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Baisses d’impôt : quand 8 % de la population s’accapare 25 % de la cagnotte

5 avril 2023

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3min

  • Philippe Hurteau

Le 21 mars dernier, le gouvernement concrétisait une promesse phare de la dernière campagne électorale en baissant l’impôt des particuliers d’un montant équivalent à 1,7 G$ dès cette année. Passons sous silence le débat sur l’opportunité d’aller de l’avant avec cette annonce et de dilapider ainsi de précieuses ressources qui auraient dû servir au refinancement des services à population. Concentrons-nous plutôt sur un aspect bien précis du discours de légitimation mis de l’avant par Québec depuis deux semaines, soit que la classe moyenne serait la grande gagnante de cette mesure.

L’impôt est un puissant outil de répartition de la richesse. C’est un fait connu dont la mécanique sous-jacente est assez simple : en ajustant la contribution demandée des citoyens et des citoyennes en fonction de leurs revenus, il est possible d’adoucir les inégalités sociales. Le résultat attendu est que ceux qui gagnent plus contribuent plus en proportion de leurs revenus, donnant ainsi corps à un principe de proportionnalité qui permet la redistribution des ressources du haut de la pyramide sociale vers le bas de celle-ci.

Réduire le taux d’imposition des deux premiers paliers d’imposition, comme le fait l’actuel gouvernement, revient donc à affaiblir ce mécanisme.

Plus qu’un débat de chiffres

Pour maquiller ce fait tout simple, l’équipe du ministre des Finances s’est donc mise à l’œuvre. Au ministère, on se doutait bien des critiques qui allaient venir : ces baisses d’impôt sont injustes, les plus riches recevront 814 $, les plus pauvres rien du tout et les contribuables de la classe moyenne autour de 312 $. Pour nous aider à détourner le regard, le budget comprenait les éléments de justification suivants : la moitié de la baisse d’impôt sera accordée aux contribuables ayant des revenus inférieurs à 72 500 $.

Si cette affirmation est vraie, elle masque pourtant une autre réalité : ces contribuables, qui auront le plaisir de bénéficier de la moitié de la cagnotte que représentent les baisses d’impôt, forment 83 % de tous les contribuables!

Il est donc faux de les présenter comme les principaux bénéficiaires d’une mesure qui est en fait construite pour d’autres qu’eux. Prenons le seuil de 100 000 $ de revenu annuel comme niveau de démarcation (98 540 $ pour être plus précis). Que trouvons-nous?

92 % des contribuables touchent des revenus inférieurs à 100 000 $. Tous ensemble, ils recevront 75 % du total de la baisse d’impôt. Au-dessus de 100 000 $ se trouvent les autres contribuables qui, bien que ne représentant que 8 % de l’ensemble, toucheront 25 % du pactole annoncé.

En moyenne, les personnes ayant des revenus inférieurs à 100 000 $ recevront donc 199 $ en allégement. Pour ceux dont les revenus sont au-dessus de ce seuil, nous arrivons au fameux 814 $ dont les médias ont fait largement mention.

Au-delà du débat de chiffre, un fait demeure : une fois ce budget voté et appliqué, notre capacité collective à redistribuer la richesse sera amoindrie. Voilà ce que le gouvernement se garde bien d’expliquer.

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2 comments

  1. L’article est bien intéressant mais j’aurais aimé voir la démonstration de ce qu’il dit.

  2. Effectivement… l’impôt est un puissant outil de répartition de la richesse: plus aux riches, moins aux autres!

    Quand on sait que 25% du budget de la province finance le BS corporatif, ça nous ferait un “petit” 25,000,000,000$” récupéré.

    – Si l’état ne collectait des impôts que des employeurs, plutôt que de tout le monde, ça ferait une sacré économie des frais d’opération du ministère du revenu. Les employés recevraient leur salaire net et n’auraient pas de rapport d’impôt personnel à faire.
    – Si les impôts étaient payés par les noms commençant par “A” et”B”en janvier, les “”C” et les “D” en février, etc, on aurait droit à une autre économie de deniers publics.
    – Si le gouvernement ne versait que des montants non imposables à qui de droit on aurait encore une source d’économie des ressources publiques.
    – Si on avait le revenu de citoyenneté, tel que proposé par Chartrand et Bernard, tous auraient accès aux biens premiers.

    Etc.

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