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Le FMI contre le néolibéralisme?

31 mai 2016


Dans le plus récent Finance and Development, le magazine du Fonds Monétaire International (FMI), trois chercheurs du FMI signent un texte au titre étonnant : Neoliberalism : Oversold?. Les chercheurs qui, comme à l’IRIS, ont une posture critique face au néolibéralisme depuis un moment vivent toujours une satisfaction un peu malsaine à lire ce genre d’articles. L’envie de crier : « On vous l’avait bien dit! » aux deux lignes, par exemple. Cela dit, le FMI n’a pas, en lui-même, plus de crédibilité aujourd’hui quand il doute du néolibéralisme qu’hier quand il l’imposait dans certains pays de la planète. Il est néanmoins intéressant de voir quels chemins parcourent les chercheurs pour trouver aujourd’hui des défauts à cette doctrine qui hier séduisait tant leur organisation.

Notons, d’ailleurs, qu’ils sont toujours en faveur des idées générales du néolibéralisme, comme le montre cette citation : « There is much to cheer in the neoliberal agenda. The expansion of global trade has rescued millions from abject poverty. Foreign direct investment has often been a way to transfer technology and know-how to developing economies. Privatization of state-owned enterprises has in many instances led to more efficient provision of services and lowered the fiscal burden on governments. »

Néanmoins, ils attaquent deux thèses chères au néolibéralisme : le bienfait que représenterait l’ouverture des frontières aux flux de capitaux et ceux des mesures d’austérité et de réduction de l’endettement public. Petit résumé de leur texte.

Les risques des mouvements de capitaux

Si les chercheurs du FMI souscrivent à l’idée que certains mouvements de capitaux sont bénéfiques pour les économies qui ouvrent leurs frontières (comme les investissements directs étrangers, par exemple), ils soutiennent que d’autres types de mouvements de capitaux sont beaucoup plus risqués. Les placements, les transactions bancaires et les transferts spéculatifs de dette n’ont aucun lien démontré avec une croissance économique.

Par contre, les chercheurs nous indiquent que les coûts associés aux risques qu’apporte l’ouverture des frontières aux flux de capitaux sont bien clairs. Ils montrent que sur 150 investissements massifs de capitaux dans des pays en voie de développement, 20% sont loin d’avoir aidé le pays visé, ils ont plutôt été à l’origine de crises financières. Non seulement, l’ouverture des frontières est un facteur de risque établi dans l’apparition de ces crises, il est aussi démontré que cette mesure augmente les inégalités de revenus. Deux phénomènes qui deviennent encore plus néfastes lorsqu’ils sont conjoints.

Les trois chercheurs vont jusqu’à dire : « capital controls are a viable, and sometimes the only, option when the source of an unsustainable credit boom is direct borrowing from abroad ». Le FMI en faveur du contrôle des capitaux, c’est comme si Françoise Bertrand nous proposait d’imposer davantage les entreprises, on croit rêver.

Réduire la dette peut faire plus de tort que de bien

S’il semble évident pour les chercheurs que les pays en crise doivent réduire leur dette, ils posent la question : les pays développés doivent-ils faire des efforts particuliers pour que leur ratio dette/PIB soit plus bas? En fait, une diminution substantielle du niveau de la dette publique aurait des effets très limités sur les risques de crise économique. Au bout du compte, les coûts de réduire la dette, soit par une réduction des investissements publics, soit par la mise en place de nouveaux modes de taxation, sont, eux, très élevés. Les chercheurs arrivent à une conclusion claire : « Faced with a choice between living with the higher debt—allowing the debt ratio to decline organically through growth—or deliberately running budgetary surpluses to reduce the debt, governments with ample fiscal space will do better by living with the debt. » Il semblerait que les gouvernements du Québec de la dernière décennie n’aient pas reçu ce mémo, eux qui ont entassé dans un fonds de réduction de la dette plusieurs milliards de dollars.

Ce n’est pas tout, les mesures de réduction de la dette auraient des effets désavantageux pour l’économie. Un peu plus on croirait qu’on est en train de lire une étude de l’IRIS. En effet, les chercheurs du FMI nous disent qu’une baisse du ratio dette/PIB de 1% fait augmenter le chômage de 0,6% et l’indicateur de Gini (qui mesure les inégalités) de 1,5%.

Je suis persuadé que les peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine à qui le FMI a imposé ses plans d’ajustements structurels vont trouver très intéressantes les conclusions de cet article. Il serait peut-être bon que nous ne répétions pas ici les mêmes erreurs.

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