Économie d’énergie : il est temps de faire mieux
22 février 2021
Ce 25 février 2021, Hydro-Québec doit faire part à la Régie de ses réflexions quant aux meilleurs moyens de répondre à la demande de sa clientèle. Les résultats de cette réflexion pourraient modifier substantiellement certains aspects de sa stratégie d’approvisionnement.
Depuis plusieurs années, Énergir réussit à réduire ses ventes annuelles de 0,75% grâce à ses programmes d’économie d’énergie, tandis qu’Hydro-Québec peine à faire de même avec un maigre 0,25% de réduction. Bref, des « pinottes » comparativement entre autres aux États du nord-est américain qui réussissent à réduire leurs ventes annuelles d’environ 2%.
Jusqu’à maintenant, les dirigeants d’Hydro-Québec pouvaient s’appuyer sur les importants surplus d’électricité dont dispose l’entreprise pour ignorer leurs responsabilités en matière d’économie d’énergie et justifier leur manque d’ambition. En effet, d’un point de vue de gestion des approvisionnements en électricité, la société d’État pouvait contester l’urgence d’économiser de l’électricité puisqu’on laissait parfois passer l’eau des barrages tellement les surplus étaient importants.
Or, avec les efforts en matière d’électrification, ce ne sera bientôt plus le cas. Selon les derniers rapports, les surplus d’électricité auront disparu en 2026. Hydro-Québec s’apprête d’ailleurs à lancer un appel d’offres à cet effet dès cette année pour des livraisons d’électricité en 2026.
Pendant ce temps, un énorme potentiel d’économie d’énergie d’environ 30 TWh, soit l’équivalent de la consommation annuelle de l’agglomération de Montréal, demeure presque inexploité. Ces économies potentielles sont composées de mesures de lutte contre le gaspillage énergétique telles que l’amélioration de l’isolation des maisons ou l’amélioration de procédés industriels. Au cours des dix dernières années, Hydro-Québec n’aura qu’à peine effleuré ce potentiel. Pourtant, le kilowattheure économisé par ces programmes n’a coûté que 1,5 cent à la société d’État en 2019, alors que les coûts de production moyens sont de 2 sous et que le coût de production marginal est de 6 sous. Il est donc plus rentable pour la société québécoise de favoriser l’économie d’énergie avant tout autre mode de production d’énergie, même l’énergie renouvelable.
Qui plus est, l’énergie économisée est, de loin, la plus propre et la moins chère des énergies. Pourtant, il y a des chances que l’appel d’offres de 2026 soit remporté par TransCanada Energy avec sa centrale au gaz naturel de Bécancour. Si c’était le cas, les émissions de GES de la province pourraient croître de plus de 2%, soit l’équivalent d’environ 400 000 voitures.
Hydro-Québec ne peut davantage justifier la faiblesse de ses objectifs d’économie d’énergie par les surplus qui dorment dans ses réservoirs. L’électrification des transports, bâtiments et procédés au Québec nécessitera de 125 à 185 TWh d’énergie. Avant de démarrer des centrales thermiques polluantes, de harnacher de nouvelles rivières ou d’ériger des éoliennes, la logique économique dicte que nous économisions d’abord ce qui est rentable d’économiser. Cela pourrait très bien contribuer à la relance économique post-covid tout en évitant de gaspiller nos ressources.
Dans les années 2000, Hydro-Québec a d’ailleurs démontré qu’elle pouvait être un exemple à suivre en matière d’économie d’énergie. Or, dans le plan d’approvisionnement déposé l’an dernier par Hydro-Québec, les objectifs en matière d’économie d’énergie pour les 10 prochaines années semblent toujours manquer d’ambition. Il est temps de travailler à mettre en place des mesures et des objectifs permettant de percevoir le gaspillage énergétique du Québec comme une ressource à exploiter plutôt qu’un fait accompli.
Lorsqu’elle travaillait chez Énergir, Sophie Brochu, la nouvelle PDG d’Hydro-Québec, a démontré sa détermination à favoriser les économies d’énergie. À quelques semaines de l’étude par la Régie de l’énergie du nouveau plan établissant la stratégie d’approvisionnement d’Hydro-Québec pour la prochaine décennie, souhaitons qu’elle transpose ces mêmes ambitions chez son nouvel employeur.
Ce billet est d’abord paru sous forme de lettre dans l’édition du 22 février 2021 de La Presse+.
1 comment
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Cette analyse me rejoint parfaitement, oui l’économie d’énergie et des programmes pour favoriser l’isolation des bâtiments.
J’ai la même logique pour l’eau potable.