COMMUNIQUÉ | Budget du Québec: la troisième baisse d’impôt en cinq ans privera le Trésor public de 4,1G$ par année
15 mars 2023
Montréal, le 15 mars 2023 – À quelques jours du dépôt du budget provincial, le gouvernement Legault a réitéré sa promesse de réduire le taux d’imposition des particuliers. Selon une étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) publiée aujourd’hui, cette baisse d’impôt profitera davantage aux mieux nantis et privera les coffres de l’État de 1,8G$ supplémentaires par année. Ce faisant, le gouvernement du Québec aura diminué à trois reprises les contributions fiscales depuis 2018, ce qui compromet la qualité des services offerts à la population québécoise.
Les hauts revenus plus avantagés
En vertu des baisses d’impôt qui entreront en vigueur en 2023, les personnes dont les revenus atteignent 100 000$ annuellement pourront bénéficier d’un allègement fiscal de plus de 800 $ par an. En comparaison, les personnes gagnant un salaire de 50 000$ n’économiseront que 328 $ en contribution fiscale. En outre, la modification suggérée par le gouvernement n’offrira aucun gain aux contribuables dont le revenu se situe en deçà de la première table d’impôt, ce qui représente 35% de la population québécoise.
« À première vue, les baisses d’impôt promises par le gouvernement Legault semblent cibler les revenus les plus bas puisqu’on diminue le taux d’imposition des deux premiers paliers de la table d’impôt. Or, dans les faits, ces allègements fiscaux profiteront davantage aux personnes qui ont les plus hauts revenus et qui n’en ont pas besoin », explique Guillaume Hébert, chercheur à l’IRIS et co-auteur de l’étude.
Les services publics privés de milliards depuis cinq ans
À compter de 2023, le gouvernement Legault privera les coffres de l’État de 1,8G$ supplémentaires annuellement pour un cumulatif, en cinq ans de baisses d’impôt, de 4,1G$. Cette nouvelle baisse d’impôt survient alors que le Québec enregistre depuis deux décennies une réduction continue des recettes fiscales qui met à mal les missions sociales de l’État. En effet, si le gouvernement avait prélevé en 2019 la même part d’impôt qu’en 1999, il aurait été en mesure d’offrir pour 5,4 milliards de dollars de plus en services à la population.
« Tous les contribuables ne profiteront pas de l’allègement fiscal promis par le gouvernement. Or c’est l’ensemble de la population québécoise qui gagne à ce que ces sommes soient investies dans les services publics. Le redressement du système d’éducation et l’amélioration de l’accès aux soins de santé nécessiteront assurément des investissements considérables dans les prochaines années », soutient Pierre-Antoine Harvey, chercheur associé à l’IRIS et co-auteur de la fiche.
Fonds des générations: le mirage de l’« équité intergénérationnelle »
Pour mettre en œuvre la baisse d’impôt qu’il propose, le gouvernement prévoit réduire les versements au Fonds des générations de 5 à 3 milliards de dollars. « Il s’agit d’une évolution positive de la gestion des finances publiques au Québec puisqu’on desserre enfin la camisole de force qui oblige le gouvernement à verser des sommes importantes chaque année dans le Fonds des générations. Dans un contexte de crise climatique, le principe d’équité intergénérationnelle est respecté uniquement si l’on finance la transition écologique », signale Pierre-Antoine Harvey.
Rappelons que les objectifs de réduction de la dette qui figuraient au cœur de la mission du Fonds des générations ont été atteints et dépassés. Malgré la perturbation économique causée par la pandémie, la dette brute du Québec devrait atteindre 40,4 % du PIB en 2023-2024, alors que l’objectif était de ramener ce ratio à 45 % en 2025-2026.
Une stratégie irresponsable en période d’incertitude économique
Si le sommet de l’inflation semble derrière nous, tout indique que le Québec s’apprête à vivre un important ralentissement économique dans les prochains mois. En décembre dernier, le ministre des Finances estimait à 50 % les chances qu’une récession se produise en 2023. Relancer une économie exige de stimuler les investissements qui apporteront des bénéfices dans l’avenir. Or, les allègements fiscaux encouragent la consommation à court terme, sans garantie que cet argent sera réellement injecté dans l’économie québécoise.
« Le contexte économique actuel est particulièrement mal choisi pour limiter la capacité d’intervention de l’État. Priver le Québec de sommes importantes afin d’accroître le pouvoir d’achat des ménages aisés est déjà fort discutable en temps normal; à l’approche d’un ralentissement économique, voire d’une récession, une telle baisse d’impôt est tout simplement irresponsable », souligne Guillaume Hébert.
Pour lire la note : bit.ly/baisses_impot_2023
Faits saillants
« Tous les contribuables ne profiteront pas de l’allègement fiscal promis par le gouvernement. Or c’est l’ensemble de la population québécoise qui gagne à ce que ces sommes soient investies dans les services publics. »
Pierre-Antoine Harvey, chercheur à l’IRIS et co-auteur de la fiche