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CNESST : une commission d’enquête est nécessaire

5 mars 2020


Montréal, le 5 mars 2020 – Basée sur des données inédites obtenues à la suite de demandes d’accès à l’information, une nouvelle étude conclut à la judiciarisation du système d’indemnisation de la CNESST. Alors qu’une importante réforme de la Loi sur la santé et la sécurité du travail est attendue prochainement de la part du ministre Jean Boulet, l’IRIS s’est intéressé aux impacts des réformes opérées à la CNESST durant les années 1990. Le rapport de recherche de l’IRIS publié aujourd’hui s’intitule La judiciarisation du régime d’indemnisation des lésions professionnelles au Québec.

La pointe de l’iceberg

Les réformes du mode de financement opérées dans les années 1990 en font un système lourd, complexe, et difficile à naviguer, tant pour les employés que les employeurs. «Les délais d’attente à la CNESST ne sont que la pointe de l’iceberg, indique Mathieu Charbonneau, chercheur associé à l’IRIS et chercheur postdoctoral à l’Université Concordia. Ce qu’ont fait les réformes du financement, c’est d’alourdir les processus, à la fois pour les employeurs et les employés.» Tant la CSST que les employeurs faisaient la promotion de réformes qui favoriseraient la prévention. Or, pour Mathieu Charbonneau, «rien ne démontre que les employeurs investissent plus en prévention. Par contre, on observe une incitation, pour les employeurs, à la contestation des décisions de la CNESST. Le nombre de contestations de la part des employeurs a explosé depuis les années 1990.»

Évolution du nombre de dossiers ouverts au CLP/CALP/TAT par types de requérant et du nombre de travailleurs couverts par la CSST/CNESST, 1990-1991 à 2017-2018 (base 100 = 1990)

 

La principale modification opérée dans les années 1990 est de démutualiser le mode de tarification des employeurs. D’une tarification par secteur économique, le régime a fait de plus en plus de place à une tarification par incidence, c’est-à-dire qui individualise en fonction des antécédents de lésions les cotisations que les employeurs doivent verser au régime. «En raison de la multiplication des contestations, il y a beaucoup d’argent qui se retrouve dans les cabinets d’avocats ou de médecins alors qu’il devrait aller à la prévention des blessures ou aux indemnisations des travailleuses et des travailleurs», suggère Guillaume Hébert, chercheur à l’IRIS.

Une commission d’enquête nécessaire

L’Institut émet comme principale recommandation que le processus d’indemnisation des lésions professionnelles au Québec doit faire l’objet d’une commission d’enquête. Elle devrait traiter du financement personnalisé à la CNESST, de son lien avec la prévention en matière de santé et sécurité au travail, et de la tarification en fonction des efforts de prévention. «Les précédentes réformes ont incité les employeurs à déployer d’importants efforts pour réduire leurs primes à la CNESST. Le système s’est complexifié et la judiciarisation n’est pas le seul effet néfaste du financement personnalisé. Par exemple, ce mode de financement génère un important problème de fiabilité des statistiques de lésions reconnues par la CNESST. Seule une commission d’enquête peut faire la lumière sur la situation», conclut monsieur Charbonneau.

Cliquez ici pour lire l'étude.