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La transition économique et la lutte contre les inégalités pour soutenir l’économie

5 novembre 2018

  • Bertrand Schepper

La théorie économique dominante considère que l’économie croît et décroît en fonction de cycles influencés par diverses variables. C’est ce que l’on nomme la théorie des cycles. À la suite d’une période de croissance importante, l’économie atteint éventuellement un point de saturation qui mène à une crise. Le ralentissement économique qui en découle est à son tour suivi d’une période de croissance, et ainsi de suite.

Suivant cette théorie, plusieurs analystes considèrent qu’il est statistiquement probable que les États-Unis, qui représentent 20 % de la consommation mondiale, entrent en crise dans un avenir rapproché. Ils observent que l’économie de nos voisins est en hausse depuis 111 mois consécutifs, ce qui en fait la deuxième période de croissance ininterrompue en importance depuis 1958. La fin de ce cycle haussier risquerait fort d’entraîner une récession au Canada et au Québec.

Une théorie perfectible

L’ennui avec cette théorie, c’est qu’elle fait abstraction de plusieurs facteurs qui définissent la période actuelle. Par exemple, contrairement à d’autres cycles passés, le rythme de la croissance états-unienne a été extrêmement lent. De plus, de nombreux emplois ont été créés pour répondre aux besoins de renouvellement des infrastructures.

Autrement dit, il n’y a pas de surchauffe, pour le moment, et les acteurs économiques jouissent d’une certaine marge de manœuvre.

Au Canada, l’endettement de certains ménages demeure préoccupant, mais la hausse graduelle des taux d’intérêt ainsi que le resserrement des règles hypothécaires semblent freiner l’emballement du marché immobilier.

Une crise imprévisible

Malgré cela, il n’est pas improbable qu’une crise survienne sous l’effet d’un ou de plusieurs événements difficilement prévisibles, comme de mauvaises décisions gouvernementales, un conflit international, l’éclatement d’une bulle d’actifs spéculatifs, la révélation de scandales au sein d’une grande corporation ou encore une baisse soudaine des prix des ressources naturelles.

En bref, on ne peut prédire avec certitude ce que nous réserve l’avenir économique et, advenant que l’économie entre en récession, rien ne permet de statuer correctement sur son ampleur et sa durée.

Face à une telle incertitude, les gouvernements peuvent néanmoins mettre en œuvre, dès aujourd’hui, des moyens afin d’atténuer l’impact d’un éventuel ralentissement économique et de protéger le bien-être de la population.

Québec devrait ainsi assurer une plus grande répartition de la richesse au sein de la population afin de soutenir la consommation nationale en évitant d’alourdir l’endettement des ménages. Pour ce faire, le gouvernement pourrait procéder à une hausse du salaire minimum, encourager l’application de l’équité salariale et s’abstenir de baisser les impôts des plus riches et des grandes entreprises.

Le gouvernement provincial devrait en outre privilégier l’investissement dans des secteurs qui contribuent à réduire progressivement notre dépendance envers les énergies fossiles. En ce sens, il serait opportun de mettre à niveau les infrastructures publiques vieillissantes en injectant des fonds dans les transports en commun, l’électrification des transports, l’efficacité énergétique et le secteur de la construction à haute performance énergétique. En protégeant à la fois l’économie des effets d’une éventuelle crise et l’environnement de l’impact des dérèglements climatiques, Québec ferait ainsi d’une pierre deux coups.

Ces mesures ne peuvent garantir hors de tout doute que nous ne serons pas victimes des soubresauts de l’économie mondiale. Or, à l’heure où le Québec accumule d’importants surplus budgétaires, ainsi que d’importantes sommes dans le Fonds des générations, il serait plus avisé pour le gouvernement de François Legault de soutenir dès maintenant les entreprises et les ménages.

Ce billet est d’abord paru sous forme de lettre dans l’édition du 5 novembre 2018 de La Presse

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