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L’habit neuf du Docteur austérité

30 janvier 2016

  • Philippe Hurteau

Le premier ministre vient tout juste d’opérer un important remaniement de son cabinet. Plusieurs ministres changent de portefeuille. Coiteux quitte le Conseil du trésor pour aller aux Affaires municipales et à la Sécurité publique. Il sera remplacé par Sam Hamad, tandis que Dominique Anglade se retrouve à l’Économie et que Pierre Moreau prendra les rênes de l’Éducation. On le sent, Philippe Couillard veut faire peau neuve.

Son but : mettre deux ans d’austérité derrière lui et se concentrer sur la prospérité.

Nous serions donc à la fin d’une période de turbulences. L’avenir serait rempli de promesses qui n’attendaient que l’équilibre budgétaire pour se réaliser.

Cette vision pour le moins idyllique, toute charmante qu’elle soit, n’arrivera malheureusement pas à masquer la froide réalité. Le Québec n’est pas économiquement plus fort aujourd’hui qu’il y a deux ans.

L’austérité au-delà de l’équilibre budgétaire

Depuis l’arrivée au pouvoir de Philippe Couillard, son gouvernement a imposé pour 4G$ de coupes et de compressions. En santé et en éducation seulement, on parle de coupures qui atteignent les 2 G$.

Alors oui, la turbulence des grandes annonces de compressions est derrière nous. Le problème, c’est que l’austérité ne se vit pas en temps réel. Quand le gouvernement décide de couper dans un programme, les effets de ces coupures ne sont pas immédiats. C’est donc cette année que l’austérité sera effectivement plus durement ressentie. Pas en 2014 ou en 2015. La turbulence, quoi qu’en dise ou en pense le premier ministre, a encore de beaux jours devant elle.

Non seulement les pires effets de l’austérité restent encore à voir, mais il faut rappeler, ce que personne à Québec ne fait, que les montants qui furent amputés aux budgets des différents services à la population ne sont pas destinés à être rétablis.

En clair, les conséquences de l’austérité seront  à l’ordre du jour pour encore de longues années. Le décrochage entre les besoins de la population et le financement des services est là pour rester, ce qui nous laissera avec des écoles, des hôpitaux et des CHSLD systématiquement sous-financés.

Stratégie pré-électorale

Et tout ça pour quoi? Pour offrir des baisses d’impôt!

Il est là le problème. L’austérité, ce n’est pas qu’une mauvaise période à passer, c’est un état permanent de compressions. Avec le retour à l’équilibre budgétaire et le dégagement de surplus budgétaires, soyez assurés que le gouvernement ne se pressera pas pour refinancer adéquatement ses programmes. Il en profitera pour baisser les impôts.

Ce faisant, il fragilisera encore un peu plus les finances de l’État à long terme – justifiant de prochaines vagues de coupures – tout en offrant un « beau » cadeau à l’électorat à la vieille de la prochaine campagne électorale. La petite politique, celle qui produit le cynisme, est résolument au cœur de la stratégie de M. Couillard.

Le Québec et sa dépendance économique

Lorsqu’on écoute le premier ministre, on reste avec l’impression que le Québec serait au seuil d’un nouveau départ économique. Pourtant, aucune vision ne se dégage de l’action du gouvernement.

Non seulement n’a-t-il rien fait depuis deux ans au plan de la relance économique, sauf bien sûr surfer sur la fragile reprise étasunienne, mais rien ne nous indique qu’un plan adéquat pour répondre aux défis économiques soit à l’ordre du jour.

Hier encore la Banque de développement du Canada (BDC) nous apprenait que les PME québécoises n’allaient pas investir davantage en 2016 qu’en 2015. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’en ce domaine, comme pour bien d’autres, « l’effet libéral » se fait toujours attendre.

En fait, quand Philippe Couillard nous parle de stratégie économique, il ne trouve rien de mieux à faire que de ressortir le vieux Plan Nord de Jean Charest ou de copier la stratégie maritime de la CAQ. Dans ces deux cas, nous attendons toujours le moindre résultat.

Pendant ce temps, rien n’est fait pour stimuler le secteur manufacturier ou pour stimuler le développement de la transition écologique de l’économie et aucune proposition fiscale n’est apportée pour lutter contre les inégalités.

L’avenir tranquille qu’annonce Philippe Couillard sera en fait très similaire au passé. Le gouvernement du Québec aura comme seule ambition économique d’attirer et de faciliter des investissements privés. Au final, le Québec sera encore dépendant des marchés mondiaux et du cours des ressources naturelles. Et comme on le voit avec l’exemple des PME, nous risquons d’attendre longtemps après les investissements privés.

Comme vision d’avenir, on fait mieux.

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