommés et souhaitent par conséquent influencer le processus d’élection des représentant·e·s pour conserver le contrôle sur le milieu de travail. Les garanties d’un processus indépendant d’assemblée de salarié·e·s et d’élection de leurs représentant·e·s ne devraient pas être contournées, mais au contraire renforcées.

Par ailleurs, la CNESST s’est donné comme priorité de viser davantage les travailleuses et travailleurs immigrant·e·s dans sa planification pluriannuelle 2020-2023104. Or, le déficit de mise en application de la loi québécoise sur la SST est particulièrement préoccupant pour les salarié·e·s d’agences de placement, au nombre desquels on compte plusieurs personnes migrantes. Ni la loi ni la CNESST ne donnent d’indication sur la représentation des travailleuses et travailleurs d’agences de placement, mis à part que ces travailleurs et travailleuses doivent être comptés, y compris dans l’entreprise cliente, et que l’agence elle-même soit assujettie à la loi.

Enfin, pour que les salarié·e·s non syndiqué·e·s disposent aussi réellement, et non seulement sur papier, des droits reconnus par la loi québécoise et par le droit international, nous concluons qu’il est nécessaire de créer un organisme indépendant et d’instaurer des mesures pour soutenir les travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s dans l’exercice de leurs droits de participation et de représentation en matière de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Nous proposons aussi des recommandations complémentaires qui viendraient appuyer concrètement le rôle de cet organisme dans le soutien des travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s.

Recommandations

En regard du déficit de mise en application des droits de participation à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles des salarié·e·s non syndiqué·e·s du Québec et de l’état des connaissances scientifiques sur le sujet, nous formulons les huit recommandations suivantes visant à améliorer le régime québécois de prévention :

  1. Que la CNESST mette fin à la pratique d’annoncer à l’avance ses visites d’inspection dans les établissements105.
  2. Que lorsqu’une plainte en matière de prévention est logée par une travailleuse ou un travailleur auprès de la CNESST, l’inspecteur qui visitera l’établissement s’assure de communiquer avec la travailleuse ou le travailleur avant et après la visite, afin de bien comprendre le problème et d’obtenir la version de la ou du salarié·e·s sur les informations transmises par l’employeur.
  3. À défaut pour la CNESST de disposer du pouvoir réglementaire d’établir des normes minimales quant au contenu de la formation des agent·e de liaison et à leur temps de libération, qu’elle élabore un projet de guide de bonnes pratiques sur ces questions et le soumette à la consultation publique, avant de l’adopter pour diffusion auprès des inspecteurs, employeurs et travailleuses et travailleurs.
  4. Que la réglementation actuelle relative aux heures accordées à la ou au représentant·e à la prévention des groupes prioritaires 1 et 2 soit étendue à l’ensemble des secteurs d’activité par la réglementation devant être adoptée en vertu de la LMRSST106.
  5. Que la CNESST crée un Bureau des représentantes et représentants des travailleuses et travailleurs en santé et sécurité du travail, dont le mandat et le fonctionnement sont encadrés législativement (à l’instar des ASP), afin d’offrir un soutien indépendant aux représentant·e·s des salarié·e·s dans les établissements non syndiqués ; que ce bureau soit constitué en personne morale, financé par les cotisations des employeurs au régime public de SST et administré par un CA formé par des représentant·e·s des associations de travailleuses et de travailleurs non syndiqués107.
  6. Que soit mis en place un réseau de représentant·e·s itinérant·e·s à la prévention chargé·e·s de soutenir les travailleuses et travailleurs œuvrant dans les établissements non syndiqués108.
  7. Que ce réseau de représentant·e·s itinérant·e·s à la prévention soit développé et administré par le Bureau des représentantes et représentants des travailleuses et travailleurs en santé et sécurité du travail décrit ci-haut et ses bureaux régionaux ou locaux.
  8. Que soient renforcés, par la CNESST, les mécanismes de protection de la confidentialité des travailleuses et travailleurs signalant des situations dangereuses (plainte) et les mécanismes de protection contre les représailles envers les travailleuses et travailleurs faisant des signalements et étant impliqué·e·s dans des processus d’organisation collective dans les milieux de travail109.

1 L’auteur tient à remercier David Mandel, professeur associé du Département de science politique de l’Université du Québec à Montréal, Geneviève Baril-Gingras, professeure titulaire au Département des relations industrielles de l’Université Laval, et Roch Lafrance, de l’Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades, pour leur contribution à la collecte de données et aux analyses présentées dans ce qui suit. L’auteur remercie également Louise Boivin, professeure honoraire associée au Département de relations industrielles de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) et Guy Bellemare, professeur titulaire au Département de relations industrielles de l’UQO. L’auteur demeure le seul responsable du contenu du texte.

2 Shanie Roy, « PL-59 : l’activité économique au détriment de la santé des travailleuses et des travailleurs », IRIS, Billet, avril 2021, iris-recherche.qc.ca/blogue/travail-et-emploi/pl-59-l-activite-economique-au-detriment-de-la-sante-des-travailleuses-et-des-travailleurs/.

3 Laurence Hamel-Roy et autres, Mobiliser pour la santé et la sécurité du travail dans les entrepôts : des travailleurs et travailleuses d’agences au taylorisme numérique, Montréal, Groupe interuniversitaire et interdisciplinaire de recherche sur l’emploi, la pauvreté et la protection sociale (GIREPS), Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTTI) et Association des travailleurs et travailleuses d’agence de placement (ATTAP), 2023.

4 Ministère du Travail, La présence syndicale au Québec et au Canada en 2021, Québec, Direction de l’information sur le travail, 2022, p. 5.

5 Deux revues des connaissances concluent à la nécessité des comités de travailleuses et travailleurs en prévention des lésions professionnelles, sans affirmer que leur existence soit suffisante, puisque le cadre législatif, l’intervention de l’État, le mode de gestion des entreprises et la présence syndicale déterminent fortement la capacité des comités à agir efficacement. Nadine MILGATE, Ev INNES et Kate O’LOUGHLIN, « Examining the effectiveness of health and safety committees and representatives : A review », Work, 19-3, 2002, p. 281-290 ; Annalee YASSI et autres, « Effectiveness of joint health and safety committees : A realist review », American Journal of Industrial Medicine, 56-4, 1er avril 2013, p. 424-438 ; Phil JAMES et David WALTERS, « Worker representation in health and safety : options for regulatory reform », Industrial Relations Journal, 33-2, 1er juin 2002, p. 141-156.

Des études québécoises corroborent ces résultats, soulignant l’importance d’une obligation légale de mise en place des comités. M. SIMARD, L’expérience des entreprises syndiquées québécoises en matière de santé et sécurité du travail : synthèse des principaux résultats de la recherche, Montréal, École des relations industrielles, Université de Montréal, 1987 ; Diane BERTHELETTE et R. PINEAULT, « Analyse d’implantation du programme de santé au travail : résultats d’une recherche évaluative », Travail et santé, 8-4, 1992, p. s23-s30 ; Diane BERTHELETTE et Frédéric PLANCHÉ, Évaluation du programme de sécurité du travail dans des petites et moyennes entreprises, Montréal, Institut de recherche en santé et sécurité du travail, coll. « Études et recherches », 1995 ; L. DESMARAIS, Évaluation de l’implantation des comités de santé et de sécurité du travail : une étude de cas multiples réalisée dans les petites et moyennes entreprises au Québec, Montréal, Université du Québec à Montréal, 2004.

6 Une revue internationale des connaissances montre que les représentant·e·s des travailleuses et travailleurs disposant d’une formation adéquate contribuent à l’efficacité des mesures préventives en collaborant avec les représentant·e·s de l’employeur à l’identification des risques en milieux de travail, en initiant des interventions visant de nouveaux risques et en participant à la résolution des problèmes en santé et sécurité. David WALTERS et autres, The role and effectiveness of safety representatives in influencing workplace health and safety, Cardiff, Work Environment Research Group, School of Social Sciences, Cardiff University, coll. « HSE Books », 2005.

Comme le démontre une autre revue internationale des connaissances. Caroline PELCHAT, Les pratiques des représentants des travailleurs en santé en sécurité du travail : leviers et obstacles, effets perçus et rôle de la formation syndicale : portrait et étapes préparatoires à la construction d’un questionnaire, Québec, Université Laval, 2018.

Selon une étude dans sept pays européens et une étude en Ontario, l’efficacité des représentant·e·s dépend fortement de la quantité de temps de libération rémunéré et consacré aux activités de santé et sécurité en milieu de travail. Alan HALL et autres, « Identifying knowledge activism in worker health and safety representation : A cluster analysis », American Journal of Industrial Medicine, 59-1, 1er janvier 2016, p. 42-56.

7 La définition des comités et des représentant·e·s en santé et sécurité, dans le cadre du régime québécois, est présentée ci-bas.

8 Theo Nichols, David Walters et Ali C. Tasiran, « Trade Unions, Institutional Mediation and Industrial Safety : Evidence from the UK », Journal of Industrial Relations, 49-2, 1er avril 2007, p. 211-225

9 Caroline PELCHAT, op. cit., 2018.

10 LOARC, Health and safety representation. Writing the workers back in, Labour Occupational Health Clinics Academic Research Collaboration, 2016.

11 Marc Renaud et Chantal Saint-Jacques, « Le droit de refus, cinq ans après : l’évolution d’un nouveau mode d’expression des risques », Sociologie et sociétés, 18-2, 1986, p. 99-112 ; Michael Zoorob, « Does ’right to work’ imperil the right to health ? The effect of labour unions on workplace fatalities », Occupational and Environmental Medicine, 75-10, 1er octobre 2018, p. 736 ; Victoria Robson et autres, « Unionisation and injury risk in construction : a replication study », Occupational and Environmental Medicine, 79-3, 1er mars 2022, p. 169 ; Alison D. Morantz, « Coal Mine Safety : Do Unions Make a Difference ? », ILR Review, 66-1, 1er janvier 2013, p. 88-116.

12 Nichols, Walters et Tasiran, op. cit.

13 Alison D. Morantz, « What Unions Do for Regulation », Annual Review of Law and Social Science, 13-1, 13 octobre 2017, p. 515-534.

14 David WEIL, The fissured workplace : Why work became so bad for so many and what can be done to improve it, Cambridge, Massachusetts London, Harvard University Press, 2014 ; Id., « Creating a strategic enforcement approach to address wage theft : One academic’s journey in organizational change », Journal of Industrial Relations, 60-3, 1er juin 2018, p. 437-460 ; Andrew KING et Wayne LEWCHUK, « Occupation Health and Safety : A Failure to Protect the Right of Workers to Participate in Enforcement », Relations industrielles / Industrial Relations, 77-1, 2022, id.erudit.org/iderudit/1088556ar ; Leah F. VOSKO et autres, Closing the enforcement gap : improving employment standards protections for people in precarious jobs, Toronto Buffalo London, University of Toronto Press, coll. « Studies in comparative political economy and public policy », n˚58, 2020.

15 Wayne Lewchuk, « The Limits of Voice : Are Workers Afraid to Express Their Health and Safety Rights ? », Osgoode Hall Law Journal, 50-4, 2012, p. 789-812.

16 ZOOROB, op. cit.

17 David Weil, « Are Mandated Health and Safety Committees Substitutes for or Supplements to Labor Unions ? », ILR Review, 52-3, 1er avril 1999, p. 339-360.

18 YASSI et autres, op. cit. ; JAMES et WALTERS, op. cit.

19 David Walters et autres, Regulating Workplace Risks : a Comparative Study of Inspection Regimes in Times of Change, Cheltenham, Edward Elgar Publishing, 2011.

20 Gazette officielle du Québec, Projet de règlement, Loi sur la santé et la sécurité du travail (ch. S-2.1) et Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (2021, ch. 27), Éditeur officiel du Québec, 2024.

21 Herbert K. Abrams, « A Short History of Occupational Health », Journal of Public Health Policy, 22-1, 2001, p. 34-80.

22 François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset, 1986.

23 Katherine Lippel, « L’avenir du droit de la santé et de la sécurité du travail dans le contexte de la mondialisation », Revue de droit d’Ottawa / Ottawa Law Review, 47-2, 2016, p. 535-556.

24 Robert Asher et Mary Lee Dunn, « Organized Labor and the Origins of the Occupational Safety and Health Act », NEW SOLUTIONS : A Journal of Environmental and Occupational Health Policy, 24-3, 1er novembre 2014, p. 279-301.

25 Frank Goldsmith et Lorin E. Kerr, « Worker Participation in Job Safety and Health », Journal of Public Health Policy, 4-4, 1983, p. 447-466.

26 OIT, Convention no 155 concernant la sécurité et la santé des travailleurs, Genève, Organisation internationale du travail, 1981.

27 Un projet de règlement a été publié le 3 janvier 2024 et le CA de la CNESST doit l’adopter au plus tard le 6 octobre 2024.

28 Nous excluons de la présentation suivante les dispositions et les règlements régissant la prévention en SST dans le secteur des chantiers de construction au Québec.

29 Sur l’histoire du système de financement de l’indemnisation des lésions professionnelles au Québec, voir Mathieu Charbonneau et Guillaume Hébert, La judiciarisation du régime d’indemnisation des lésions professionnelles au Québec, Montréal, IRIS, 2020.

30 Alexandre Duchesne-Blondin, Analyse socio-historique des transformations du régime assurantiel québécois en matière de santé et sécurité aux travail (1885-2015),Université du Québec à Montréal, Montréal, 2017, p. 90.

31 La Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) a été créée en 1980, puis fusionnée en 2016 avec la Commission des normes du travail et la Commission de l’équité salariale et rebaptisée « CNESST ». Les acronymes CSST et CNESST sont utilisés de manière interchangeable dans ce texte.

32 Katherine Lippel, « Une réforme du régime québécois de santé et de sécurité du travail : pour qui ? pourquoi ? pour quand ? », in L’intervention en santé et en sécurité du travail : pour agir en prévention dans les milieux de travail, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. « Collection santé et sécurité du travail », 2013, p. 372.

33 Vérificateur général du Québec, Chapitre 3. Audit de performance : prévention en santé et sécurité du travail. Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, Québec, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, coll. « Rapport du vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2019-2020 », 2019, p. 21.

35 Geneviève Baril-Gingras et Rachel Cox, « Réforme du régime de prévention en SST au Québec : analyse critique, sensible au genre et aux autres sources d’inégalités », Relations industrielles / Industrial Relations, 77-4, 2022, id.erudit.org/iderudit/1097694ar.

36 Ibid.

37 Le programme de prévention et le programme de santé spécifique à l’établissement, voir ibid., p. 686 et 689.

38 Règlement sur les comités de santé et de sécurité au travail, art. 15, Assemblée nationale du Québec, Québec, éditeur officiel du Québec, 1er novembre 2023, www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/rc/S-2.1, %20r. %205 %20/

39 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 8.

40 Ibid.

41 Ibid., p. 7.

42 La LSST de 1979 « indiquait qu’un [comité de santé et de sécurité] “peut” être formé (art. 68, LSST); contrairement aux autres juridictions au Canada, cela ne devenait une obligation que lorsqu’une association accréditée ou un certain nombre ou pourcentage de [travailleuses et travailleurs] le demandait. La LSST prévoyait certains pouvoirs décisionnels pour le [comité de santé et de sécurité], ce qui suppose cependant l’accord des deux parties (programme de formation et d’information, choix du médecin élaborant le [programme de santé spécifique à l’établissement], approbation de ce programme, choix des équipements de protection individuelle (art. 78 et 79, LSST). Pour le reste, le comité ne pouvait que faire des recommandations à l’employeur ». Voir la note 30 pour la référence.

43 NICHOLS, WALTERS et TASIRAN, op. cit

44 Ellen MACEACHEN et autres, « Workplace Health Understandings and Processes in Small Businesses : A Systematic Review of the Qualitative Literature », Journal of Occupational Rehabilitation, 20-2, 1er juin 2010, p. 180-198

45 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 8.

46 Anne-Marie Laflamme, « Changing Work Relationships and the Protection of Workers under Quebec and Australian Occupational Health and Safety Law », Canadian Lab. & Emp. LJ, 19, 2015, p. 223 ; Katherine Lippel, « L’avenir du droit de la santé et de la sécurité du travail dans le contexte de la mondialisation », Revue de droit d’Ottawa / Ottawa Law Review, 47-2, 2016, p. 535-556 ; Charbonneau et Hébert, op. cit. ; Baril-Gingras et Cox, op. cit. ; Maxine Visotzky-Charlebois, « Le mode de financement de la CNESST comme vecteur de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles : qu’en est-il réellement ? », Communitas, 2-1, 2021, p. 166-193 ; Guillaume Hébert et Mathieu Charbonneau, « La judiciarisation de la CNESST et les mutuelles de prévention : un angle mort du projet de loi 59 », IRIS, Billet, 3 mai 2021, iris-recherche.qc.ca/blogue/travail-et-emploi/la-judiciarisation-de-la-cnesst-et-les-mutuelles-de-prevention-un-angle-mort-du-projet-de-loi-59/ ; VGQ, op. cit., p. 22.

47 Parallèlement au manque de volonté d’étendre l’application des mécanismes de prévention, il est important de noter que la CSST a établi, dans les années 1990, un mode de financement basé sur la « tarification par incidence ». La tarification par incidence fut notamment mise en place au moyen des « mutuelles de prévention », destinées aux petites entreprises, lesquelles « devaient alors mettre en œuvre un [programme de prévention], mais pas de mécanismes de participation ». Or, la tarification par incidence et les mutuelles de prévention contribuent à la judiciarisation du régime et à la contestation des décisions médicales et d’indemnisation, plutôt qu’à la prévention. Voir la note 40 pour les références.

48 Ministère du Travail, La présence syndicale au Québec et au Canada en 2021, Québec, Direction de l’information sur le travail, 2022.

49 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 3.

50 « Régime intérimaire des mécanismes de prévention et de participation », CNESST, www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/prevention-securite/organiser-prevention/regime-interimaire/regime-interimaire-mecanismes-prevention

52 Sur les reculs en matière de mécanismes de prévention, soit des programmes de prévention, des nouveaux « plans d’action » pour les petits milieux de travail et d’identification des risques, voir Geneviève Baril-Gingras et Rachel Cox, « Réforme du régime de prévention en SST au Québec : analyse critique, sensible au genre et aux autres sources d’inégalités », Relations industrielles / Industrial Relations, 77-4, 2022., p. 12.

53 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 12.

54 Ibid., p. 13.

55 Ibid.

56 Par exemple, « dans un établissement de 20 à 50 [travailleuses et travailleurs], le régime transitoire accorde 45 minutes par semaine à une représentante (si on reporte sur une base hebdomadaire ce qui est prévu par trimestre) (LMRSST, art. 291), comparativement à 3 [heures] dans les secteurs majoritairement masculins déjà désignés prioritaires (Règlement sur le représentant à la prévention, S-2.1, r. 12, art. 2) ; pour un établissement de 101 à 200 [travailleuses et travailleurs], elle disposera de 2 [heures] 30 par semaine plutôt que de 10 [heures]. » Geneviève Baril-Gingras et Rachel Cox, « Réforme du régime de prévention en SST au Québec : analyse critique, sensible au genre et aux autres sources d’inégalités », Relations industrielles / Industrial Relations, 77-4, 2022.

57 Danielle Champoux et Pascale Prud’homme, Analyse comparative du contexte de travail et portrait statistique des problèmes de santé et sécurité au travail en fonction de la taille des entreprises, Montréal, Institut de recherche en santé et sécurité du travail, 2017.

58 Ellen MACEACHEN et autres, « Workplace Health Understandings and Processes in Small Businesses : A Systematic Review of the Qualitative Literature », Journal of Occupational Rehabilitation, 20-2, 1er juin 2010, p. 180-198.

59 Roy, op. cit.

60 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 14.

61 Katherine Lippel, Mémoire présenté à la Commission de l’économie et du travail de l’Assemblée nationale concernant le Projet de loi no 59 proposant la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, Québec, Commission de l’économie et du travail de l’Assemblée nationale, 2021.

62 Richard N. Block, Karen Roberts et Ronald O. Clarke, Labor Standards in the United States and Canada, Kalamazoo, Michigan, W.E. Upjohn Institute for Employment Research, 2003.

63 Baril-Gingras et Cox, op. cit., p. 16.

64 HAMEL-ROY et autres, op. cit.
65 Ibid.
66 CNESST, Unité dédiée à l’accès à l’information, Demande d’accès à l’information, N/D 2340929SST, 23 novembre 2023.

67 « Liste des centres de la petite enfance (CPE) et des garderies en fonction »,

68 « Liste des conventions collectives en vigueur au Québec », Partenariat Données Québec,

69 Les deux sections qui suivent, à l’exception des témoignages, ont été rédigées sur la base des analyses des rapports d’intervention réalisées et fournies à l’auteur par Geneviève Baril-Gingras, professeure titulaire au Département des relations industrielles de l’Université Laval. L’auteur remercie Mme Baril-Gingras pour cette contribution et demeure seul responsable du contenu de la note.

70 Ces risques sont accentués par le fait que la totalité des manutentionnaires ou préparateurs de commandes qui travaillent dans les entrepôts de Dollarama sont, selon les données de l’équipe de recherche du projet Mobiliser, employées par des agences de placement de personnel et que 67,6 % sont demandeurs du statut de réfugié. Laurence Hamel-Roy et autres, Mobiliser pour la santé et la sécurité du travail dans les entrepôts : des travailleurs et travailleuses d’agences au taylorisme numérique, Montréal, Groupe interuniversitaire et interdisciplinaire de recherche sur l’emploi, la pauvreté et la protection sociale (GIREPS), Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTTI) et Association des travailleurs et travailleuses d’agence de placement (ATTAP), 2023, p. 42-43.

71 CNESST, Guide pratique – Membre représentant les travailleurs au sein du comité de santé et de sécurité, 6 septembre 2023, www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/organisation/documentation/formulaires-publications/guide-membre-representant-travailleur-comite

72 Hamel-Roy et autres, op. cit.

73 Ibid., p. 43.

74 La LMRSST réfère à cet effet à la LSST, qui elle-même réfère au Règlement sur les comités de santé et de sécurité du travail (S-2.1, r 5), lequel est cité ici.

75 Comme l’indique le rapport Mobiliser, « en ce qui a trait aux enjeux de santé et de sécurité du travail chez Amazon, le travailleur blessé au travail doit s’adresser à son ou sa gestionnaire, qui lui dira de s’adresser à sa clinique interne AmCare. Le problème ici n’est pas que l’entreprise offre des soins de santé (plusieurs grandes entreprises le font), mais plutôt que, selon des répondants et répondantes à notre enquête, le processus commencerait et s’arrêterait généralement avec AmCare. » Laurence Hamel-Roy, op. cit., p. 25.

76 Nous excluons ici, aux fins du présent texte, d’autres composantes des services de garde au Québec, telles que les ressources de garde en milieu familial subventionné, les agences de placement de personnel et les personnes non reconnues. Voir Guy Bellemare, Le contexte des services de garde au Québec : vers une logique d’entreprise réseau hiérarchisée, Centre de recherche sur les innovations sociales, Université Laval, Université du Québec en Outaouais, coll. « Les nouvelles configurations de la relation d’emploi et leurs impacts sur le travail, l’emploi et l’action collective », 2020.

77 Guy Bellemare, Le contexte des services de garde au Québec : vers une logique d’entreprise réseau hiérarchisée, Centre de recherche sur les innovations sociales, Université Laval, Université du Québec en Outaouais, coll. « Les nouvelles configurations de la relation d’emploi et leurs impacts sur le travail, l’emploi et l’action collective », 2020.

78 Ibid., p. 60.

79 Bien que la présence d’une représentante dans un établissement de moins de 20 travailleuses dévie du cadre législatif, il est possible que le service de garde concerné ait mis en place une telle initiative avant même l’entrée en vigueur du régime intérimaire et de l’obligation de désigner une agente de liaison.

80 Hamel-Roy et autres, op. cit.

81 Comité d’experts sur les normes du travail fédérales modernes, Rapport du Comité d’experts sur les normes du travail fédérales modernes, Gatineau, Québec, Emploi et Développement social Canada, Gouvernement du Canada, 2019, p. 161.

82 Hamel-Roy et autres, op. cit.

83 La CNESST explique qu’une ASP est un regroupement volontaire d’associations d’employeurs et de travailleurs d’un même secteur d’activité. C’est un organisme autonome et sans but lucratif réglementé par la [LSST]. Les ASP collaborent étroitement avec la CNESST pour prévenir les accidents du travail et les maladies professionnelles. Elles favorisent également la prise en charge de la santé et de la sécurité par les milieux de travail. L’association sectorielle paritaire est gérée par un conseil d’administration composé à parts égales de représentants d’associations d’employeurs et de représentants d’associations de travailleurs d’un même secteur d’activité. «Faire partie d’une association sectorielle paritaire (ASP) », CNESST» www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/demarches-formulaires/employeurs/dossier-dassurance-lemployeur/classification-tarification/reduire-prime-dassurance/faire-partie-dune-association-sectorielle (consulté le 1er décembre 2023).

84 La CNESST fera des démarches pour que de nouvelles ASP soient implantées dans d’autres secteurs, la LMRSST (art. 168) venant en ce sens modifier la LSST (art. 98). Au moment où ces lignes sont écrites, il existe neuf ASP couvrant une quinzaine de secteurs.

85 « Programme d’aide financière pour la formation et l’information en santé et sécurité du travail », CNESST, https://www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/organisation/cnesst/commandites-subventions/programme-daide-financiere-pour-formation

86 Nous présentons dans ce qui suit ces deux solutions, déjà proposées par d’autres, dont SAGE, Le deuxième sexe au travail : regard scientifique sur la santé au travail des femmes. Mémoire sur le Projet de loi 59 Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, Québec, Équipe de recherche interdisciplinaire sur le travail Santé-Genre-Égalité, Université du Québec en Outaouais, 2021 ; et Mathieu Charbonneau et Guillaume Hébert, La judiciarisation du régime d’indemnisation des lésions professionnelles au Québec, Montréal, IRIS, 2020.

87 Eric Tucker, « Worker participation in health and safety regulation : lessons from Sweden », Studies in Political Economy, 37-1, 1992, p. 95-127.

88 Kaj Frick et David Walters, « Worker representation on health and safety in small enterprises : lessons from a Swedish approach », International Labour Review, 137-3, 1998, p. 367-389.

89 John Sjöström et Kaj Frick, Worker participation in the management of occupational safety and health - qualitative evidence from ESENER-2. Country report - Sweden, Luxembourg : Publications Office of the European Union, European Risk Observatory, European Agency fo Safety and Health at Work, 2017.

90 David Walters, « One Step Forward, Two Steps Back : Worker Representation and Health and Safety in the United Kingdom », International Journal of Health Services, 36-1, 1er janvier 2006, p. 87-111.

91 David J. Knowles, Measuring the effect of health and safety advisers and roving safety representatives in agriculture, Sudbury (Suffolk), HSE Books, 2006.

92 « Ressources d’information – Bureaux des conseillers ou de défenseurs des travailleurs », Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST), www.cchst.ca/oshanswers/information/worker_advisor.html

93 « Comment obternir l’aide du BCT », Bureau des conseillers des travailleurs, www.owa.gov.on.ca/fr/a-propos-du-bct/comment-obtenir-laide-du-bct/

95 Charbonneau et Hébert, La judiciarisation du régime d’indemnisation des lésions professionnelles au Québec, op. cit.

96 BCT, Plan d’activités de 2014-2015 à 2017-2018, Bureau des conseillers des travailleurs /Gouvernement de l’Ontario, 2013, p. 3.

97 BCT, Plan d’activités de 2017-2018 à 2019-2020, Bureau des conseillers des travailleurs / Gouvernement de l’Ontario, 2016, p. 5.

98 James et Walters, op. cit.

99 Walters, op. cit.

100 Ibid.

101 David Walters, « Representing Workers on Safety and Health : The Current Challenge ? », in P. Sheldon, S. Gregson, R. D. Lansbury et Sanders K. (éd.), The Regulation and Management of Workplace Health and Safety, Routledge, 2020, p. 123-140.

102 Vérificateur général du Québec, op. cit., p. 7.

103 Charbonneau et Hébert, op. cit.

105 Inspirée de Hamel-Roy et autres, op. cit., p. 5.

106 Inspirée de UTTAM, Mémoire présenté à la Commission de l’économie et du travail, Consultations sur le projet de loi no 59, Loi modernisant le régime de santé et sécurité du travail, Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades, 2021, p. 119.

107 Cette recommandation s’inspire de Coalition contre le travail précaire, Pour mieux protéger la santé et la sécurité de tous les travailleuses et travailleurs. Mémoire déposé à la Commission de l’économie et du travail dans le cadre des consultations particulière sur le projet de loi n. 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, Centre des travailleurs et travailleuses immigrants, Association des travailleurs et travailleuses temporaires d’agences de placement, Association des travailleurs et travailleuses migrants du Québec, PYNAY, Mexicain.es uni.es pour la régularisation, India Civil Watch–Montréal, Centre communautaire des femmes Sud-Asiatiques, 2021, p. 8. Voir aussi Charbonneau et Hébert, op. cit., p. 51 et Hamel-Roy et autres, op. cit., p. 5.

108 Cette recommandation s’inspire de UTTAM, op. cit., p. 120.

109 Inspirée de Hamel-Roy et autres, op. cit., p. 5.

Faits saillants

  • Depuis 2016, les lésions indemnisées par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) sont en augmentation, et cela, bien que l’incitation à la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles soit un phénomène reconnu au Québec.
  • L’efficacité de la participation des travailleuses et travailleurs à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles a été amplement démontrée dans la littérature scientifique. Cependant, pour les salarié·e·s non syndiqué·e·s, cette participation est difficile et souvent pratiquement impossible.
  • Malgré une réforme adoptée en 2021, le cadre juridique québécois, mis en place en 1979, ne prévoit toujours pas les conditions qui permettraient aux salarié·e·s non syndiqué·e·s de véritablement exercer leurs droits à la participation en matière de prévention. Le projet de règlement déposé en janvier 2024 n’apporte pas plus de réponse.
  • Les travailleuses et travailleurs non syndiqué·e·s, qui représentent 60 % des salarié·e·s du Québec, n’ont pas accès à des ressources indépendantes, externes au milieu de travail, en mesure de les soutenir pour garantir l’application de leurs droits à la participation en santé et sécurité du travail (SST).
  • En l’absence d’un processus rigoureux et conforme à la loi pour l’élection de représentant·e·s ou la désignation d’agent·e·s de liaison dignes de confiance et adéquatement soutenu·e·s, des employé·e·s non syndiqué·e·s cherchant à travailler dans des conditions saines et sécuritaires peuvent craindre des représailles dans leur milieu de travail.
  • Pour pallier les difficultés des salarié·e·s non syndiqué·e·s, il est nécessaire de créer un organisme indépendant en mesure de les soutenir dans l’exercice de leurs droits en matière de participation et de représentation en prévention en santé et sécurité du travail.

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