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De nouvelles institutions pour les aîné·e·s

3 juin 2020

Lecture

65min

  • Eve-Lyne Couturier

Le vieillissement de la population est un enjeu qui fait la manchette depuis des années. Des mises en garde incessantes ont été formulées quant aux effets de l’arrivée massive des baby-boomers à la retraite sur la croissance économique, le fonctionnement du système de santé et l’état du marché du travail. Les plus alarmistes ont même décrié l’arrivée imminente d’un « tsunami gris[1] » qui aurait des conséquences dévastatrices. Les aîné·e·s sont revenus dans l’actualité récemment avec l’épidémie de COVID-19 qui les affecte au premier titre. Non seulement sont-ils ceux qui ont le plus de risques de décéder s’ils contractent le virus, mais les lieux qu’ils habitent se révèlent des foyers de contagion. La situation actuelle est préoccupante, mais même avant le confinement, les personnes âgées rencontraient des défis particuliers pour réussir à obtenir les services auxquels elles ont droit ainsi qu’arriver à défendre leurs droits.

Toutefois, il est important de noter que les aîné·e·s ne constituent pas un groupe homogène. On présente pourtant l’âge avancé comme un facteur de vulnérabilité. C’est entre autres pour cette raison que l’on a jugé bon non seulement d’exiger l’isolement complet des personnes de 70 ans et plus, mais également de leur interdire toute sortie seule si elles vivent dans une résidence pour aînés. Sortir marcher dehors, en respectant la distanciation sociale et les règles sanitaires de base, est pourtant recommandé pour le reste de la population. On définit ainsi souvent les personnes âgées d’abord en fonction de leurs problèmes de santé, de leurs limitations physiques ainsi que de leur sentiment de solitude et de perte de repères qu’ils peuvent ressentir.

Or, il est abusif de suggérer que les personnes âgées sont un poids pour la société. Cette idée trahit plutôt un âgisme qui persiste. Les personnes qui vieillissent sont partie intégrante de la société. La crise sanitaire a permis de mettre en lumière leur rôle important que ce soit en termes de soutien familial, de participation au marché du travail ou d’implication sociale par le bénévolat, toutes choses qu’elles ne peuvent plus accomplir comme avant en raison de leur confinement. Néanmoins, comme d’autres groupes au sein de la population, elles se butent parfois à des obstacles qu’elles entendent surmonter. Il appert que le système est souvent mal adapté aux besoins des aîné·e·s. Cette cohorte est souvent laissée à elle-même au moment de se familiariser avec certains services et programmes qui lui sont offerts ou encore avec les recours disponibles quand elle rencontre des problèmes.

Cette note offre un portrait de la population aînée au Québec et des défis qu’elle rencontre pour faire valoir ses droits, que ce soit en matière de logement, de santé, de gestion financière ou autre. Deux problèmes doivent être considérés de front : (1) comment peut-on aider les personnes âgées à « naviguer » le système, à accéder à toutes les ressources auxquelles elles ont droit, à ce que leurs plaintes trouvent réponse promptement, et (2) comment peut-on adapter la société et ses institutions à une population vieillissante dans la mesure où les structures existantes sont inadéquates. Dans cette note, l’IRIS propose la mise en place d’un guichet unique pour diriger les besoins, d’un service d’accompagnement universel aux plaintes pour soutenir les personnes qui se butent à des problèmes et d’une Direction de protection des aîné·e·s pour réfléchir la vieillesse et imposer de nouvelles façons de faire.

Portrait social et économique

Commençons par brosser un portrait des personnes âgées au Québec. Pour les fins de notre note, nous allons nous concentrer sur la population de 65 ans et plus[2]. Au Québec, ce groupe représentait 19,3 % de la population en 2019[3], taux passant dans les régions administratives d’un minimum de 8,4 % dans le Nord-du-Québec à un maximum de 27,5 % en Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine[4]. Son poids démographique devrait croître jusqu’à représenter 28 % en 2066[5]. La grande majorité de ces personnes ont entre 65 et 89 ans, mais le nombre de centenaires croît depuis des années, passant de 773 en 2001 à 2559 en 2019[6]. Cette situation démographique s’explique à la fois par le vieillissement de la génération du baby-boom et l’amélioration des conditions de vie qui permettent de vivre plus longtemps et en meilleure santé.

En 2019, près de la moitié des personnes de 65 ans et plus sont des hommes (46,2 %). Ce pourcentage diminue dans les groupes d’âge les plus âgés. Par exemple, pour chaque homme centenaire on compte six femmes du même âge[7].

Par ailleurs, comme le montre le tableau 1, près de la moitié des ménages dont la personne la plus âgée a 65 ans ou plus vivaient en couple en 2017 (45 %). Plus les personnes vieillissent toutefois et plus elles sont nombreuses à habiter seules. À 85 ans et plus, plus des deux tiers des personnes vivent seules (71 %). En outre, près d’un·e aîné·e sur 10 vit avec un ou des enfants, et ce, dans tous les groupes d’âge. Ce taux est relativement stable à travers les années, mais comme le groupe des 65 ans et plus augmente en taille, un nombre croissant de personnes âgées vivent avec des enfants, qu’il s’agisse des leurs ou, plus souvent, de ceux de leurs enfants.

Logement

En matière de logement, on trouve parmi les personnes de 65 ans et plus une majorité de propriétaires (69,7 %) dont la plupart ont terminé le remboursement de leur hypothèque (71,3 %). Si on se limitait à cette donnée, on pourrait alors croire que les personnes âgées sont dans une situation enviable en termes de logement. Cela se confirme pour celles qui sont propriétaires et qui ne vivent pas seules. Comme le montre le graphique 1, dans ce groupe, seulement 12,7 % ont des insuffisances liées à leur logement (trop petit, trop cher ou trop endommagé), ce qui est beaucoup mieux que pour l’ensemble de la population âgée (23,8 %)[8].

Cependant, pour tous les autres modes d’occupation de logement et tailles du ménage, la situation est plus difficile. Par exemple, plus du quart (27,7 %) des propriétaires âgé·e·s qui vivent seules ont des problèmes de logement. Toutefois, ce sont les personnes qui vivent seules dans un logement locatif qui sont le plus à risque d’avoir des difficultés. En effet, plus de la moitié des personnes âgées qui vivent seules sont locataires (53,8 %), plus de la moitié de celles-ci (54,5 %) ont des insuffisances liées à leur logement, la plus fréquente étant l’inabordabilité.

Où se trouvent ces locataires ? Il existe plusieurs cas de figure pour les aînés. Si la plupart habitent dans un logement sur le marché privé, environ le quart des aînés se retrouvent dans des résidences développées spécifiquement pour les personnes âgées, selon leur niveau d’autonomie.

Dans la majorité des cas (67,7 %), cela peut être des coopératives pour aînés ou des résidences avec services. Ces dernières peuvent également accueillir des personnes en perte d’autonomie ou avec des incapacités plus sévères. Pour les cas plus lourds (3h de soins quotidiens ou plus), on réfère généralement aux Centres hospitaliers de soins de longue durée (CHSLD), qu’ils soient publics (20,5 %), privés conventionnés (4,4 %) ou privés non conventionnés (2,1 %). Les services de base offerts sont les mêmes, tout comme les normes de qualité de soins, peu importe le type de CHSLD. Les tarifs et les critères d’admission sont déterminés par la Régie de l’assurance maladie (RAMQ) lorsque les CHSLD sont publics ou privés conventionnés, alors que ce sont les gestionnaires privés qui les déterminent pour ceux qui sont privés non conventionnés. Ces derniers ne reçoivent d’ailleurs aucune subvention du gouvernement[9]. Toutefois, il arrive régulièrement que le secteur public oriente des personnes âgées dans des centres privés non conventionnés pour pallier le manque de place dans les autres CHSLD. Le ministère de la Santé et des Services sociaux verse alors un montant pour payer le loyer de ces personnes. Selon les propriétaires de ces centres, ce dédommagement est trop bas et expliquerait, en partie, pourquoi ils n’offrent pas de salaires comparables à ceux du personnel des CHSLD publics ou conventionnés. En effet, le salaire horaire de base pour un·e préposé·e aux bénéficiaires est de 20,50 $ dans ces derniers, et de seulement 13 $ pour le secteur privé non conventionné[10]. Soulignons toutefois que le propriétaire des Résidences Soleil est milliardaire[11] et que le groupe Maurice, qui possède 28 résidences, a une valeur boursière de plus de 2 G$[12].

Comme mentionné plus haut, la majorité des personnes âgées qui habitent dans une résidence dédiée aux aîné·e·s logent dans une résidence avec services. Celles-ci offrent non seulement un lieu pour vivre, mais également des repas, un service de buanderie, etc. Selon les cas, ces services peuvent être plus ou moins nombreux et peuvent comprendre des soins de santé. Le Québec est l’endroit au Canada où l’on retrouve la plus forte proportion de personnes de 75 ans ou plus dans ce type de logement. En effet, 18,4 % d’entre elles sont en résidence avec services, une proportion qui n’est que de 6,1 % ailleurs au Canada[13].

La Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL) réalise chaque année un recensement de l’univers de ces résidences[14]. Près du tiers d’entre elles (32 %) comptent un loyer de plus de 1900 $ par mois. Le montant exigé pour loger dans ces résidences est plus élevé encore à Québec (45 %) et à Gatineau (68 %), ou sur la Côte-Nord (72,5 %)[15]. Pour une personne non autonome, le coût annuel moyen d’un logement dans ce genre de centre était de 48 000 $ en 2016[16].

Ces données ont des limites : l’échantillon ayant permis les calculs comprenait un nombre réduit de répondants et les services varient d’une résidence à l’autre. Dans plusieurs cas, en plus des services de base obligatoires, inclus dans le loyer, d’autres services sont offerts en échange de frais supplémentaires[17]. Bref, bien que le loyer moyen pour une chambre individuelle soit de 1666 $[18], ce montant ne reflète pas le coût moyen pour vivre dans ce type de résidence, puisque plusieurs frais doivent y être ajoutés. Malheureusement, ces données ne sont pas accessibles.

Entre les CHSLD et les résidences pour aînés, on trouve les Ressources intermédiaires (RI). Il s’agit de résidences privées de petite taille qui accueillent les personnes âgées en perte d’autonomie dans un milieu qui se veut le plus proche d’un milieu de vie traditionnel. Dans ce cas, le coût est partagé par l’établissement de santé qui a référé la personne à la RI et l’usager ou usagère qui bénéficie de la place. Il s’agit donc d’un partenariat public-privé (PPP). On y accueille des personnes qui ont besoin moins de 3h de soins par jour.

La crise sanitaire de la COVID-19 a permis de mettre en lumière certaines déficiences en matière de soins. Les mauvaises conditions de travail et le manque de personnel limitent la capacité de donner aux personnes âgées des milieux de vie dignes et respectueux, même si elles paient des montants importants afin d’avoir droit à une place dans une résidence pour aînés avec services ou dans un CHSLD privé.

Revenu

Cette situation est particulièrement préoccupante, car les personnes âgées vivent avec un revenu fixe avec peu de possibilités de l’augmenter puisque leurs années de travail sont généralement derrière elles. Elles dépendent souvent des programmes publics de soutien au revenu (notamment la Pension de la sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et le Crédit pour solidarité) ainsi que de formes d’épargnes (par exemple le Régime de rentes du Québec, les régimes de retraite d’employeur et les REER). En 2017, le revenu médian des personnes de 65 ans et plus se situait à 24 910 $[19]. Si on reprend les données pour le loyer moyen d’une résidence avec services, cela laisserait moins de 5 000 $ pour tout autre type de dépenses si on exclut les crédits d'impôt qui remboursent une partie de ces dépenses.

Toutefois, le revenu moyen des personnes âgées qui habitent dans un immeuble locatif de plus de 5 étages est beaucoup plus élevé (33 243 $) que la médiane de ce même groupe (22 248 $[20]). Cela nous indique que les ménages aisés qui sont dans ce type d’immeubles tirent la moyenne vers le haut.

Cela dit, un nombre croissant de personnes âgées se retrouvent sur le marché du travail. La pénurie de main-d’œuvre, la vieillesse en santé et les problèmes d’argent sont des facteurs explicatifs de cette tendance. En 2019, 21,6 % des personnes de 65 ans et plus ont reçu un revenu d’emploi, soit une augmentation de 24 % par rapport à la proportion de 2008[21]. Elles se trouvent dans plusieurs domaines tels que la vente au détail, la gestion ou les affaires[22].

Technologie

La relation des personnes âgées aux technologies évolue. En 2019, on estimait qu’elles étaient 62 % à accéder au web quotidiennement, ce qui représente une hausse de plus de 20 % en seulement 3 ans[23]. En 2010 et 2012, Statistique Canada a recueilli des données sur les incidents liés à l’utilisation d’Internet. Or, les incidents sont moins fréquents chez les aînés que pour l’ensemble des utilisateurs, tant en 2010 qu’en 2012. On note toutefois que les personnes de 65 ans et plus connaissent une augmentation plus rapide du nombre d’incidents dans les dernières années. Ainsi, en deux ans, on observe une augmentation de 21,4 % des cas de courriel frauduleux pour l’ensemble des utilisateurs, mais de 42,8 % pour ceux de 65 ans et plus. Six ans plus tard, une nouvelle étude a été produite sur le même sujet. Si on ne peut comparer les données puisque les indicateurs choisis diffèrent, on note toutefois que les taux d’incidents entre des personnes âgées rejoignent maintenant ceux de l’ensemble de la population[24].

Santé

La vieillesse est souvent associée à des problèmes d’ordre physique ou mental. Selon la dernière compilation d’indicateurs de santé chez les aîné·e·s par l’Institut de la statistique du Québec datant de 2010-2011, une majorité de personnes âgées de plus de 65 ans (83,9 %) ont au moins un problème de santé de longue durée[25] et plus de la moitié en ont deux ou plus (56,6 %)[26]. Dans le reste de la population, les proportions sont beaucoup plus faibles. Seulement une personne sur 4 âgée de 15 à 64 ans a un problème de santé de longue durée, et moins d’une sur 5 en a deux ou plus. Dans la population générale, on remarque également que le taux d’incapacité, c’est-à-dire « la réduction (partielle ou totale) de la capacité de réaliser certaines fonctions ou tâches de la vie quotidienne, comme entendre, voir, parler, marcher ou manier des objets[27] » augmente avec l’âge. Alors que le taux d’incapacité de l’ensemble de la population est de 33,3 %, celui-ci monte à 57,2 % pour les personnes de plus de 65 ans et à 84,0 % quand elles dépassent 84 ans[28]. Pourtant, les aînés sont actifs et contribuent à la société. Près du quart des personnes âgées de 65 à 84 ans (23,1 %) ont fait en 2008-2009 du bénévolat mensuellement et c’est ce groupe d’âge qui y consacrait en 2013 en moyenne le plus d’heures annuellement. Même à 85 ans ou plus, 80,7 % des personnes ont eu au moins une activité sociale chaque mois en 2008-2009[29].

La maltraitance est un autre problème qui affecte les aînés, que celle-ci soit physique, psychologique, financière ou organisationnelle. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la maltraitance comme « un geste singulier ou répétitif, ou une absence d’action appropriée, [qui] se produit dans une relation où il devrait y avoir de la confiance, et que cela cause du tort ou de la détresse chez une personne aînée[30] ». Selon l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), on compte parmi les facteurs de risques associés à la maltraitance le grand âge (plus de 74 ans), l’isolement social et les problèmes de santé physique et cognitive[31]. Statistique Canada estime que, en 2016, « 4 à 10 % des aînés font l’objet de mauvais traitements, [mais] seulement 20 % des incidents sont portés à l’attention de personnes qui peuvent aider[32] ». Le problème a de fortes chances d’être sous-estimé puisque « les données policières présentées ici ne comprennent que les infractions avec violence qui ont été portées à l’attention de la police et qui sont visées par le Code criminel[33] ».

Des systèmes à naviguer

Bien que l’expérience de la vieillesse ne soit pas uniforme, certaines tendances se dégagent dans le portrait des aîné·e·s du Québec. Nous venons de le voir, ces personnes sont le groupe démographique le plus nombreux à vivre avec des problèmes de santé de longue durée et leur espérance de vie est moins longue. En effet, il reste généralement moins d’années à vivre à 65 ans qu’à 40. De plus, une grande partie d’entre elles vivent seules, habitent dans des résidences où logent exclusivement des personnes âgées ou font face à des défis technologiques particuliers, que ce soit parce qu’elles n’ont pas accès à une connexion Internet ou au matériel nécessaire, parce que les sites ou les outils ne répondent pas aux normes d’accessibilité ou parce qu’elles ne comprennent pas comment utiliser les technologies. À cela s’ajoute l’âgisme que vivent les aînés au quotidien. Ainsi, il peut être plus ardu d’obtenir de l’aide quand ils vivent avec une situation difficile : leurs besoins ne sont pas toujours pris au sérieux, les institutions ne sont pas adaptées à leur réalité et les processus sont longs et complexes. Ces difficultés ne veulent pas dire que les personnes âgées ne sont pas autonomes ou qu’elles n’ont pas la volonté de revendiquer leurs droits. Toutefois, il est primordial de reconnaître les obstacles qu’elles rencontrent, de travailler collectivement à les surmonter et, dans le meilleur des cas, les éliminer.

Cadre théorique

Afin de donner des clés de lecture pour les sections suivantes, la notion de « navigation » doit être introduite.

Le concept de « navigation » repose sur l’idée que les systèmes sociaux, économiques et politiques sont complexes, parfois confus et souvent lents. De plus, ils fonctionnent trop souvent en silo, même au sein d’une même organisation, ce qui rend la situation des utilisateurs et utilisatrices encore plus difficile[34]. Ainsi, comme la navigation du système est difficile, pour qu’un·e citoyen·ne obtienne les services qui lui sont dus, les réponses à ses questions ou pour faire cheminer adéquatement ses plaintes, une personne doit pouvoir bénéficier d’assistance. À défaut de recevoir cette assistance, le processus devient source de confusion et de frustration, il augmente le stress vécu et il peut rendre une situation précaire encore plus difficile[35]. L’accompagnement ne signifie pas qu’il faille substituer la personne qui cherche à faire valoir ses droits, mais bien de l’épauler efficacement elle et son entourage vers la résolution du problème[36].

Les objectifs de l’aide à la navigation sont triples : d’une part, il faut permettre aux personnes concernées d’arriver à leurs fins dans les méandres de systèmes complexes. Ensuite, ce processus doit permettre une réflexivité au sein des systèmes afin d’adoucir ses aspérités et les rendre plus accessibles. En d’autres mots, il faut être en mesure de continuellement analyser le parcours réel des personnes qui utilisent les services pour que le processus s’améliore constamment, par exemple en devenant de plus en plus accessible ou en facilitant les processus de plaintes. Enfin, ces deux objectifs doivent être poursuivis en reconnaissant l’autonomie des usagers. Ainsi, l’aide à la navigation devrait renforcer les pratiques éthiques des systèmes et des services existants en les mobilisant pour qu’ils évaluent et ajustent leurs procédures tout en renforçant l’autodétermination des usagers, c’est-à-dire en respectant et en soutenant leur autonomie[37].

De plus, les systèmes échouent à prendre en considération leurs interactions les uns avec les autres. Il s’agit d’une des limites des mécanismes d’assistance qui existent actuellement au Québec et ailleurs puisqu’ils sont axés principalement sur le système de santé. Pourtant, les besoins de base dépassent les seuls besoins liés à la santé. Pour les professeurs australiens Jennifer Donovan, Ralph Hampson et Marie Connolly, le système de base pour répondre aux besoins des personnes âgées et de celles avec des problèmes de santé chronique est composé de huit catégories. Il s’agit des soins de santé, qu’ils soient pour (1) des besoins aigus, (2) des soins primaires ou pour (3) la santé mentale, mais également les besoins liés à (4) la consommation de drogues et d’alcool, (5) au logement, à (6) la violence conjugale, à (7) la protection de la jeunesse et (8) au système de justice[38]. Pour compléter le portrait, nous pourrions y ajouter les programmes de soutien au revenu[39].

Les structures actuelles permettent difficilement de répondre à l’ensemble des besoins des personnes âgées. De plus, les aîné·e·s sont souvent mal accueilli·e·s et mal accompagné·e·s lorsqu’ils tentent de résoudre leurs problèmes. Afin de remédier à cette situation, nous recommandons une approche sur trois fronts : d’abord faciliter l’accès aux ressources lorsqu’une personne veut faire respecter ses droits, ensuite accompagner cette personne jusqu’à la résolution et, enfin, simplifier les procédures tout au long du processus.

La portée des solutions axées sur le partage d’informations, par exemple la publication de fascicules ou d’un site Internet, est limitée. D’une part, il est difficile d’être exhaustif étant donné la multiplicité des problèmes qu’une personne peut rencontrer (et que ceux-ci peuvent recouper plus d’un secteur), d’autre part, ces initiatives ne permettent que de répondre à la première partie de l’enjeu de l’accessibilité puisqu’elles ne font que pointer la direction à prendre, sans accompagner tout le long du processus. De plus, l’accès à ces sources d’informations peut être difficile. S’il s’agit d’un document papier, il faut l’avoir reçu, l’avoir conservé et savoir où il est quand on en a finalement besoin. S’il s’agit d’un site Internet, il peut encore s’avérer difficile d’accès pour des personnes aînées. Dans les résidences avec services par exemple, plus du tiers n’offrent pas la connexion Internet (36,3 %[40]). Et même pour les ceux et celles qui ont une connexion, naviguer entre les sites pour trouver l’information peut être un défi. Il faut savoir prendre en considération la qualité, mais également la quantité d’information. En effet comme l’indique l’OMS :

il est difficile de gérer la surabondance d’informations et on peut passer à côté d’informations importantes. [...] Le résultat est que les aînés risquent de ne pas bénéficier de prestations ou de services auxquels ils ont droit ou d’apprendre leur existence trop tard pour en faire la demande[41].

Au Québec, les difficultés de navigation sont multiples. Plusieurs éléments font défaut, à savoir un processus unifié, un guichet unique et une vision d’ensemble prenant en considération les besoins particuliers des aîné·e·s. Dans ce qui suit, nous verrons des exemples en lien avec les professionnels, la santé et les finances.

Finances - L’approche aînée

Les cas de fraudes et de vols d’identité ont fait régulièrement la manchette dans la dernière année. La population vieillissante est plus vulnérable face à ces crimes[42]. Certaines personnes aînées possèdent des actifs importants sous forme de REER ou de propriété immobilière qu’ils utilisent comme source de revenus une fois à la retraite. Elles deviennent ainsi une cible pour les fraudeurs. Dans certains cas, les personnes qui soutirent l’argent des aîné·e·s sont des proches ou des membres de leur famille qui abusent de la confiance de la personne âgée. Dans d’autres cas, il s’agit plutôt de stratagèmes à grande échelle qui se font par téléphone, par courriel ou même en personne. Dans tous les cas, cela peut prendre la forme de vente pyramidale, de vol d’identité ou de fraude par carte de crédit.

Quand une personne se rend compte qu’elle a été victime d’une fraude, les démarches sont longues et complexes pour se plaindre et potentiellement récupérer une partie des sommes dérobées. Selon le site Éducaloi[43], il faut d’abord contacter la Sûreté du Québec (SQ) ou la Gendarmerie royale canadienne (GRC) pour dénoncer la fraude. S’il s’agit d’un problème qui concerne un conseiller accrédité, il faut également joindre l’Autorité des marchés financiers (AMF). Ensuite, en cas de vol d’informations personnelles, il faut communiquer avec l’ensemble des institutions financières avec lesquelles la personne a un compte pour les avertir de la situation. Il est aussi recommandé de contacter Postes Canada pour s’assurer que le courrier parvient à la personne intéressée, sans être intercepté par une personne malveillante. Les institutions financières n’ont d’ailleurs aucune politique systématique de surveillance des comptes des personnes vulnérables. Il y a bien des politiques de sensibilisation auprès de leurs employé·e·s, mais c’est loin d’être suffisant[44].

Toutes ces démarches ne sont pas adaptées aux personnes âgées. De plus, dans la majorité des cas, le fraudeur ou la fraudeuse est un proche, un membre de sa famille ou une personne avec qui la victime a créé un lien personnel. Cela complique la situation parce que cela veut dire se faire voler par des personnes qui leur offrent par ailleurs du soutien, des services ou de la compagnie.

En somme, des ressources existent, mais au prix d’une lourde charge pour la personne concernée. Les mesures à prendre pour se protéger imposent une importante charge mentale. Il est par ailleurs difficile pour une personne âgée d’être au fait des nouveaux stratagèmes, de se méfier continuellement et de vérifier avec assiduité l’évolution de ses avoirs pour détecter les possibles fraudes. Si une fraude est commise, la personne concernée doit s’armer de patience et faire preuve de résilience puisqu’elle doit franchir une à une les étapes pour se plaindre en répétant son histoire à chacune de ces étapes. Les mécanismes en place font très peu pour soutenir la personne aînée qui se retrouve ainsi en position de vulnérabilité. La personne se sentira parfois coupable de s’être laissé arnaquer[45] et très peu est fait pour l’accompagner d’une étape à l’autre afin de l’aider à obtenir résolution et justice.

Il est donc essentiel d’avoir une approche mesurée et adaptée pour cette catégorie de la population. Les personnes âgées ont besoin d’être écoutées dans leur expérience en tout respect de ce qu’elles ont vécu. Cela peut demander certaines adaptations dans les façons de faire. Cette « approche aînée » ne veut pas dire les infantiliser. Il faut plutôt prendre en considération les besoins d’adaptation pour pallier leurs limitations physiques (offrir des documents en gros caractères, s’assurer qu’elles ont un moyen de transport accessible pour se rendre aux rendez-vous, offrir des endroits de repos adaptés, etc.) ainsi qu’une écoute active particulière qui les accompagne dans leur récit afin qu’elles se sentent respectées dans le processus.

Santé - Le soutien à la navigation

Déposer une plainte dans le réseau de la santé et des services sociaux peut s’avérer bien plus compliqué qu’il n’y paraît. Le schéma 1 présente la marche à suivre pour s’adresser au commissaire aux plaintes d’un CISSS ou d’un CIUSSS.

On trouve un commissaire aux plaintes dans chaque CISSS ou CIUSSS. C’est à cette personne qu’il faut s’adresser en première instance si une plainte concerne des services rendus en centre hospitalier, en CHSLD, au CLSC, dans un Centre de réadaptation ou un Centre de protection de l’enfance et de la jeunesse. On doit également interpeller le commissaire aux plaintes dans le cas où les difficultés concernent une ressource ou personne « liée par une entente avec un établissement ». Cela inclut les ressources intermédiaires (maison de chambres, appartement supervisé, résidence de groupe, etc.), les cliniques privées liées à un établissement public, les organismes communautaires en santé ainsi que les résidences privées pour aîné·e·s.

Si la plainte n’est pas retenue par le commissaire aux plaintes, une personne peut ensuite porter la cause devant le Protecteur du citoyen, sauf si elle concerne un médecin. Dans ce dernier cas, le dossier doit être évalué par le comité de révision de l’établissement.

Durant ce processus, une personne peut solliciter l’accompagnement du commissaire aux plaintes lui-même ou du comité des usagers de l’établissement (s’il y a lieu). La personne peut également demander l’aide d’un Centre d’assistance et d’accompagnement aux plaintes (CAAP) de sa région. Ces groupes sont toutefois peu connus et peuvent être difficilement accessibles. De plus, le recours à ces ressources pour de l’assistance n’est pas systématique : une personne qui souhaite porter plainte parce qu’elle est insatisfaite des services ne sera pas automatiquement orientée par le réseau vers une personne du CAAP ou du comité des usagers. De plus, des voix s’élèvent pour réclamer une plus grande indépendance de la part des commissaires aux plaintes, qui sont vus comme prenant trop souvent la part des établissements de santé[46]. La voie peut donc être tortueuse pour une personne insatisfaite des services et qui connaît peu ou pas ses droits.

De surcroît, certains problèmes soulevés par des plaintes devraient entraîner une intervention rapide, ce qui n’est pas toujours le cas étant donné les délais de traitement. Prenons l’exemple d’une femme âgée qui agit comme aidante auprès de son mari qui subit des pertes cognitives importantes. Si les services offerts à son mari sont insuffisants et si l’aide qu’on lui offre à elle est déficiente, elle se retrouve avec une tâche alourdie, qui peut être au-delà de ses capacités. De même, une personne qui habite en CHSLD dont les soins sont inadéquats, la nourriture inappropriée ou la communication entre la famille et l’équipe de soin inexistante peut voir son espérance de vie affectée par la situation.

Le journal Le Soleil rapportait récemment[47] le cas de la fille d’un résident qui était insatisfaite des services dont bénéficiait son père en CHSLD. Elle a rapporté des problèmes d’insalubrité, des repas de mauvaise qualité, mais aussi un médecin qui refusait de prendre des radiographies après une chute, préférant prescrire des opioïdes contre la douleur. Devant l’inaction du CHSLD, la fille du résident a décidé de s’adresser au commissaire du CIUSSS en espérant faire rectifier la situation. Il lui a fallu attendre deux semaines pour qu’on entre en contact avec elle, et ce, seulement pour valider l’information. Pendant ce temps, le milieu de vie où réside son père continuait de présenter de graves problèmes qui affectaient non seulement sa qualité de vie, mais également celle de l’ensemble des résident·e·s.

Le besoin d’aide à la navigation est indéniable quand il est question de santé. D’ailleurs, un grand nombre de programmes de navigation ciblent spécifiquement les programmes de santé.

Certains organismes dédiés à une maladie particulière offrent des services d’accompagnement. C’est le cas notamment pour les personnes qui sont atteintes d’Alzheimer et leurs proches. La Société d’Alzheimer du Canada offre le service Premier lien (md) afin « d’orienter rapidement vers des programmes et services d’aide les personnes qui viennent de recevoir un diagnostic d’Alzheimer ou de maladie apparentée[48] ». L’objectif est d’éliminer les obstacles, si possible avant même que ceux-ci ne soient rencontrés, avec un service d’accompagnement personnalisé et soutenu. Ce lien se veut permanent et s’adapte à l’évolution des besoins des personnes concernées.

Depuis 2019, l’Australie expérimente pour sa part l’« Aged Care System Navigator Initiative ». Ce programme met en relation des centres communautaires, des réseaux d’information et des groupes de conseillers et conseillères pour rendre plus accessibles les programmes gouvernementaux pour le soin des personnes âgées. Les services sont offerts en personne, par téléphone ou par Internet. Le projet pilote vise à tester différentes approches auprès de divers types de personnes âgées afin de développer des outils adaptés aux réalités différentes. L’initiative est limitée puisqu’elle vise seulement les programmes gouvernementaux. Les résultats du projet pilote sont attendus en juin 2020[49].

Il existe aussi des programmes privés d’aide à la navigation du système. On peut ainsi s’abonner à un service qui, moyennant des frais mensuels, s’occupe d’accompagner l’abonné dans ses différents besoins. Par exemple, l’« Elder Care Navigator » en Nouvelle-Zélande exige un coût de base de 200 $ par mois pour une visite mensuelle. La fréquence des rencontres peut être plus élevée, mais dans ce cas le service est plus coûteux. Les « navigators » (pilotes) s’occupent ensuite de coordonner les soins et les services livrés à la personne aînée, puis d’informer la famille et les proches au besoin. Autonomes vis-à-vis du système de santé, ces pilotes proposent d’agir principalement comme facilitateurs sur une multitude d’enjeux comme les soins personnels et les rencontres médicales[50]. Ils et elles mettent également de l’avant l’autonomie et l’indépendance de leurs client·e·s, bien que le service soit vendu comme moyen d’assurer la paix d’esprit aux aidant·e·s.

En Ontario, l’organisation « Integrity Healthcare Consultants »[51] offre quant à elle du soutien aux personnes qui ne se sentent pas écoutées dans le système de santé, le temps que leur situation se règle. Bien que ses services soient accessibles à n’importe quel·le patient·e, son site Internet ne rapporte que des témoignages de personnes âgées : des familles qui remercient de l’accompagnement d’un être cher vieillissant ou des aîné·e·s faisant part de leur reconnaissance du soutien du service. Il s’agit d’un service payant et limité à un seul domaine, celui de la santé. Bref, une telle initiative est loin d’être accessible à l’ensemble de la population, et encore moins à l’ensemble de la population aînée.

En somme, que ce soit au Québec ou ailleurs, les points d’entrée du système de santé sont multiples et ne favorisent guère un accès facile aux services. Un guichet unique permettrait de régler ce problème. Pour qu’il soit réellement accessible, les personnes âgées doivent pouvoir accéder à ce guichet par des moyens qui leur sont déjà familiers. Si un portail web peut être pratique et intuitif pour certaines, ce n’est pas le cas pour d’autres. L’option de la ligne téléphonique est plus intéressante. En plus d’être un appareil que la plupart des aîné·e·s maîtrisent, le téléphone offre un contact plus humain et permet à la personne qui appelle d’être accompagnée dans le récit de ce qu’elle vit. Il est d’ailleurs crucial de parler rapidement à un être humain et de recourir le moins possible aux « serveurs vocaux : […] trop d’informations sont données trop rapidement, les options ne sont pas claires, et il est généralement impossible de parler à une personne réelle[52] ». À cela, il faudrait ajouter des points de contact physiques. Dans tous les cas, il est essentiel que les intervenants prennent le temps d’écouter les personnes qui utilisent le guichet unique afin de les aider à cerner l’enjeu qui les préoccupe. En effet, lorsque l’on vit une situation difficile, il arrive fréquemment que l’on ne cible pas la cause principale de nos problèmes. C’est à travers un travail d’écoute active que l’intervenant·e arrive souvent à démêler la situation, ce qui permet ensuite de diriger le ou la patiente vers la ressource ou le recours approprié.

Ordres professionnels – L’accompagnement aux plaintes

Au Québec, plusieurs professions sont supervisées par des ordres dont la mission principale est de protéger le public en garantissant la qualité des services. Les ordres professionnels offrent également des recours contre les professionnels en cas de manquements. Toutefois, la réalité est plus complexe. En effet, même si les ordres professionnels ont pour responsabilité de protéger le public, leurs administrateurs sont élus par les professionnels eux-mêmes. Ce modèle induit une tension entre la protection du public et une tendance à défendre les professionnels[53]. De plus, le processus de contestation peut être excessivement long et complexe.

Prenons le cas d’Yvonne[54]. À 82 ans, elle rencontre un denturologiste afin d’obtenir une nouvelle prothèse dentaire. Cette prothèse s’avère défectueuse et mal ajustée. Malgré plus d’une dizaine de visites et d’ajustements, elle n’obtient pas satisfaction et décide de se plaindre à l’Ordre des denturologistes. Il lui faudra attendre cinq ans, l’assistance d’une firme d’avocats, d'un huissier et deux mises en demeure avant que le dossier ne se règle en cour des petites créances. On lui demandera aussi d’étudier elle-même son dossier de denturologie, trouver un expert pour valider sa cause et rédiger sa plainte aux petites créances. Étant donné les délais de sa cause, il lui faudra aussi répondre à un questionnaire pour mettre à jour son dossier et attendre la formation d’un syndic ad hoc pour réviser sa plainte. Alors qu’Yvonne investit son temps et son énergie à être prête à chaque étape, l’Ordre auquel elle se plaint accuse des retards et multiplie les demandes de délais. Après avoir obtenu gain de cause devant l’ordre professionnel, elle doit ensuite investir la Cour des petites créances pour réussir à se faire verser le dédommagement auquel elle a droit.

Quelle que soit la personne en cause, la situation est inacceptable. Toutefois, dans le cas d’une personne âgée, elle frise l’absurde : comment peut-on avoir un processus de résolution de conflit qui commence lorsqu’une personne a 82 ans et peut se terminer alors qu’elle en a 87 ? Le parcours d’Yvonne n’aurait jamais dû être si ardu et si long. À tout le moins, le processus de plainte aurait dû prendre en considération son âge afin d’accélérer le traitement, tout en accordant à la plaignante une attention particulière afin d’assurer un bon déroulement de la cause.

Cette attention particulière aurait pu prendre la forme d’une aide à la navigation du système. Certains groupes communautaires travaillent spécifiquement à l’accompagnement des personnes aînées. Les Centres d’assistance et d’accompagnement aux plaintes (CAAP[55]) ont pignon sur rue dans toutes les régions du Québec et ont pour mandat d’accompagner les personnes qui veulent porter plainte dans le système de santé et de services sociaux, dans les cas de maltraitance ou pour les problèmes rencontrés en résidences privées pour aîné·e·s[56]. Leurs services comprennent la diffusion d’information, le soutien-conseil et l’accompagnement dans les démarches de plaintes. L’an dernier, ils ont rendu près de 9 000 services[57] dont près de la moitié (45 %) relevait de l’assistance au dépôt d’une plainte[58]. Il faudra attendre la fin du projet pilote pour évaluer l’efficacité du volet de soutien aux plaintes concernant les résidences pour aîné·e·s privées.

Ces services sont inspirants, mais limités. Les types de plaintes qui peuvent bénéficier de cet accompagnement doivent cadrer dans le mandat du CAAP. Ainsi, Yvonne n’aurait pas eu droit à de l’assistance dans ce contexte. Or, son cas aurait bien bénéficié d’une aide dédiée, d’une aide à la navigation. Celle-ci se doit d’être personnalisée et soutenue, voire même permettre des rencontres en personne. Il faudrait développer des services dans la même veine que ceux déjà offerts par les CAAP, mais les bonifier de façon substantielle et conséquente afin de couvrir une pluralité de champs d’action. De cette manière, plutôt que de gaspiller du temps pour déterminer si oui ou non une plainte figure dans la mission de l’organisme, le processus pourra être enclenché en même temps que l’accompagnement de la personne qui cherche à faire valoir ses droits. Plusieurs groupes pourraient bénéficier de tels services, mais la population vieillissante connaît des défis particuliers auxquels il est urgent de répondre. Cibler les aîné·e·s permettrait de mieux adapter le service et de concentrer les ressources sur ce groupe dont on cherche à réduire la vulnérabilité.

Logement - Vers un Commissariat aux milieux de vie

Nous avons présenté plus haut quelques statistiques liées au logement qui permettaient de voir qu’il pouvait être particulièrement difficile pour les personnes âgées vivant seules d’avoir les moyens de se loger adéquatement. Que ce soit en résidence avec service, en logement locatif privé ou comme propriétaires (surtout lorsqu’elles vivent seules), les personnes âgées sont plus à risque de connaître des problèmes liés au logement. La situation dans les CHSLD et résidences privées pour aînés pendant la pandémie de COVID-19 a permis de mettre tristement en lumière plusieurs de ces enjeux : des loyers excessifs, un manque de personnel pour répondre aux besoins des résidents, des services de qualité variable, etc. Bien que la pandémie ait exacerbé ces réalités, il ne s’agit pas de problèmes récents. De nombreux rapports ont été rédigés pour évaluer ces services et recommander de nouvelles façons de faire en raison de lacunes majeures observées. En 2016, la Protectrice du citoyen a publié un rapport qui soulevait de nombreux problèmes dans la gestion des résidences pour aînés. On y note que « les baux de telles résidences contenaient certaines clauses contrevenant à des obligations légales et réglementaires[59] ». De plus, on y exige souvent le respect des règlements de l’immeuble, alors que ceux-ci peuvent être difficiles à connaître et peuvent changer sans préavis.

Même pour les personnes qui ne sont pas en logement assisté, le parcours en cas de problème de logement est ardu, particulièrement pour une personne âgée. Il devient vite complexe de communiquer avec la Régie du logement, de savoir quelles procédures suivre pour formuler une plainte ou s’en défendre et quels documents rassembler pour étoffer son dossier. De plus, les causes portées devant la Régie peuvent traîner en longueur. Par exemple, lorsqu’un locataire dépose une plainte envers son propriétaire, les délais peuvent exiger jusqu’à deux ans[60].

À ces difficultés s’ajoutent les cas particuliers liés aux résidences privées avec services. Jusqu’à tout récemment, les résident·e·s qui se plaignaient de hausses de loyer abusives ou de problèmes liés aux services ne pouvaient entamer de démarches que sur une base individuelle plutôt que de le faire pour l’ensemble des locataires de leur immeuble[61]. En d’autres mots, lorsque des résident·e·s souhaitent dénoncer une injustice et la régler pour l’ensemble des personnes qui habitent le même établissement qu’eux, il faut toutes les fédérer à leur cause. Cela pose plusieurs défis. D’abord, il peut être difficile de rejoindre toutes les personnes concernées, puis de leur expliquer l’injustice et le processus de résolution. Ensuite, la cause peut être longue, ce qui veut dire que la composition de la résidence a de fortes chances de changer entre le début et la fin des procédures. Enfin, comme nous le verrons plus bas, la peur peut en dissuader certains, d’autant plus que plusieurs cas de harcèlement ont été rapportés en lien avec des contestations de loyer ou de conditions de vie.

Dans son rapport de 2016, la Protectrice du citoyen soulignait également la lourdeur et la complexité des recours en matière de logement pour les aîné·e·s qui habitent une résidence avec services[62]. Pour régler un litige, il faut d’abord une mise en demeure, puis il faut joindre la Régie du logement afin de compléter une demande qu’il faut ensuite transmettre par huissier. Près de deux ans peuvent s’écouler avant la première audience. Il faut alors préparer la preuve et sa présentation, connaître la jurisprudence et réaliser de possibles interrogatoires et contre-interrogatoires. Il peut ensuite y avoir des reports ou une multiplication de rencontres. Une fois les représentations faites et les plaidoiries terminées, il faut attendre jusqu’à trois mois pour connaître la décision de la Régie[63]. Ces délais sont beaucoup trop longs, d’autant plus que les personnes impliquées peuvent se retrouver à côtoyer dans leur milieu de vie – qui est souvent leur dernier – des personnes avec lesquelles elles sont en conflit. Plusieurs cas d’intimidation ont été rapportés dans les résidences avec services quand les frais exigés étaient contestés. Dans certains cas, des propriétaires ont menacé des résidents de ne pas leur donner leurs médicaments prescrits à titre de mesure de représailles[64].

Il est particulièrement important de soutenir les personnes âgées dans leur choix de milieu de vie étant donné l’impact sur leur santé que peut avoir un changement drastique et non voulu. Le Protecteur du citoyen rapportait notamment le cas dramatique d’une dame ayant habité un CHSLD pendant 13 ans. Alors qu’elle s’y plaisait, que sa santé s’améliorait et qu’elle regagnait en autonomie, l’administration a déterminé que la dame ne remplissait plus les critères pour conserver sa place dans cet établissement. L’opposition de sa famille tout comme celle du personnel soignant n’auront pas suffi à empêcher l’imposition d’un déménagement. Elle décèdera un mois plus tard[65].

Sans que les conséquences soient aussi extrêmes dans tous les cas, cet exemple permet d’illustrer l’importance d’avoir un milieu de vie sécurisant, stable et à l’écoute de la population vieillissante. Il en va de la santé mentale et physique des personnes concernées. Au Québec, il n’existe pourtant pas d’organisme dont la mission est de revoir les conditions de vie des personnes aînées afin de s’assurer que leurs milieux de vie soient adaptés à leurs besoins. En 2003, le ministère de la Santé et des Services sociaux a publié un document faisant état des objectifs ministériels entourant les CHSLD. On y énumère une série de recommandations afin de s’assurer que ces centres soient des milieux favorisant une vie agréable et digne, une dernière résidence pour les personnes en perte d’autonomie où il ferait bon de vivre. Le rapport est plein de bons sentiments et brosse un portrait invitant. Toutefois, la réalité n’a pas suivi par manque de moyens et de ressources, mais également parce qu’aucun mécanisme n’a été prévu pour assurer le suivi des objectifs, leur mise à jour ou des conséquences s’ils ne sont pas respectés.

Quant à la Régie du logement, elle ne permet que de régler les problèmes au cas par cas, lorsque ceux-ci se rendent à elle. Le Protecteur du citoyen détient quant à lui un pouvoir d’enquête et de recommandations, mais aussi d’initiative[66]. Toutefois, son mandat est très vaste et recouvre des situations qui dépassent largement la question des milieux de vie des personnes âgées. En effet, celui-ci est de « prévenir et corriger le non-respect des droits, les abus, la négligence, l’inaction ou les erreurs commises à l’égard des citoyens en contact avec un ministère ou un organisme du gouvernement du Québec (ou) un établissement du réseau de la santé et des services sociaux (généralement en deuxième recours)[67] ».

Plusieurs rapports ont présenté des recommandations en lien avec les résidences pour aîné·e·s ou les CHSLD. Parfois elles concernent des établissements précis et, dans d’autres cas, on demande à changer des lois ou des façons de faire. C’est le cas notamment des changements recommandés dans les procédures devant la Régie du logement pour les cas relevant des résidences privées pour aîné·e·s. En effet, à la suite d’enquêtes sur le déroulement des plaintes concernant ces résidences, le Protecteur du citoyen a demandé qu’une section spéciale de la Régie du logement soit créée afin de traiter les causes spécifiques à ces résidences. Cela permettrait d’accélérer le processus, mais également de développer une expertise pour ces cas particuliers. Un projet de loi à cet égard a été présenté en 2018, mais n’a pas obtenu de sanction en raison d’élections déclenchées peu de temps après son dépôt[68]. Cet exemple permet de voir l’utilité, mais également une des limites, du Protecteur du citoyen. Son travail est nécessaire et met en lumière des situations préoccupantes, mais il a un pouvoir limité tout en ne travaillant pas exclusivement sur les questions entourant les milieux de vie des aîné·e·s. Alors que les résidences avec services connaissent une popularité sans commune mesure avec le reste du Canada, il serait pourtant opportun de créer un organisme dédié à réfléchir au cadre que l’on voudrait imposer à ce type de résidence afin de s’assurer qu’elles soient un milieu de vie agréable et sécuritaire pour les personnes qui y habitent. Comme l’actualité récente nous l’a démontré, ce n’est certainement pas le cas partout présentement.

Le travail politique des député·e·s peut également aider dans certains cas. En juin 2016, l’Assemblée nationale a adopté à la quasi-unanimité[69] une loi visant à limiter les évictions de locataires âgé·e·s. Le but du projet de loi était de protéger les personnes vieillissantes d’un déracinement qui pourrait avoir des impacts importants sur leur santé et leurs finances. Nombre de locataires âgé·e·s vivent dans leur logement depuis plusieurs dizaines d’années. Ils ont leurs habitudes, participent à leur communauté et profitent d’un réseau de support de proximité (famille, voisins, groupes communautaires, etc.). En les forçant à quitter un logement, on les arrache à un lieu familier de leur résidence, mais aussi souvent à leur quartier. En effet, il peut être très difficile de se relocaliser dans un même secteur tout en conservant un loyer abordable. La nouvelle loi interdit de reprendre le logement d’une personne de 70 ans et plus sous certaines conditions : lorsqu’elle habite le logement depuis au moins 10 ans, que son revenu est assez bas pour être admissible à un logement social et que la reprise ne soit pas pour une personne de 70 ans ou plus.

Bien que cette loi soit une amélioration par rapport à l’absence de protection qui prévalait avant, elle laisse encore un bon nombre de personnes âgées sans protection. En effet, seules les reprises de logement sont interdites, et il est encore possible d’évincer un·e locataire âgé·e sous d’autres prétextes. Comme nous l’avons indiqué plus haut, les recours devant la Régie du logement peuvent être longs et compliqués, ce qui désavantage les aîné·e·s qui se retrouvent dans cette situation, particulièrement en cas d’isolement de la personne. Prenons le cas d’Henriette[70], une femme de 97 ans qui a reçu l’ordre de quitter son logement dans les 2 semaines suivant l’avis. N’ayant pas compris qu’elle devait se présenter devant l’audience qui a mené à ce jugement, elle n’a pas pu se défendre des accusations d’insalubrité et de bruit venant de ses propriétaires. Même si elle aurait aimé conserver son logement, le harcèlement qu’elle a subi durant cet épisode l’a découragée de porter la cause en appel. De plus, son relatif isolement (pas d’enfant, une famille vieillissante comme elle, etc.) a limité son réseau de support. Finalement, c’est une voisine qui a eu connaissance de la situation et qui lui a donné un coup de main du mieux qu’elle a pu, mais il était déjà trop tard.

Ainsi, le logement et les milieux de vie ont une importance vitale pour les personnes âgées, mais les recours ne sont pas évidents à trouver et peuvent mener à des problèmes encore plus grands que ceux que l’on cherche à régler. Une attention particulière devrait être portée à ce domaine. Il faudrait donc, le plus rapidement possible, mettre en place un Commissariat aux milieux de vie des aîné·e·s pour évaluer la situation sur tous les fronts et apporter les changements nécessaires au fur et à mesure de leurs conclusions.

Cette instance se doit d’être distincte de la Régie du logement pour plusieurs raisons. Tout d’abord, bien qu’une proportion importante des aîné·e·s sont locataires, le Commissariat proposé devrait également se pencher sur la réalité des propriétaires âgé·e·s. Ensuite, la Régie du logement est essentiellement un tribunal administratif sans pouvoir indépendant d’enquête. Elle n’a pas non plus de pouvoir de recommandations. Ce sont des pouvoirs qu’aurait au contraire le Commissariat proposé. Parmi les chantiers que pourrait entreprendre celui-ci figurent la redéfinition de la Régie du logement, un meilleur encadrement des résidences privées et l’ajustement en conséquence des normes du bâtiment. Ces initiatives permettraient de répondre à des questions comme le nombre maximal d’étages que peut avoir une résidence sécuritaire, les meilleures façons d’encadrer la hausse des loyers et des frais de service ou encore les normes à considérer pour des lieux communs les plus dynamiques et invitants possible. De plus, en pérennisant cette nouvelle institution, les autorités auront davantage l’occasion d’anticiper les problèmes liés à l’enjeu du logement des personnes vieillissantes plutôt que d’attende des tragédies pour agir. La situation catastrophique des CHSLD, révélée à la suite de la pandémie de COVID-19, met en lumière l’importance d’une telle structure. Si « tout le monde savait » que les conditions de vie n’étaient pas optimales dans ces résidences, peu était fait pour agir concrètement et améliorer les choses de manière structurelle. Les solutions étaient plutôt apportées au cas par cas, au gré des plaintes faites à la Protectrice du citoyen.

Des solutions concrètes

Il y a plus de 60 ans, le Québec a dû composer avec un afflux majeur de naissances. Pour répondre aux besoins de ces enfants devenus ensuite adolescents, les systèmes de santé et d’éducation ont dû s’adapter, construisant notamment un nombre record d’écoles primaires et secondaires. En 1979, quand ces enfants sont devenus à leur tour des parents, on a mis en place la Direction de la protection de la jeunesse. Bien que cette institution connaisse des ratés[71], son rôle n’en demeure pas moins important, aujourd’hui comme il y a 40 ans. Il faut maintenant créer de nouvelles façons de faire, de nouvelles institutions qui, cette fois, auraient comme but à la fois de protéger et d’accompagner la population vieillissante.

Dans la section précédente, nous avons identifié quelques éléments essentiels afin de faciliter la vie des personnes aînées, notamment en matière d’accès aux services ou de défense de droits. Rappelons-les.

Revoir les façons de faire

Une grande partie des services qu’utilisent les aîné·e·s sont les mêmes que ceux dévolus à l’ensemble de la population. En effet, un locataire âgé qui vit des problèmes avec son logement se retrouve devant la même Régie du logement qu’une locataire plus jeune. Ce sont les mêmes ordres professionnels qui traiteront ses plaintes, les mêmes médecins qui feront son bilan annuel (dans plusieurs cas), les mêmes fonctionnaires qui géreront ses dossiers. Il ne serait pas logique de dédoubler tous ces services pour créer des organismes parallèles qui s’occuperaient exclusivement de la population aînée. Cela compliquerait le suivi puisqu’il faudrait transférer les dossiers d’une structure à l’autre lorsque la personne vieillit. Toutefois, certaines adaptations sont nécessaires afin de simplifier le contact et le suivi avec les aîné·e·s. C’est ce que nous avons nommé « l’approche aînée ». Il s’agit en quelque sorte de contrer l’âgisme en travaillant à changer les attitudes et les façons de faire pour prendre en considération le vécu et les défis d’accessibilité propres au vieillissement. Ainsi, il faut prendre acte des limites physiques et cognitives des personnes âgées, sans présumer de leur manque d’autonomie. Pour certaines, cela veut dire une mobilité plus difficile, pour d’autres des problèmes de vision ou d’audition et pour d’autres encore, le besoin d’être accompagnées par un proche pour faciliter la communication. Cela veut dire, avant tout, d’être à l’écoute de l’être humain et sensible à son expérience de vie. Bien entendu, les avancées que l’on peut faire grâce à cette approche auront un effet bénéfique sur l’ensemble des services offerts. Par exemple, rendre disponible un service d’accompagnement en voiture pour se rendre à un rendez-vous pourra être utile non seulement pour une personne âgée à mobilité réduite, mais également pour une jeune famille qui habite un lieu mal desservi par les transports en commun.

Centraliser dans un guichet unique

Mais cela ne sera pas suffisant pour améliorer l’accès aux services. Bien entendu, il faut que l’attitude des gens avec qui les personnes âgées interagissent soit mieux adaptée à leur réalité, mais encore faut-il que ces dernières puissent avoir accès aux services. Pour ce faire, il faut mettre en place un guichet unique de services intégrés afin de les orienter directement vers les bons interlocuteurs. Il s’agit ici de guichets « assurant une relation simplifiée avec un ensemble de services en place (qui) intègrent tous les services qui y sont rattachés, sans nécessairement les remplacer[72] ». L’objectif est de « simplifier la vie de l’usager, en faisant véritablement coopérer les institutions[73] ». Le guichet unique implique également que les dossiers soient mis en commun. Ainsi, peu importe la raison pour laquelle la personne âgée appelle, on peut faire le lien avec ses références passées, la reconnaître dans ses besoins[74]. Pour être efficace, il est donc essentiel de mettre en lien les différents services qui seront liés à travers ce guichet unique et que le service offre à la fois un référencement et un suivi pour s’assurer de mieux soutenir les personnes qui appellent.

L’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) de la région de Québec offre ce genre de services depuis 2010. Leur programme « Coup de pouce » se décline en trois secteurs : un accompagnement administratif afin de simplifier l’accès aux programmes gouvernementaux, un accompagnement juridique qui aide dans la résolution de conflit et les procédures légales et un accompagnement psychosocial servant à offrir un soutien en temps de crise[75]. Offert sur le territoire de la ville de Québec, il bénéficie d’un fort travail de concertation sur le terrain qui permet d’orienter les aîné·e·s vulnérables qui en ont besoin. Toutefois, le service dépend d’une subvention récurrente qui n’est pas garantie sur le long terme, en plus d’avoir une portée limitée étant donné les ressources disponibles et le territoire couvert. Le projet est porteur dans sa région, mais il est essentiel d’aller plus loin, par exemple en ajoutant un numéro de téléphone unique et un portail web facile d’accès.

En ce sens, le service 211 est un exemple intéressant de service téléphonique de référence[76]. Il existe dans plusieurs provinces du Canada ainsi qu’aux États-Unis. L’objectif est d’abord de relier les appelants aux services qui correspondent à leurs besoins, qu’ils soient publics, parapublics ou communautaires. Prenons l’exemple du service offert en Ontario. Financé principalement par des fonds publics ainsi que par Centraide, il est offert depuis 2012. La ligne fonctionne 24h/24 et 7 jours/7 et peut répondre aux questions en plus de 150 langues. Ils rendent les statistiques de leurs services disponibles chaque mois, ce qui permet de faire un suivi en temps réel[77]. De plus, le service d’orientation ne se termine pas avec la fin de l’appel. En effet, en plus de diriger les personnes qui appellent vers les bons services, groupes et institutions, les téléphonistes du 211 assurent un suivi pour vérifier que leurs conseils ont été suivis ou ont porté fruit et, lorsque la situation le nécessite, elles agissent en faveur des personnes qu’elles accompagnent. Par exemple, on fait état d’un homme âgé qui avait besoin de faire installer une ceinture de sécurité sur sa mobylette afin de pouvoir utiliser le transport adapté de sa ville. Comme c’était sa seule option pour se déplacer, et qu’il en avait besoin pour un rendez-vous médical qui arrivait rapidement, le 211 s’est occupé de rejoindre les commerces du secteur pour voir si l’un d’eux offrait le service d'installation. Une entreprise locale a répondu à l’appel et a offert d’aller chercher l’homme et la mobylette pour ensuite l'installer[78]. Cet exemple est intéressant à plusieurs égards. D’une part, le besoin se situait en périphérie des services publics ou parapublics. Pour accéder au transport collectif (un service municipal), il a fallu activer les commerces locaux (le marché privé). De plus, le 211 ne s’est pas contenté de dire à la personne qui appelait comment régler le problème : on s’est chargé de l’aider activement en faisant des démarches pour trouver une solution spécifique à son cas.

Le service 211 existe également au Québec depuis 2008. Toutefois, il est offert seulement dans certaines régions (Montréal, Québec, Laval, Granby et L’Assomption) et n’opère pas toute la journée. De plus, le service est méconnu. Cela dit, le service jouit d’un certain prestige par association grâce aux autres numéros de services qui se terminent par « 11 » (911, 411, 811, etc.). Présentement, le système fonctionne grâce aux dons et au travail de groupes communautaires locaux. Si une vision commune unit les services régionaux, ceux-ci demeurent décentralisés et inégaux. Par conséquent, nous recommandons d’assurer une couverture complète du territoire du Québec, de rendre cette ligne téléphonique accessible à toute heure du jour et de la nuit et que le service soit reconnu comme un service public qui intègre les programmes des différents ministères, mais qui est également en mesure de faire le pont avec les groupes communautaires et le secteur privé quand cela est nécessaire. Cela passera inévitablement par un rehaussement du financement. À titre d’exemple, le 211 en Ontario jouit d’un budget de plus de 5 M$ alors que celui du Grand Montréal dépasse à peine l M$[79]. Il faut aussi multiplier les points d’entrée au service de guichet unique en rendant le site Internet plus accessible et facile d’utilisation et en mettant en place des bureaux où il est possible de rencontrer des responsables en face à face.

L’élargissement de ce service ne touchera pas que les aîné·e·s, mais il faudrait avoir une attention particulière pour ces personnes afin qu’elles connaissent son existence et sachent qu’il est destiné, en partie, à leurs besoins.

Ajouter un service de navigation

À cette ligne téléphonique devrait s’ajouter un service de navigation. En effet, que ce soient les systèmes de santé et de services sociaux, les enjeux qui touchent le logement, les finances ou n’importe quels autres services, le trajet peut être compliqué et tortueux pour arriver à ses fins. La navigation dans le système devient alors un travail à temps plein, qui nécessite des ressources et une certaine expertise. Ainsi, il ne suffit pas que le guichet unique réfère au bon service, au bon département, il faut également que l’on s’assure que l’aîné·e qui appelle arrive à ses fins. Dans certains cas, cela veut dire obtenir les soins dont elle a besoin, et dans d’autres, cela implique de l’accompagner à travers un processus de plainte. Dans tous les cas, cette aide à la navigation doit être personnalisée et soutenue, voire permettre des rencontres en personne. De plus, le mandat ne doit pas être limité à certains domaines comme la santé ou les services publics, mais regrouper l’ensemble de ce que nous avons présenté plus haut comme « services intégrés ». Si la ligne 211 doit être disponible à tous et toutes, le service d’accompagnement devrait être entièrement dédié – du moins dans une première phase – aux personnes âgées. Cela permettra de mieux cibler le service et de concentrer les ressources sur ce groupe dont on cherche à réduire la vulnérabilité.

Mettre en place un Commissariat aux milieux de vie

De plus, et de manière urgente, il faut travailler sur les milieux de vie afin de s’assurer que ceux-ci sont adaptés aux personnes âgées. Les conditions de vie des aînés dans leurs résidences et CHSLD font débat depuis longtemps. Les repas inappétissants ont fait la manchette, tout comme le manque de personnel et son effet sur les soins essentiels à prodiguer. On y déplore également l’atmosphère froide qui règne dans ces centres alors qu’ils sont censés être des milieux de vie accueillants. La situation est devenue encore plus intenable à la suite de la crise liée à la pandémie. La solution du gouvernement Legault est de miser sur des « maisons des aînés », soit des centres plus petits qui pourraient accueillir aussi peu que 12 personnes par résidence, avec des espaces communs conviviaux et un accès à la nature[80]. Si tout se passe comme prévu, une trentaine de ces maisons devraient voir le jour d’ici septembre 2022[81]. C’est un début, mais ce nombre est insuffisant eu égard aux besoins et il faudra attendre plusieurs années avant qu'elles ne voient le jour. De plus, on peut se demander comment ce projet évoluera au gré des pressions politiques et des changements de gouvernement. Est-ce que les maisons des aînés sauront s’adapter à la population qui les fréquentera ?

Pour y arriver, nous avons suggéré de mettre en place un Commissariat aux milieux de vie. Cet organisme devra intégrer les personnes vieillissantes dans ses travaux plutôt que de réfléchir à leurs besoins à leur place. Son mandat serait de penser à de meilleures façons de maintenir les personnes âgées à domicile, ainsi que de définir le type de résidences pouvant les accueillir, que leurs besoins soient trop lourds pour leurs proches ou qu’elles veuillent simplement habiter dans un logement plus adapté à leur réalité. Pour y parvenir, le Commissariat devra revoir les procédures de la Régie du logement pour le traitement des causes impliquant les personnes âgées, qu’elles habitent dans des résidences avec services ou dans un logement locatif traditionnel, mais aussi de réfléchir à un code de bâtiment spécifique pour répondre aux besoins particuliers des aînés et pour défendre le droit à la vie digne, peu importe la situation de logement de cette population.

Cela passe également par un élargissement des services à domicile pour aider à maintenir les personnes vieillissantes chez elles le plus longtemps possible. En 2017, une note de l’IRIS estimait à 250 000 le nombre de personnes nécessaires pour répondre à l’ensemble des besoins de la population âgée[82]. Depuis, rien n’a été fait pour améliorer la situation. Il faut donc exiger une augmentation de l’offre, mais aussi améliorer les conditions de travail pour réduire le taux de roulement du personnel et garantir une vie digne à cette population. Il s’agit là aussi d’un enjeu que devra aborder le Commissariat aux milieux de vie puisqu’il en va de notre capacité collective à soutenir les aîné·e·s dans leur autonomie.

Ce nouvel organisme permettrait de régler des problèmes en amont en enquêtant sur différents aspects liés aux milieux de vie. Son rôle serait permanent, permettant de s’ajuster aux besoins changeants de la population vieillissante dans un processus d’adaptation continue. Tel que mentionné plus haut, il sera essentiel d’y intégrer des personnes âgées vivant différentes réalités afin de bien répondre à leurs besoins. En effet,il peut être facile d’imposer des solutions de l’extérieur, mais, ce faisant, on fait abstraction des réelles expériences des personnes concernées. Au contraire, il faut utiliser cette richesse afin de continuellement s’adapter et s’améliorer quant aux milieux de vie offerts aux aîné·e·s.

Mettre sur pied une direction de protection des aînés

Toutefois, ces mesures doivent être fédérées pour ne pas devoir fonctionner en silo. En effet, c’est leur interaction qui offre les meilleures perspectives de succès. Nous recommandons donc la mise sur pied d’une Direction de protection des aînés (DPA) pour répondre à ce besoin. Cette nouvelle direction chapeauterait la ligne publique 211, le programme d’aide à la navigation ainsi que le Commissariat aux milieux de vie. Il aurait pour mission de faciliter la vie des personnes âgées en amorçant des recherches sur des enjeux qui les touchent et en formulant des recommandations au gouvernement afin de changer des pratiques, des lois et des règlements. Il pourrait enquêter tant dans le réseau de la santé et des services sociaux et dans les autres services publics que, plus largement, auprès des groupes qui, au privé comme au public, œuvrent auprès des personnes âgées.

Les données récoltées par le guichet unique et le service de navigation permettront d’offrir des solutions applicables rapidement aux problèmes que rencontrent les aînés. En effet, la vue d’ensemble de la DPA permettrait de cibler les obstacles qui expliquent la longueur des délais ou les raisons d’abandon des plaintes avant leur résolution. Il pourrait donc aider à simplifier les processus, par exemple en exigeant que les procédures soient accélérées pour les personnes âgées afin qu’elles ne passent pas leur fin de vie à attendre réparation en cas de tort.

Ce travail ne pourra pas être seulement réactif, mais devrait également aller au-devant des réalités que vivent les aîné·e·s. Par exemple, on sait que le pourcentage de personnes de plus de 75 ans qui habitent des résidences avec services est élevé au Québec, et que ce groupe démographique est en augmentation. Dans le passé, nous avons vu des problèmes liés par exemple aux dispositifs de lutte aux incendies. Le gouvernement a réagi rapidement pour imposer un nombre plus élevé de gicleurs dans les bâtiments. Toutefois, si la directive a été rapide à énoncer, son déploiement a été beaucoup plus lent et certaines résidences n’ont toujours pas installé le matériel requis[83]. De plus, il aura fallu attendre une tragédie pour régler un problème qui était pourtant prévisible. L’exemple des gicleurs n’en est qu’un parmi tant d’autres. On pourrait également penser à la mort de la mère de l’ex-politicien Gilles Duceppe à l’hiver 2019, coincée à l’extérieur après le déclenchement d’une alarme d’incendie[84]. Une DPA pourrait, dès aujourd’hui, réfléchir à ce type d’enjeux, en plus d’aborder des questions aussi variées que la fiscalité des revenus des aîné·e·s, leur surmédicalisation ainsi que l’accessibilité des soins de santé, pour ne nommer que ces sujets.

Conclusion

Il ne faut pas infantiliser les personnes âgées qui sont, pour la plupart, autonomes et capables de prendre les décisions affectant leur vie et leur santé. Même lorsqu’elles sont en perte d’autonomie, elles méritent notre respect et notre soutien. Malheureusement, elles se butent encore à des problèmes, que ceux-ci soient d’ordre financier, de santé ou d’accès à la justice. Les délais peuvent être très longs, les étapes complexes et les moyens de communication difficiles d’accès.

Il est primordial de mieux accompagner les aîné·e·s, mais également de revoir les systèmes qui les accueillent afin de les adapter à leur réalité. Pour ce faire, les institutions existantes sont déjà insuffisantes. Les drames que l’on a pu voir dans les CHSLD dans les derniers mois en raison de l’épidémie de COVID-19 en témoignent tristement. Compte tenu du poids démographique des personnes âgées dans notre société et de la situation sanitaire sans précédent que nous vivons, il faut créer de nouvelles entités pour répondre à leurs besoins.

La création d’un guichet unique pour répondre à toutes leurs questions et les diriger vers le bon organisme ou service serait un premier pas nécessaire. Cependant, il faut aller plus loin et ajouter des services de navigation complets qui prennent en considération l’ensemble de leurs besoins de base. De plus, afin d’être vraiment efficace, on doit se doter d’un chien de garde, c’est-à-dire d’un organisme qui peut récolter des données, mener des enquêtes et forcer le gouvernement et les organismes publics à agir. Une Direction de protection des aîné·e·s pourrait agir de la sorte, tout en chapeautant les services que nous croyons nécessaire d’ajouter.

Si on améliore les processus pour les aîné·e·s, l’ensemble de la population en bénéficiera. En effet, les délais et la complexité qui peuvent rebuter les personnes âgées ont aussi un effet négatif sur les recours des plus jeunes. De plus, miser sur une « approche aînée » et sur des institutions ayant comme objectif de leur faciliter la vie aura des impacts positifs pour leur santé, ce qui leur permettra de continuer à contribuer encore longtemps à la société. Nous ne pourrions nous passer de l’apport essentiel des personnes âgées dans nos structures sociales, que ce soit par du bénévolat, de l’aide familiale ou même du travail rémunéré. Travaillons collectivement à consolider leur contribution.

 

[1]      BÉLAIR-CIRINO, Marco, « Le système de santé menacé par un “tsunami gris”», Le Devoir, 23 août 2010, www.ledevoir.com/societe/sante/294823/le-systeme-de-sante-menace-par-un-tsunami-gris.

 

[2]      Toutefois, les données disponibles nous forcent parfois à utiliser d’autres groupes d’âge pour l’analyse de la situation des aîné·e·s. Lorsque ce sera le cas, nous l’indiquerons.

 

[3]      Statistique Canada, Tableau 17-10-0005-01, consulté le 11 février 2020.

 

[4]      Institut de la statistique du Québec, Estimations de la population et Statistique Canada, Estimations de la population, février 2020, calculs de l’autrice.

 

[5]      FLEURY-PAYEUR, Frédéric et INSTITUT DE LA STATISTIQUE DU QUÉBEC, Perspectives démographiques du Québec et des régions, 2016-2066, 2019, p. 23.

 

[6]      Statistique Canada (SC), Estimations de la population (septembre 2019). Adapté par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).

 

[7]      Statistique Canada, Tableau 17-10-0005-01, consulté le 11 février 2020.

 

[8]      Statistique Canada, Recensement de la population de 2016, produit numéro 98-400-X2016234 au catalogue de Statistique Canada.

 

[9]      ASSOCIATION DES ÉTABLISSEMENTS PRIVÉS CONVENTIONNÉS, Foire aux questions | AEPC, aepc.qc.ca/foire-aux-questions/, consulté le 15 avril 2020.

 

[10]    DUQUETTE, Anne-Marie, « Les CHSLD privés dans une situation “d’iniquité intenable” », L’Action D’Autray, 28 novembre 2019, www.lactiondautray.com/article/2019/11/28/les-chsld-prives-dans-une-situation-d-iniquite-intenable.

 

[11]    « Eddy Savoie a des actifs de 1,5 milliard $ », Les Affaires, 28 avril 2014, www.lesaffaires.com/secteurs-d-activite/general/eddy-savoie-vaut-15-milliards-/568413.

 

[12]    SABA, Michel, « Le Groupe Maurice passe sous contrôle américain », La Tribune, 4 juin 2019, www.lesoleil.com/affaires/le-groupe-maurice-passe-sous-controle-americain-078c9b5dd34f590cff66b94c6d38f2f7.

 

[13]    Rapport sur les résidences pour personnes âgées – Québec, SCHL, 2019, p. 3.

 

[14]    Le loyer mensuel n’a été fourni que pour 7,3 % des places recensées. Rapport sur les résidences pour personnes âgées – Québec, SCHL, 2019, p. 12.

 

[15]    Ibid., p. 21.

 

[16]    RÉSEAU FADOQ, La qualité de vie des aînés en CHSLD, 11 janvier 2017, p. 17.

 

[17]    Rapport sur les résidences pour personnes âgées – Québec, op. cit., p. 63.

 

[18]    Ibid., p. 30.

 

[19]    Statistique Canada, Tableau 11-10-0039-01, Déclarants et dépendants, aînés ayant un revenu selon la source de revenu et l’âge, Québec, Revenu total médian, 2017.

[20]    Statistique Canada, Recensement de la population de 2016, produit numéro 98-400-X2016235 au catalogue de Statistique Canada.

[21]    Statistique Canada, Tableau: 11-10-0039-01 (anciennement CANSIM 111-0035), calculs de l’autrice, consulté le 3 mars 2020.

[22]    Statistique Canada, Recensement de la population de 2016, produit numéro 98-400-X2016302 au catalogue de Statistique Canada.

[23]    NETENDANCES, Les aînés connectés au Québec, vol. 10, no 1, CEFRIO, 2019, p. 7.

[24]    Statistique Canada, Tableau 22-10-0109-01, Incidents liés à la sécurité et à la protection de la vie privée sur Internet, selon le groupe d’âge.

[25]     L’enquête de l’ISQ a préféré utiliser le terme « problème de santé de longue durée », en indiquant référer à des problèmes qui durent plus de six mois, plutôt que « maladie chronique », mais reconnaît que cette dernière façon est la plus utilisée dans les milieux cliniques. FOURNIER, Claire et al., Enquête québécoise sur les limitations d’activités, les maladies chroniques et le vieillissement 2010-2011: méthodologie et description de la population visée volume 1, Institut de la statistique du Québec, 2014, p. 23.

 

[26]    Ibid., p. 45.

 

[27]    Ibid., p. 34.

 

[28]    Ibid., p. 37.

 

[29]    Statistique Canada, Tableau 13-10-0466-01 ; Statistique Canada. Tableau 45-10-0012-01, Taux de bénévolat et heures annuelles moyennes de bénévolat, selon le groupe d’âge.

 

[30]    « Maltraitance envers les personnes aînées », INSPQ, www.inspq.qc.ca/securite-prevention-de-la-violence-et-des-traumatismes/prevention-de-la-violence-interpersonnelle/dossiers/maltraitance-envers-les-personnes-ainees, consulté le 5 mars 2020.

 

[31]    Ibid.

 

[32]    CONROY, Shana, « Affaires de violence familiale envers les aînés déclarées par la police », La violence familiale au Canada: un profil statistique, 2016, 17 janvier 2018.

 

[33]    Ibid.

 

[34]    DONOVAN, Jennifer et al., « Service Navigators in the Workforce: an ethical framework for practice », Asia-Pacific Journal of Health Management, vol. 13, n° 2, 1er octobre 2018, p. 7.

 

[35]    FUNK, Laura M. et al., « Carers as System Navigators: Exploring Sources, Processes and Outcomes of Structural Burden », The Gerontologist, vol. 59, n° 3, 17 mai 2019, p. 12.

 

[36]    DONOVAN, Jennifer et al., loc. cit., p. 6.

 

[37]    Ibid., p. 5.

 

[38]    Ibid., p. 7.

 

[39]    HÉBERT, Guillaume, Les dépenses fiscales et les personnes aînées, IRIS, 22 mai 2019, iris-recherche.qc.ca/publications/Fiscalite-65etplus.

 

[40]    SCHL, Rapport sur les résidences pour personnes âgées – Québec, SCHL, 2019, p. 27.

 

[41]    OMS, Guide Mondial des Villes-amies des Aînés, 2007, p. 61.

 

[42]    PROTÉGEZ-VOUS, Comment limiter les risques de fraude financière envers les aînés, 18 novembre 2019, www.protegez-vous.ca/nouvelles/affaires-et-societe/fraude-finances-aines-retraite.

 

[43]    « Les aînés et la fraude financière », Éducaloi, 1er octobre 2012, www.educaloi.qc.ca/capsules/les-aines-et-la-fraude-financiere.

 

[44]    DUCAS, Isabelle, « Fraude envers les aînés: quand la menace est tout près », La Presse, 30 novembre 2018, www.lapresse.ca/actualites/justice-et-faits-divers/201811/30/01-5206185-fraude-envers-les-aines-quand-la-menace-est-tout-pres.php.

 

[45]    CRÊTE, Raymonde et DUFOUR, Marie-Hélène, « L’exploitation financière des personnes aînées : une mise en contexte », Revue générale de droit, vol. 46, 19 avril 2016, p. 13‑49.

 

[46]    PORTER, Isabelle, « Résidences pour aînés: des commissaires aux plaintes plus indépendants réclamés », Le Devoir, 18 février 2020, www.ledevoir.com/societe/sante/573146/titre-plaintes-en-maltraitance-l-independance-des-commissaires-mise-en-doute.

 

[47]    MOISAN, Mylène, « «On est à bout de souffle» », Le Soleil, 27 février 2020, www.lesoleil.com/chroniques/mylene-moisan/on-est-a-bout-de-souffle-930a372ce9129b562a906140b5e039a5.

 

[48]    « Le programme Premier lienMD », Société Alzheimer Canada, alzheimer.ca/fr/Home/We-can-help/Resources/For-health-care-professionals/first-link, consulté le 2 avril 2020.

 

[49]    AUSTRALIAN GOVERNMENT DEPARTMENT OF HEALTH, « Aged Care System Navigator Measure », Australian Government Department of Health, Australian Government Department of Health, 25 novembre 2019, www.health.gov.au/initiatives-and-programs/aged-care-system-navigator-measure.

 

[50]    Elder Care Navigator, www.ecnavigator.nz/, consulté le 7 mai 2020.

 

[51]    « Home », Integrity Healthcare Consultants, integrityhealthcare.ca/, consulté le 7 mai 2020.

 

[52]    OMS, op. cit., p. 63.

 

[53]    HÉBERT, Guillaume et al., Les ordres professionnels peuvent-ils garantir la protection du public ? 2016, iris-recherche.qc.ca/publications/ordres_professionnels.

 

[54]    Il s’agit d’un cas réel, le prénom a été changé pour conserver l’anonymat de la personne.

 

[55]    FÉDÉRATION DES CENTRES D’ASSISTANCE ET D’ACCOMPAGNEMENT AUX PLAINTES, Rapport annuel 2018-2019, mai 2019, p. 16.

 

[56]    Ce dernier secteur a été ajouté récemment à la suite du rapport de la Protectrice du citoyen sur ces résidences et fait l’objet d’un projet-pilote de trois ans qui a débuté à l’automne de 2019.

 

[57]    Plusieurs services ont pu être rendus à une même personne.

 

[58]    Ibid., p. 15.

 

[59]    LADOUCEUR, Marie-Claude, Rapport spécial du Protecteur du citoyen Les résidences privées pour aînés: plus que de simples entreprises de location résidentielle Rapport sur le respect des droits et des obligations des locataires et des locateurs dans les résidences privées pour aînés, Protecteur du Citoyen du Québec, 2016, p. 3.

 

[60]    Olivier, Richard, « Des délais jugés “inacceptables” à la Régie du logement », TVA Nouvelles, 24 avril 2018.

 

[61]    Morissette-Beaulieu, Félix, « Des aînés contestent leur hausse de loyer et gagnent à la Régie du logement », Radio-Canada.ca, 9 août 2019.

 

[62]    LADOUCEUR, Marie-Claude, op. cit.

 

[63]    Ibid., p. 12.

 

[64]    Ibid., p. 19.

 

[65]    PROTECTEUR DU CITOYEN, Rapport annuel d’activités 2016-2017, Québec, septembre 2017, p. 117.

 

[66]    Ibid., p. 12.

 

[67]    « Rôle et mandats », Le Protecteur du citoyen, protecteurducitoyen.qc.ca/fr/a-propos/role-et-mandats, consulté le 7 mai 2020.

 

[68]    PORTER, Isabelle, « Une section spéciale pour les aînées à la Régie du logement? », Le Devoir, 13 juin 2018, www.ledevoir.com/politique/quebec/530148/une-section-speciale-pour-les-
aines-a-la-regie-du-logement
.

 

[69]    Quatre personnes se sont abstenues. Selon le chef de la deuxième opposition de l’époque (CAQ), ce serait en raison d’un conflit d’intérêts puisque ces députés possédaient des immeubles à logements locatifs. Journal des débats de l’Assemblée nationale, vendredi 10 juin 2016 - vol. 44 n° 185, www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/41-1/journal-debats/20160610/174423.html.

 

[70]    Il s’agit d’un cas réel ; le prénom a été changé pour conserver l’anonymat de la personne.

 

[71]    Accueil — Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, www.csdepj.gouv.qc.ca/accueil/, consulté le 7 mai 2020.

 

[72]    JULIEN, Damon, « Le guichet unique, c’est possible », Revue Futuribles, no 358, décembre 2009, p. 2.

 

[73]    Idem.

 

[74]    Ibid., p. 3.

 

[75]    « Programme Coup de pouce », AQDR QUEBEC, www.aqdr-quebec.org/programme-coup-de-pouce/, consulté le 7 mai 2020.

 

[76]    « What is Ontario 211 Services? | Our Vision | Ontario 211 », 211 Ontario, 211ontario.ca/about-211-ontario/what-is-211-ontario/, consulté le 3 mars 2020.

 

[77]    « 211 Data », 211 Ontario, 211ontario.ca/about-211-ontario/our-services-annual-report/2018-2019/211-data/, consulté le 3 mars 2020.

 

[78]    « Caller Stories », 211 Ontario, 211ontario.ca/about-211-ontario/our-services-annual-report/2018-2019/caller-stories/, consulté le 7 mai 2020.

 

[79]    211 GRAND MONTRÉAL, Rapport d’activité annuel – Communauté métropolitaine de Montréal – 2018c, Centre de Référence du Grand Montréal, 2019.

 

[80]    MARIN, Stéphanie, « Québec dévoile le concept de ses “Maisons des aînés” », La Presse, 26 novembre 2019, www.lapresse.ca/actualites/politique/201911/26/01-5251277-quebec-devoile-le-concept-de-ses-maisons-des-aines.php.

 

[81]    Ibid.

 

[82]    HÉBERT, Guillaume, L’armée manquante au Québec: les services à domicile, IRIS, 20 octobre 2017, iris-recherche.qc.ca/publications/services-domicile.

 

[83]    RICHER, Jocelyne, « Gicleurs dans les résidences pour aînés: l’échéance repoussée », La Presse, 10 juillet 2019, www.lapresse.ca/actualites/201907/10/01-5233420-gicleurs-dans-les-residences-pour-aines-lecheance-repoussee.php.

 

[84]    LACOURSIÈRE, Ariane, « Triste fin pour la mère de Gilles Duceppe », La Presse, 21 janvier 2019, www.lapresse.ca/actualites/201901/21/01-5211795-triste-fin-pour-la-mere-de-gilles-duceppe.php.

 

Le vieillissement de la population est un enjeu qui fait la manchette depuis des années. Des mises en garde incessantes ont été formulées quant aux effets de l’arrivée massive des baby-boomers à la retraite sur la croissance économique, le fonctionnement du système de santé et l’état du marché du travail. Les plus alarmistes ont même décrié l’arrivée imminente d’un «tsunami gris» qui aurait des conséquences dévastatrices. Les aîné·e·s sont revenus dans l’actualité récemment avec l’épidémie de COVID-19 qui les affecte au premier titre. Non seulement sont-ils ceux qui ont le plus de risques de décéder s’ils contractent le virus, mais les lieux qu’ils habitent se révèlent des foyers de contagion. La situation actuelle est préoccupante, mais même avant le confinement, les personnes âgées rencontraient des défis particuliers pour réussir à obtenir les services auxquels elles ont droit ainsi qu’arriver à défendre leurs droits.

  • La population vieillissante du Québec est de plus en plus nombreuse et est confrontée à un nombre important d’obstacles pour répondre à ses besoins, que ce soit en terme de logement, de finances personnelles, ou encore de santé, par exemple. La situation mise au jour à l’occasion de la pandémie de COVID-19 dans les CHSLD n’est que l’arbre qui cache la forêt.
  • De nouvelles institutions doivent être créées pour répondre aux besoins des personnes âgées, particulièrement celles qui sont plus vulnérables. 
  • Cela devrait passer par la mise en place d’une Direction de la protection des aîné·e·s qui chapeauterait un guichet unique permettant d’orienter et d’accompagner les personnes rencontrant des problèmes ainsi qu’un Commissariat aux milieux de vie chargé d’évaluer la situation de vie des personnes aîné·e·s sous tous ses angles et d’apporter les changements nécessaires de façon continue.

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