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La transition juste est à notre portée : l’histoire le prouve

3 mars 2021

  • NV
    Nicolas Viens

La crise climatique et les appels en faveur d’une transition écologique suscitent des craintes quant aux conséquences qu’ils pourraient avoir sur les travailleurs et les travailleuses des secteurs visés. Certains affirment que les mesures prises pour réduire nos émissions de gaz à effets de serre (GES) et faire face aux changements climatiques, en faisant disparaître plusieurs emplois, auront un impact négatif sur certaines communautés et sur l’économie en général.

Une nouvelle étude de l’économiste Jim Stanford puise dans l’histoire économique récente pour remettre en perspective ces craintes. Stanford analyse les principales transitions ouvrières ayant eu lieu au Canada dans le passé. Il identifie sept transformations industrielles majeures et montre comment la transition requise à l’heure actuelle – liées aux énergies fossiles – peut s’inspirer du passé.

Certaines de ces transitions historiques ont entraîné une transformation majeure de la configuration de l’économie canadienne. C’est le cas de l’exode rural vers les villes au début du XXe siècle ou de la hausse rapide du nombre de femmes sur le marché du travail dans la foulée de la Deuxième Guerre mondiale. Entre les années 1990 et 2010, plusieurs régions du pays ont aussi souffert du déclin d’industries importantes, dont le secteur manufacturier au Québec et en Ontario (en particulier l’industrie de l’automobile), les pêcheries dans les Maritimes, ou encore le secteur forestier dans l’Ouest canadien.

Chaque province est néanmoins ressortie de ces crises avec une économie plus forte. En effet, dans l’ensemble, malgré certaines perturbations socioéconomiques à court terme, Stanford montre que les conséquences négatives des transitions passées ont largement été compensées par les bénéfices qui ont suivi. Les nouvelles industries qui sont apparues au fil du temps, les politiques de restructuration et le soutien de l’État ont amené davantage d’investissements et de technologies dans les régions touchées. Cette évolution a généré de meilleurs emplois nécessitant des travailleurs et des travailleuses plus instruit·e·s. « Ultimement, les Canadien·ne·s sont sorti·e·s gagnant·e·s de la transition en profitant d’une hausse de la productivité et des revenus, d’emplois plus intéressants, d’une vie plus saine et plus gratifiante » (traduction libre, p. 44).

Ces crises auraient toutefois pu être mieux gérées. Stanford explique que les industries en déclin « auraient dû être soutenues par une stratégie industrielle plus équilibrée et plus clairvoyante » (p. 48), au lieu de faire simplement l’objet de mesures réactives lorsque le déclin était déjà amorcé. Il s’agit d’une leçon qui, espère Stanford, permettra cette fois-ci de minimiser les effets négatifs potentiels de la transition écologique à venir.

En somme, bien que la transition écologique juste représente un défi important, différentes régions canadiennes ont déjà connu ce type de transformations dans le passé. Même si l’ampleur des effets de chaque transition varie, Stanford démontre que leurs conséquences sur l’économie sont souvent surestimées. Surtout, l’analyse des transformations ouvrières précédentes révèle que l’élément fondamental pour une transition réussie est d’abord une préparation adéquate à ces changements. « Lorsque les transitions sont annoncées et planifiées à l’avance, quand les travailleurs et les travailleuses bénéficient d’un soutien généreux et d’une aide à l’adaptation, et lorsque des engagements forts sont pris pour la création d’emplois alternatifs, ces transitions peuvent se produire sans pertes d’emplois importantes et involontaires, et sans perturbations sévères des communautés », écrit Stanford. « Le marché du travail canadien, ainsi que l’environnement du pays, en sortiront tous deux plus solides » (p. 5-6). En somme, revisiter les transitions économiques du passé nous enseigne qu’elles relativement fréquentes et qu’elles sont tout à fait gérables.

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