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Il faut planifier la transition juste

3 mars 2025

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Dans un article récent de La Presse, le journaliste Philippe Mercure présentait un débat lors duquel le maire de Petit-Saguenay, Philôme La France, plaidait pour une intervention de l’État pour guider une transition écologique juste. Dans une lettre ouverte publiée dans Le Devoir Victor Beaudet-Latendresse s’étonne que la gauche québécoise puisse frémir devant une montée de tarifs douaniers, alors même qu’elle a mis beaucoup d’effort par le passé pour bloquer les traités actuellement mis à mal. Ces questions sont bonnes ; le débat, nécessaire.

On sait déjà que la trajectoire économique actuelle au Québec n’est pas soutenable. Il faut opérer un virage important pour la ramener dans des bornes environnementales, un virage qui devient de plus en plus coûteux et difficile à mesure que le temps passe.

Victor Beaudet-Latendresse a raison, l’imbrication de l’économie du Québec dans des chaînes de production internationale constitue une contrainte importante à une telle transition. Difficile de changer le maillage économique quand on dépend en large mesure de ce qui se passe ailleurs. Bien entendu, une hausse soudaine de barrières tarifaires à des effets perturbateurs importants à court terme. Mais à moyen terme, cela peut constituer une condition de possibilité pour une transformation de l’économie en vue d’une transition socioécologique.

Le système capitaliste, dynamique et expansif, tend naturellement vers l’utilisation la plus grande possible des ressources disponibles. Les entreprises, soumises à un impératif de profitabilité, tentent constamment de refiler une part de leur coût d’exploitation au reste de la société, notamment sur le plan environnemental en polluant et en émettant des gaz à effet de serre. Les consommateurs n’ont pas la capacité individuelle de propulser un changement puisqu’ils sont soumis à une structure de production qui détermine les possibilités de consommation. Par conséquent, le système actuel n’opérera pas de lui-même une transition socioécologique.

Pour qu’elle advienne, une telle transition doit être planifiée. Il faut faire un inventaire des ressources disponibles, des usages possibles de ces ressources et des impacts environnementaux de l’activité économique à différentes étapes. Il faut prioriser les besoins de la population et s’assurer que notre économie peut les combler. En clair, il faut avoir une vision globale des circuits économiques, de l’extraction des matières premières à la fin de vie des produits, en passant par la production et la consommation.

Comme le souligne le maire de Petit-Saguenay, cette planification doit se faire à l’échelle du Québec, elle ne peut être réalisée à partir des villes et villages. Cela n’implique pas pour autant une reprise en main par l’État de l’activité économique. On peut très bien concevoir la gestion des ressources naturelles par les collectivités concernées et la production effectuée par des coopératives. De même, on peut envisager des prises de décisions démocratiques à propos des investissements importants. Mais il faut se débarrasser de l’impératif de profitabilité qui pousse à une croissance extensive constante des activités économiques, avoir une coordination d’ensemble et surtout avoir le contrôle sur l’activité économique afin que des processus alternatifs, écologiques et socialement constructifs puissent voir le jour et devenir pérennes.

Un tel degré d’autonomie économique s’imagine mal en régime de libre-échange. L’idée n’est pas de viser une autarcie aussi peu souhaitable que réaliste, mais de se réapproprier la politique commerciale pour en faire un outil de transition. Pourquoi ne pas soumettre les échanges économiques à des impératifs sociaux et environnementaux? Pourquoi ne pas saisir la chance d’opérer la nécessaire transition de l’économie de manière calculée et contrôlée? Il est temps que des acteurs sociaux et politiques proposent une planification de la transition écologique et économique avant que le changement s’impose de lui-même de manière chaotique.

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