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Le privé en santé : une idée-zombie à achever

5 octobre 2023

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3min


Au tournant des années 2000, le gouvernement australien a ouvert davantage la porte aux soins de santé privés, soi-disant pour réduire la pression sur les hôpitaux publics. Il s’appuyait sur la vieille idée selon laquelle le transfert d’activités médicales vers le privé permettrait de réduire les listes d’attente dans le réseau public. Cette idée reprise par le gouvernement Legault est pourtant erronée, comme l’ont montré de nombreux exemples internationaux. Le cas de l’Australie ne fait pas exception.

La méthode privilégiée par le gouvernement australien pour accroître la place du privé a été de favoriser la souscription à une assurance complémentaire. C’est ce que proposait le Parti conservateur du Québec lors de la dernière campagne électorale. Au Québec, les assureurs privés ne peuvent pas offrir d’assurances duplicatives, c’est-à-dire des assurances qui couvrent des services déjà offerts par le système public. Cette interdiction a pour objectifs d’éviter que les ressources professionnelles soient drainées par un système privé parallèle et d’éviter le développement d’un système à deux vitesses dans lequel l’accès aux services dépend de la capacité de payer plutôt que des besoins.

Puisque les mesures introduites en Australie avaient contribué à augmenter la part du privé en santé, une étude s’est intéressée à l’impact que cela avait pu avoir sur les listes d’attente. L’objectif de l’étude était de tester l’hypothèse (défendue par le gouvernement australien) selon laquelle une plus grande proportion de soins prodigués par le secteur privé allait être associée à des délais d’attente plus courts. L’étude s’est appuyée sur des données statistiques pour 15 procédures chirurgicales différentes effectuées dans les hôpitaux des six États de l’Australie.

L’étude a démontré le contraire de ce que le gouvernement prétendait : les délais d’attente étaient plus courts lorsque la proportion de patient·e·s soigné·e·s dans le réseau public était plus élevée. Dit autrement, lorsque la place du secteur privé est plus grande, les délais d’attente sont plus longs. Il semble donc que l’accroissement de la part du privé en santé fasse augmenter les délais d’attente, à l’inverse de ce que laisse croire la rhétorique des défenseurs du privé. L’auteur de l’étude souligne que les résultats sont cohérents avec ceux d’autres études semblables effectuées ailleurs dans le monde.

L’idée selon laquelle plus de privé permettrait d’améliorer le système public s’apparente à la théorie du ruissellement (« trickle down »), qui présume que baisser les impôts des plus riches permettra à tout le monde de s’enrichir puisque les riches injecteront leur argent dans l’économie. Dans les faits, lorsqu’on baisse les impôts des plus favorisé·e·s, ce sont avant tout les riches qui en profitent. Le reste de la population en pâtit, étant donné que le gouvernement se prive de ressources qu’il aurait pu utiliser pour financer les programmes sociaux. D’une manière similaire, l’ouverture au privé en santé entraîne un déplacement du personnel médical vers le privé, ce qui affaiblit le réseau public. Comme la théorie du ruissellement, le privé en santé est une idée-zombie : réfutée maintes et maintes fois, elle rôde encore et continue à nous hanter. Il serait temps de l’achever pour construire enfin un système de santé entièrement public, décentralisé et démocratique.

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3 comments

  1. Nous devrions avoir un des deux dogmes suivants en place au niveau national:
    1- Quand l’état est actif dans un domaine, le privé ne peut y être;
    2- Si le privé est actif dans un domaine ou l’état est présent, aucune forme d’aide de l’état n’est disponible pour ce dernier.

  2. A première vue, dire que les délais d’accès au public sont plus longs lorsque co-existe l’accès au privé est paradoxal. Je ne suis pas certaine d’avoir saisi l’argument qui le démontre dans cet article. Merci de bien vouloir m’éclairer…

  3. Je suis tout à fait d’accord.
    L.établissement du système publique a permis de soigner tellement de gens qui autrement ne se faisaient soigner.
    C.est aussi important que l.expertise du secteur publique soit maintenue…..
    C.est fondamental pour maintenir le droit à la santé pour tous.

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