Plan économique du gouvernement : priorité emploi?
9 octobre 2013
Le gouvernement du Québec a publié, hier, sa nouvelle politique économique « Priorité emploi ». La première ministre ainsi que son ministre des Finances constatent que l’accélération attendue de la croissance économique n’est pas au rendez-vous. Ils mettent donc de l’avant un plan de stimulation destiné à redynamiser l’économie québécoise afin de créer de nouveaux emplois.
Trop peu, trop tard, pourrions-nous dire. Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement Marois met en place des politiques d’austérité qui minent les chances de reprise. Bien que plusieurs intervenant.e.s aient prévenu le gouvernement à ce sujet, l’obsession du déficit zéro semble avoir été résolument trop forte pour prendre de bonnes décisions au bon moment.
L’annonce de cette semaine, bien que comportant certains aspects dignes de mention, ne peut effacer l’imprévoyance qui a marqué les 13 premiers mois de gouvernance économique de ce gouvernement. Les mesures d’austérité telles que les coupes dans les finances publiques ainsi que l’augmentation des taxes à la consommation et des tarifs (dégel du bloc patrimonial d’Hydro-Québec) ne seront malheureusement pas compensées par le plan gouvernemental.
Les détails du plan
Ce qui nous a été présenté est un plan d’investissement de près de 2 milliards de dollars. L’objectif est de créer, d’ici 3 ans, 43 000 emplois supplémentaires par rapport à ce qui était prévu au départ. Pour y arriver, le gouvernement propose les mesures suivantes :
- Investir dans la recherche et l’innovation (580,7 millions de dollars)
- Rendre les entreprises plus performantes (708,8 millions de dollars)
- Favoriser le développement des marchés d’exportation (82,0 millions de dollars)
- Miser sur l’électrification des transports (516,1 millions de dollars)
- Soutenir les rénovations vertes (111,5 millions de dollars)
Le Québec ayant perdu 45 400 emplois du mois de janvier au mois d’août, il est facile de comprendre pourquoi le gouvernement désire se montrer actif sur ce dossier. Particulièrement, si la rumeur est fondée à propos des autobus de campagne électorale qui seraient sur le point de sillonner nos routes.
Variation de l’emploi au Québec, 2013
Source: Institut de la statistique du Québec
Une dérive, un vœu pieux et un grand chantier
Trois éléments retiennent l’attention dans ce plan : 1) la volonté du gouvernement de mieux arrimer la formation de la main-d’œuvre aux besoins du marché, 2) l’idée selon laquelle de meilleures performances des entreprises se traduisent en emplois et en meilleurs salaires et 3) l’objectif d’écouler nos surplus énergétiques. Étrangement, ces trois éléments nous rappellent les priorités du gouvernement précédent.
Développer une société du savoir bénéficiant d’une main-d’œuvre qualifiée signifie, une fois que l’on épure le langage feutré du ministère, que l’on souhaite deux choses. D’abord que le savoir ne soit qu’une annexe de l’économie et que les programmes de formation devraient en priorité être destinés à remplir les besoins fluctuants et passagers de certains secteurs de notre économie (ex. : industrie du jeu vidéo, pharmaceutique, etc.).
Du côté des entreprises, personne ne peut être contre le fait de les rendre plus performantes. Le problème, c’est que depuis trente ans l’amélioration de la performance des entreprises québécoises, mesurée par les gains de productivité, n’a pas été bénéfique pour l’ensemble de la population. Pendant que l’IRIS démontrait la semaine dernière que le 1 % des plus riches a grandement profité de ces gains, on constate du même souffle qu’il en est tout autrement avec la rémunération de la majorité. Par exemple, les salarié.e.s québécois enregistrent, depuis trente ans, un retard systématique entre l’évolution de leur rémunération et celle de la productivité; retard qui leur coûte plus ou moins 6 000 $ sur une base annuelle.
Pour finir, le plat de résistance de ce plan est la stratégie gouvernementale d’électrification des transports. Il s’agit évidemment d’une idée novatrice et intéressante. Le Québec produit de l’électricité en surabondance et utiliser cette ressource afin de mettre en place des réseaux de transport, comme des monorails ou le prolongement du métro, est une initiative à saluer. Ceci étant dit, et malgré tout le vernis écologique de ce genre de projet, il est tout de même inquiétant de constater qu’il pourrait se réaliser au prix d’une surexploitation et du défigurement de notre territoire.
Notons aussi que le présent gouvernement maintient le cap en ce qui concerne l’ouverture du Nord de la province aux entreprises minières en plus d’ouvrir la porte à l’extraction du pétrole sur l’Île d’Anticosti… Pour dire les choses comme elles sont, la perspective environnementale de cette politique économique ne vaut, au final, peut-être pas beaucoup plus que le papier sur lequel elle est imprimée.