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Regards sur la CAQ : les migrant·e·s responsables des problèmes d’intégration?

4 novembre 2011

  • LH
    Laura Handal

Dans sa deuxième proposition au sujet de la culture québécoise et de la langue française, François Legault laisse entendre que l’immigration se réduit à un problème d’intégration et que les migrants eux-mêmes sont à l’origine de celui-ci. La Coalition parle en effet de mesures pour augmenter l’employabilité des immigrants et pour favoriser leur intégration à la communauté francophone, soulignant que la maîtrise non adéquate du français est «un frein à l’embauche pour de nombreux immigrants».

Pourtant la proportion d’immigrants ayant une connaissance du français à leur arrivée est considérablement élevée :environ deux tiers des nouveaux immigrants au premier trimestre de 2011 ont déclaré parler le français. Le fait d’augmenter cette proportion, comme ils le suggèrent, pourrait rendre plus difficile voire même élitiste le processus d’immigration vis-à-vis des non-francophones. De plus, que le niveau de français soit médiocre ou excellent, la Coalition omet de mentionner que la discrimination plus que la langue peut parfois être le principal frein à l’embauche. Selon l’Institut de recherche en politiques publiques :

«la maîtrise du français, bien qu’étant une condition nécessaire, ne semble pas suffisante en elle-même [pour la réussite sur le marché du travail]. En effet, 42 p. 100 des immigrés de langue maternelle française indiquent qu’ils sont victimes de discrimination au travail [ou en demande d’emploi ou en avancement]. Ce taux élevé pourrait s’expliquer par leur appartenance au groupe des minorités visibles […].» (p.10)

Par ailleurs, on ne tient pas compte du fait que dans certains cas l’obstacle à l’embauche n’est pas le manque d’employabilité, bien au contraire. De janvier à mars 2011, il a été recensé qu’environ le deux tiers des nouveaux immigrants possèdent une scolarité de 14 ans ou plus à leur arrivée. Mais, on le sait tous, malgré des niveaux d’éducation élevés dans une variété de domaines, les diplômes des immigrants ne sont pas reconnus au Québec par certains ordres professionnels. Selon le conseil interprofessionnel du Québec, entre 1997 et 2006, pour environ 45 professions réglementées, seulement un tiers des candidats ont obtenu une reconnaissance complète de leurs compétences par les ordres professionnels, la moitié ont acquis une reconnaissance partielle (avec possibilité de reconnaissance complète avec la réalisation d’un stage) et les qualifications de 16% des postulants ont été jugés inadaptées.

La Coalition propose par ailleurs que l’on observe «une pause de 2 ans» afin de planifier plus rationnellement «l’effort d’intégration des immigrants à la société québécoise». C’est une proposition arbitraire et injuste pour les individus et familles déjà en attente d’une réponse à une demande de résidence permanente. Cela pourrait faire en sorte de doubler leurs délais d’attente, lesquels tournent déjà autour de 2 ans.

Évidemment, les cours de francisation et d’orientation ainsi que les programmes pour améliorer l’employabilité des immigrants son essentiels. Toutefois, il importe de ne pas percevoir l’immigration que comme étant un problème d’adaptation et de reconnaitre les ressources et les acquis que les migrants détiennent déjà à leur arrivée. En ce sens, des politiques pour prévenir la discrimination à l’embauche et pour faciliter la reconnaissance des compétences seraient davantage pertinentes que celle visant à réduire carrément le seuil de migrants par année.

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