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PKP : l’entrepreneur providentiel

18 mars 2014

  • Philippe Hurteau

La semaine dernière, un coup de tonnerre a résonné dans une campagne électorale jusque-là calme et terne. Pierre-Karl Péladeau sera candidat pour le Parti Québécois dans Saint-Jérôme! Cette annonce choc a provoqué une chaîne de réactions. De la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) en passant par l’Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques (IGOPP), chacun a exprimé ses inquiétudes liées à cette candidature. Des questions, des doutes et des craintes apparaissent tout naturellement suite à cette annonce : crainte de voir se fondre le rôle de magna des communications dans celui d’homme politique ou incrédulité face à la candidature d’un patron ayant eu recours 14 fois au lock-out afin de contraindre ses employé-es à se plier à ses exigences.

Si le Parti Québécois voulait faire du bruit avec cette annonce, mission accomplie. Tout le vacarme autour de la candidature de PKP ne manque pourtant pas de laisser un goût amer. Pas vraiment en raison de la personne du candidat, mais bien parce qu’elle révèle sans ambiguïté le piédestal sur lequel nous plaçons, au Québec, nos grands entrepreneurs.

La figure du sauveur

De la même manière que le retour de François Legault en politique, l’annonce de la semaine dernière laisse présager un retour en force du Québec Inc. sur la scène publique. Au-delà des dénonciations qui voient dans l’arrivée de PKP le triomphe personnel d’un patron au sombre bilan en matière de relations de travail et qui a influencé fortement le virage sensationnaliste des médias québécois, il convient  d’interroger la figure de sauveur dans laquelle se drape la recrue du PQ.

Comme mes collègues de l’IRIS et moi le répétons fréquemment sur ce blogue, le bilan des 30 dernières années est loin d’être reluisant : augmentation de l’endettement des ménages, élargissement des écarts de richesse, explosion des revenus du 1 %, etc. Tout cela n’est pas le résultat du hasard ou d’une action de la Providence, mais bien la conséquence de la priorisation systématique des intérêts des grands représentants du Québec Inc. sur ceux du reste de la population.

Célébrer aujourd’hui l’entrée en scène de PKP, c’est donc aussi célébrer la tendance au creusement des inégalités. Notre salut, tant économique que social, viendrait de l’action dynamique de quelques figures d’exception. Pour le monde ordinaire, ne resterait qu’à suivre et à applaudir.

Patronat et structure sociale

Que trouve-t-on lorsque l’on fouille sous l’apparence de cette figure de l’entrepreneur salvateur dont PKP est devenu l’emblème? Sans surprise, nous découvrons des rapports de pouvoir et d’exploitation. L’explosion des revenus du 1 % et la stagnation des revenus du reste de la population est le produit de structures sociales fortement hiérarchisées dans lesquelles la richesse n’a pas grand-chose à voir avec le mérite, mais plutôt avec la place que chaque personne y occupe. C’est plutôt cela le vrai visage de nos grands capitaines d’industrie.

Ce que révèle la candidature de PKP et le vent d’enthousiasme que celle-ci a générée c’est en fait notre incapacité collective à comprendre les rapports de pouvoir de notre propre société. Un patron n’est pas un créateur de richesse, tout comme il n’est pas un pourvoyeur d’emplois. Notre économie, pour exister et prospérer, n’est pas dépendante de ces êtres providentiels, mais bien du travail de tous et toutes. Il ne sera pas  possible de comprendre le développement inégalitaire de notre structure économique – et encore moins de tenter de la corriger – tant et aussi longtemps que nous irons chercher des sauveurs encensés en raison de leur réussite dans le monde des affaires.

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