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Politiques numériques : quatre enjeux pour la prochaine année

20 janvier 2015


Michael Geist, professeur à l’Université d’Ottawa, tient un blogue prolifique ainsi qu’une chronique au Toronto Star, qui analyse scrupuleusement les débats politiques concernant l’Internet et les technologies numériques, en particulier sur la scène fédérale. En début d’année, il a présenté quatre enjeux principaux en la matière qui devraient retenir l’attention des responsables politiques pour l’année 2015. Je les présente ici en français, en ajoutant quelques éléments de contexte pour en faciliter la compréhension :

1. L’accès universel à Internet. Le gouvernement canadien a publié l’année dernière sa stratégie numérique nationale qui incluait notamment un objectif de connectivité à Internet de 5 Mbit/s pour 98 % des citoyen.ne.s, d’ici 2019. Or, le débit de 5 Mbit/s n’est même pas considéré comme du haut débit dans plusieurs pays développés. En comparaison, mentionnons que l’Argentine s’est donné un objectif de vitesse d’Internet 10 Mbit/s… pour 2015! L’Europe s’est quant à elle donné un objectif de 30 Mbit/s pour 2020. De plus, comme la stratégie ne vise pas une couverture globale, cela signifie qu’environ 700,000 citoyen.ne.s canadiens n’auront même pas accès au débit visé de 5 Mbit/s d’ici 4 ans. Selon Michael Geist, le Canada devrait se doter d’un objectif de 10 Mbit/s, et viser à clairement à donner un accès Internet à tous les Canadiens et Canadiennes qui le souhaitent.

2. La protection de la vie privée. Le projet de loi S-4 sur la protection des renseignements personnels numériques a été introduit au Sénat l’année dernière. Du côté positif, il inclut différentes clauses qui obligent les entreprises à notifier leurs client.e.s en cas d’atteinte à la sécurité informatique, quand leurs informations personnelles ont pu être à risque. Cette loi permettrait cependant aux organisations et entreprises de divulguer les informations personnelles de leurs utilisateurs et utilisatrices, sans leur consentement, et sans mandat d’un juge. On sait que ces accès aux informations personnelles sont particulièrement problématiques à la suite des révélations d’Edward Snowden sur la surveillance électronique. Même la Cour suprême a jugé l’année dernière que les utilisateurs et utilisatrices d’Internet pouvaient raisonnablement s’attendre au respect de leur vie privée dans le cadre de leurs communications électroniques.

3. La distinction dépassée entre télécommunication et radiotélédiffusion. On le sait, le contexte actuel en est un de forte intégration verticale des communications. Or, les lois fédérales distinguent encore ces deux domaines d’activités qui sont pourtant étroitement liés. Ceci permet aux grandes entreprises de mettre à leur avantage cette régulation parcellaire. L’année dernière par exemple Netflix et Google ont refusé de reconnaître les compétences du CTRC pour réguler sur leurs activités télévisuelles, prétextant qu’ils n’étaient pas des télédiffuseurs, mais plutôt des sites web offrant du contenu vidéo. Cette confusion permet par exemple très difficilement au régulateur d’imposer à Netflix de diffuser du contenu canadien (ou québécois) ou encore de prélever une contribution financière qui pourrait servir au financement de la culture.

4. Gouvernement ouvert et accès à l’information. Le principe de « gouvernement ouvert » renvoie notamment à l’idée de rendre accessibles ses données publiques pour favoriser la participation citoyenne. Le gouvernement conservateur et en particulier le président du Conseil du trésor, Tony Clement, se sont exprimés fortement dans la dernière année pour ce principe, par exemple en publiant une version mise à jour du Plan d’action pour un gouvernement ouvert. C’est une très bonne chose. Michael Geist note toutefois que ce plan d’action ignore complètement la question centrale de l’accès à l’information. On sait en effet que le gouvernement conservateur contrôle fortement certaines informations, ce qui est plutôt en contradiction avec les principes d’ouverture et de transparence. Pour Michael Geist, et je partage tout à fait ce point de vue, une politique de gouvernement ouvert qui reste silencieuse vis-à-vis l’accès à l’information ne peut qu’être vouée à l’échec.

Une part importante de nos activités liées aux technologies numériques est régulée par le gouvernement fédéral. Il est donc important de garder l’œil sur ce qui se passe à Ottawa.

Pour lire l’article de Michael Geist : http://www.michaelgeist.ca/2015/01/new-year-offers-chance-hit-reset-button-digital-policies-2/

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