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Peuples autochtones au Québec : des inégalités qui doivent être corrigées

25 janvier 2018

  • Julia Posca

Chaque jour depuis six mois, des témoignages nous parviennent de la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec, présidée par le juge à la retraite Jacques Viens. Rappelons qu’à l’automne 2015, l’émission Enquête avait rencontré des femmes autochtones de Val-d’Or témoignant des sévices et des abus perpétrés à leur endroit par des policiers de la Sûreté du Québec. Analysant les dossiers que lui avait transférés le Service de police de la ville de Montréal en lien avec ces allégations, le Directeur des poursuites criminelles et pénales avait décidé, un an plus tard, de ne pas porter d’accusations contre ces policiers.

C’est peu de temps après cette décision que le gouvernement de Philippe Couillard avait mis sur pied la Commission Viens, dont le mandat est d’enquêter sur des possibles pratiques discriminatoires qui ont cours envers les Autochtones lors de la prestation de certains services publics. Le juge Viens a jusqu’au 30 novembre 2018 pour rendre son rapport final.

La Commission entendait lundi une ancienne travailleuse sociale ayant fait de l’intervention dans les communautés de Lac Simon et de Kitcisakik en Abitibi-Témiscamingue. Celle-ci a souligné que la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) avait une attitude discriminatoire envers les familles autochtones, puisque les employés de l’organisme ne tenaient généralement pas compte de la réalité autochtone dans leur appréciation des dossiers qui leur étaient soumis. Cela expliquerait le haut taux d’enfants autochtones confiés à la DPJ.

La semaine dernière, une citoyenne de Manawan a évoqué le traitement des plaintes pour agressions sexuelles, dont la lenteur en décourage plusieurs à briser le silence et nuit, ultimement, à la confiance des femmes autochtones envers le système judiciaire et en son efficacité à répondre à leurs requêtes.

Ensemble, ces récits tissent la toile de la discrimination systémique vécue par les Autochtones au Québec. À cet effet, les inégalités qui séparent les peuples autochtones du reste de la population illustrent avec force cette situation, comme en fait état une note que l’IRIS a publiée la semaine dernière. Les Premières Nations, les Métis et les Inuit demeurent, si l’on se fie aux plus récentes données disponibles, désavantagés à tous points de vue par rapport aux non-Autochtones.

Plus du quart (27 %) d’entre eux n’ont aucun diplôme ou grade. À 12,1 %, leur taux de chômage est deux fois plus élevé que celui du reste des adultes québécois âgés de 25 à 64 ans. Le revenu après impôt médian des Autochtones au Québec était de 25 386 $ en 2015, soit un revenu 14,3 % moins élevé que celui des non-Autochtones. Une telle condition économique n’est pas étrangère aux piètres conditions de vie de ces communautés. En effet, près d’un Autochtone sur cinq vit dans un logement délabré, contre moins de 7 % de la population non-autochtone. Dans les communautés (communément appelées réserves), c’est plus d’un Autochtone sur trois qui se trouve dans cette situation. De plus, 12 % d’entre eux, et même 40 % des Inuit, ont accès à des aliments dont la qualité ou la quantité ne garantit pas une alimentation saine (contre seulement 6 % dans le reste de la population). Ajoutons enfin qu’au Canada, les Autochtones sont plus nombreux à être victimes de crimes, dont des crimes violents (28 % contre 18 %). Pire, le fait d’être Autochtone augmente les chances pour une femme d’être victime de violence conjugale et de diverses autres infractions pouvant aller jusqu’au meurtre.

Devant un constat si affligeant qui permet de comprendre en partie les mobilisations autochtones des dernières années, on ne peut rester les bras croisés. Le travail présentement effectué par la Commission Viens prend ici tout son sens. En effet, l’accès aux services publics est un moyen efficace de lutter contre les inégalités vécues par certains groupes de la population. Il importe donc de corriger la situation actuelle et de s’assurer que les Autochtones puissent compter sur des services publics de qualité et accessibles, mais aussi adaptés à leurs réalités particulières.

Afin d’éviter de reproduire les schèmes colonialistes du passé, il faudrait que les programmes et services gouvernementaux qui les touchent soient conçus en collaboration avec les peuples autochtones. En ce sens, il importe de respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, dont est maintenant signataire le Canada, afin de permettre aux Premières Nations, aux Métis et aux Inuit de déterminer par eux-mêmes les meilleurs moyens de réaliser leur subsistance et leur émancipation.

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