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Qui finance l’État?

19 décembre 2015

  • Eve-Lyne Couturier

Il paraît que l’État est trop endetté. Et que pour parvenir à refinancer adéquatement nos services publics et le filet social, il faut commencer par les démanteler. Peut-être que ça fera mal aux plus pauvres pour commencer, mais on pourra ensuite aller chercher des investissements privés. Les mots magiques… « investissements privés ». Grâce à eux, on pourra faire décoller l’économie, renflouer les coffres et miser sur ce qui compte vraiment : baisser nos impôts. Mais pour y arriver, il faut aussi réduire les impôts des entreprises privées. Moins d’impôts, plus d’investissements. Une équation facile. Simple. Et simpliste.

Il est faux de prétendre que les baisses d’impôts des entreprises s’accompagnent de l’augmentation de leurs investissements. Lorsque nous avons étudié le phénomène en 2014, le lien entre les deux était loin d’être clair. Pour bien comprendre le lien entre les deux, il faut prendre le taux effectif d’imposition sur le revenu. Ainsi, on ne regarde pas seulement le taux que la loi dit qu’il faut percevoir, mais ce qui est réellement perçu par rapport aux revenus des entreprises. Le portrait est alors bien différent. Alors que leur taux d’imposition est supposé être de 11,9%, les entreprises privées ont payé moins de 7,3% de leurs revenus nets à l’État en 2009 (la dernière année pour lesquelles les données sont disponibles). Malgré cette faible contribution relative en impôt, nous ne remarquons pas une augmentation dans les dépenses des entreprises, soit pour améliorer les conditions de travail de leurs employé·e·s, pour changer leurs infrastructures ou développer la recherche et le développement. Plutôt, on remarque qu’elles ont une tendance à accumuler de l’épargne.

On pourrait en être surpris, mais il s’agit pourtant d’une tendance internationale. L’OCDE a ainsi produit un rapport cette semaine expliquant comment les entreprises privées voient leur charge fiscale se réduire aux dépens de la population qui doit prendre de plus en plus la responsabilité de financer l’État. Le phénomène n’est pas nouveau et la tendance est générale. Les citoyen·ne·s ramassent la facture non seulement à travers l’impôt sur le revenu, mais aussi avec les taxes à la consommation et des charges sociales qu’ils et elles partagent de moins en moins avec leur employeur. Quant à elles, les entreprises fiscales se défilent à travers à des pratiques légales comme l’évitement fiscal et illégales comme les paradis fiscaux.

Alors de l’argent, il y en a. Plein. Cependant, l’optimisation fiscale, comme celle qu’on a pu voir entre autre avec la fusion entre Pfizer et Allergan, ou encore ce qui explique le nombre important de minières enregistrées au Canada, rend opaque nos réels moyens, ici comme ailleurs. Si dans vos fêtes familiales vous voulez parler de « fardeau » fiscal, ayez une petite pensée pour le poids plume sur le dos des multinationales.

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