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PPP : l’effoirement

3 décembre 2014

  • Guillaume Hébert

La consistance des partenariats public-privé (PPP) ramollit tellement vite qu’on se demande combien de temps encore pourra survivre cette rhétorique pâteuse dans le débat public. Depuis que l’IRIS a publié une note socio-économique favorable à l’interruption des PPP des CHUs montréalais, les mauvaises nouvelles continuent de venir s’abattre sur le corps déjà inerte de cette mauvaise méthode de gestion de fonds et d’infrastructures publics.

D’abord, il y a le rapport du Vérificateur général de Colombie-Britannique qui a attiré l’attention sur les taux d’intérêt disproportionnés que paie cette province canadienne pour les contrats attribués en PPP. Ces taux vont de 4,42% à… 14,79%, pour une moyenne cumulative de 7,5%. Pendant ce temps, les emprunts contractés par le gouvernement de façon conventionnelle lors des deux dernières années ont été obtenus en moyenne à 4% d’intérêt.

En France, le 13 novembre dernier, un tribunal administratif a annulé la décision du ministère de l’Écologie de recourir au PPP pour la construction et l’entretien de 63 « centres d’entretien et d’intervention sur les routes nationales ». Le juge a conclu que les motifs invoqués par l’État n’étaient pas convaincants et a ordonné la résiliation du PPP qui devait durer 28 ans et coûter 355 millions d’euros.

Cette histoire n’est pas sans rappeler l’épisode lamentable des haltes routières au Québec. L’État québécois pourrait avoir à verser près de 50 millions au partenaire privé pour une structure dans laquelle ce dernier n’a investi que 35 millions. Suite à un désaccord sur le versement de certaines primes de performance, le partenaire avait tout bonnement déclaré faillite, s’ajoutant ainsi à la liste des PPP qui se terminent avec un partenaire privé qui s’éclipse et qui laisse le public ramasser les pots cassés. Rappelons que l’État avait garanti les prêts du partenaire privé, ce qui invalide à nouveau l’argument selon lequel un PPP permet de transférer les risques au secteur privé.

Et si on revient aux CHUs, une entrevue réalisée par La Presse avec David Culver, l’ex-président du conseil d’administration du CUSM, est instructive sur le peu d’attrait de la formule du PPP. Culver y affirme que c’est le gouvernement qui avait imposé ce mode de fonctionnement qu’il trouvait lui-même inapproprié : «Un hôpital n’est pas une autoroute ou un entrepôt».

Si un fiasco proportionnel à celui des haltes routières devait subvenir dans le cas des CHUs en PPP, les finances publiques du Québec pourraient en porter les marques pour très longtemps. Les montants des paiements unitaires que devra verser l’État n’ont toujours pas été dévoilés. En revanche, l’agence de notation Moody’s s’est mêlée du dossier en émettant un « avertissement intermédiaire de perspective négative » sur le projet qui prend du retard. Les investisseurs attendent impatiemment le rendement de 6,7% qu’on s’est engagé à leur verser.

Au moment où les mauvaises expériences de partenariats public-privé nous proviennent de partout, on a l’impression que le gouvernement québécois s’obstine à jouer avec le feu. Les dernières défenses des PPP ne convainquent plus, comme lorsqu’on entend le ministre des Transport Robert Poëti nous dire qu’il pourrait continuer avec la formule parce qu’on a déjà vu, au Québec, une fois, un moment donné, un projet qui n’a pas viré au fiasco…. (le ministre se réfère au pont de la 25, pourtant loin d’être un résultat sans tache).

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