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Logement locatif : enfin une bonne nouvelle

25 juin 2013

  • Philippe Hurteau

Au Québec, le passage du nouveau millénaire a été synonyme de crise dans le monde du logement locatif. On peut facilement se rappeler les années 2000 à 2003 où, à chaque 1er juillet, des familles se retrouvaient à la rue faute de pouvoir trouver un logement. Cette situation de crise, qui s’est quelque peu résorbée depuis, a cédé la place à une longue période de pénurie (2004-2012) qui, semble-t-il, prend fin cette année. Revenons un peu sur cette période pour y voir plus clair.

Crise, pénurie et retour à l’équilibre

De 1999 à 2012, le taux d’inoccupation, qui mesure la proportion de logements vacants sur le marché, n’a jamais dépassé le seuil de 3 % correspondant au niveau d’équilibre. En dessous de ce niveau, on considère qu’il y a pénurie de logement.

Taux d’inoccupation des logements locatifs au Québec, 1992-2013

Graphique 1

Source: Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL)

Ce printemps, pour la première fois en 15 ans, le marché locatif retrouve un niveau d’équilibre en ce qui a trait au taux d’inoccupation. Ce taux se situe actuellement à 3,1 % dans les centres urbains du Québec. La situation n’est certes pas rétablie dans l’ensemble des villes québécoises. Québec, par exemple, enregistre toujours un taux d’inoccupation sous le seuil d’équilibre, soit 2,2 %.

Si la crise du logement était marquée par un débalancement aigu entre l’offre et la demande de logement – le taux d’inoccupation frôlant le 1 % de 2000 à 2003, la période suivante fut marquée par une relative stabilité du marché dans un contexte de pénurie qui semblait vouloir devenir permanent.

Toutefois, le retour à l’équilibre observé actuellement se produit avec quelques années de retard en raison, notamment, de l’obstination des pouvoirs publics à miser sur le développement de politiques axées sur l’accès à la propriété plutôt que sur la mise en chantier de logements sociaux. La stratégie voulant permettre un desserrement de la pénurie dans le secteur locatif en misant sur la facilitation de l’accès à la propriété chez les jeunes ménages – soit par l’achat de condos ou d’une maison unifamiliale dans les couronnes nord et sud de la métropole – porte finalement ses fruits, mais au prix d’un développement immobilier porteur de nombreux effets pervers :

  • Transformation du tissu socio-économique de certains quartiers, ce que l’on nomme couramment l’embourgeoisement.
  • Poursuite de l’étalement urbain avec les problèmes environnementaux qui y sont liés (augmentation du parc automobile, empiétement sur les zones agricoles, urbanisme axé sur la culture du « char », etc.).
  • Surproduction d’unité de condo (45 % des unités en construction à Montréal ne sont pas vendues et près de 1000 unités ne trouvent toujours pas preneur dans la ville de Québec), ce qui met à risque la stabilité générale du secteur immobilier.

La crise se résorbe donc, mais en léguant un paysage urbain radicalement transformé par plus d’une décennie de développement immobilier effréné. Notons aussi que, pour l’instant du moins, le retour à l’équilibre du marché locatif ne se traduit pas par un ralentissement de la tendance à la hausse des loyers observée depuis l’an 2000.

Loyer moyen d’un logement de 2 chambres au Québec (immeuble de 3 logements et plus) en dollar constant de 2012

Graphique2

Source: Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL)

Bien que le retour à l’équilibre soit une bonne nouvelle, il convient de rester vigilant et attentif envers l’évolution future du marché locatif en particulier et du marché de l’immobilier en général. Les risques d’un retour à un état de pénurie, bien que bas, ne sont pas à exclure pour les années à venir. Afin d’éviter que le scénario de la fin des années 1990 ne se répète, il serait judicieux de mettre dès maintenant en place une politique favorable au développement de logements locatifs. De plus, une telle politique aurait comme effet de tirer le prix de l’habitation vers le bas, ce qui, lorsque l’on considère la flambée des coûts des dernières années ainsi que l’accroissement alarmant du niveau d’endettement des ménages, donnerait un répit financier bien mérité à bien des Québécoises et des Québécois.

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