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Une voie d’avenir raisonnable et nécessaire

14 mai 2018

  • Bertrand Schepper

En avril dernier, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) rendait public son premier rapport sur ses investissements durables. Elle s’engage à augmenter ses investissements faibles en carbone de 8 milliards de dollars d’ici 2020 et à réduire de 25 % son empreinte carbone d’ici 2025.

Mais est-ce suffisant ? D’une part, les investissements durables à la CDPQ demeurent, même en atteignant ces cibles, une contribution congrue à son portefeuille. D’autre part, les investissements dans les énergies fossiles ont été peu payants dans les dernières années.

Ainsi, tant pour des raisons environnementales et sociales qu’économiques, il est temps pour la CDPQ de s’engager dans une véritable transition écologique.

Si la CDPQ se vante de ses bonnes intentions, elle reste bien silencieuse sur ses actifs en énergie fossile qui vont à l’encontre de ses beaux engagements. En effet, bien qu’elle ne fournisse pas de rapport sur ce type d’investissements, il est possible de les estimer à environ 11 milliards, ce qui représente un peu plus de 3 % de l’actif total de la CDPQ.

À deux vitesses

Cette transparence à deux vitesses montre bien l’attitude de la Caisse devant les investissements polluants. D’une main, elle soutient des mesures sobres en carbone – qui produisent néanmoins des gaz à effets de serre – alors que de l’autre, elle s’engage dans l’extraction et le transport des énergies les plus polluantes du monde, telles que le charbon ou le pétrole des sables bitumineux.

Le travail d’une main finit par défaire celui de l’autre. Il s’agit d’une belle tactique de relations publiques, d’une pauvre stratégie environnementale et d’une mauvaise stratégie financière.

En effet, la CDPQ a injecté d’importantes liquidités dans des compagnies exploitant ou transportant du pétrole des sables bitumineux canadiens. Celles-ci ont pourtant mal performé, contrairement aux divers autres marchés qui ont généralement connu une hausse. Ses investissements dans le pétrole ont donc eu un effet à la baisse sur les rendements de la Caisse.

Selon le groupe Recycle ta Caisse, la CDPQ a connu une perte se chiffrant entre 2,1 et 3,4 milliards. Avec la situation climatique actuelle, on peut s’attendre à voir ce scénario se répéter, puisqu’il est certain que les formes extrêmes d’hydrocarbures, comme le charbon ou les sables bitumineux, seront dévaluées.

Raisonnable et nécessaire

L’argument économique n’est pas le seul à prendre en compte. Au-delà des profits potentiels, il y a notre capacité à limiter la hausse des températures sous la barre des 2°C.

Pour y arriver, il faudrait s’abstenir d’extraire un tiers des réserves de pétrole, la moitié des réserves de gaz et un peu plus de 80 % du charbon de la planète. Il en va de notre survie.

De plus en plus d’institutions font le choix du désinvestissement quand il est question des combustibles fossiles.

C’est notamment le cas du fonds souverain norvégien, du fonds AXA, le troisième assureur au monde, ainsi que du fonds de la Banque mondiale qui, sous des formes diverses, s’éloignent des investissements en hydrocarbures.

Alors que le Québec s’est engagé à respecter l’accord de Paris sur le climat, son investisseur institutionnel, la CDPQ, se doit de réduire sa participation au réchauffement climatique. Pour ce faire, il faut suivre le mouvement grandissant du désinvestissement. Le premier pas serait de rendre publique l’information sur les projets polluants soutenus par la CDPQ pour ensuite évaluer comment en sortir. Ce serait un geste fort, au-delà des coups de marketing.

Ce billet est d’abord paru sous forme de lettre dans l’édition du 14 mai 2018 de La Presse.

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