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Panne globale de David McNally : petit cours d’autodéfense contre le capitalisme et le néolibéralisme

29 octobre 2013

  • Julia Posca

Si bien des gens voient dans l’économie une science obscure et un domaine réservé aux expert.e.s, c’est en partie parce que le discours économique dominant cultive souvent l’incompréhension en se faisant hermétique et hyperspécialisé. Rendre les processus économiques intelligibles au plus grand nombre, dans le but éventuel de les transformer, est une tâche à laquelle s’attèle cependant contre vents et marées d’irréductibles Gaulois.e.s de la pensée. Avec son essai Global Slump, dont la traduction française vient de paraître aux éditions Écosociété et qui sera lancée ce vendredi à Montréal, David McNally, professeur de science politique à l’Université York, participe admirablement à cet effort.

Dans Panne globale, McNally analyse la crise financière de 2008 comme un nouvel épisode de la « période d’expansion néolibérale » du capitalisme. Le néolibéralisme désigne la stratégie déployée depuis quarante ans par les élites économiques et politiques afin de combattre le pouvoir acquis de chaudes luttes par les salarié.e.s et ainsi les déposséder des fruits de leur travail. À grand renfort d’exemples tirés aux quatre coins du globe, l’auteur montre que depuis les années 1970, la croissance de nos économies s’est faite aux dépens des travailleuses et des travailleurs des pays riches, et a été rendue possible par la création d’une main-d’œuvre précaire dans les pays de la périphérie – la Chine étant évidemment un pôle fondamental de cette nouvelle organisation de la production à l’échelle mondiale.

Jusqu’à ce jour, les crises successives qui ont marqué cette période ont permis de rétablir la profitabilité globale des entreprises tout en appauvrissant et en disciplinant la force de travail, en plus de s’accompagner d’une crise écologique qui menace les conditions mêmes de notre existence. Dans cette perspective, la crise financière de 2008 apparaît comme un autre résultat de la fuite en avant du capitalisme, alors que la réponse orchestrée par les gouvernements et les entreprises doit être comprise comme une offensive contre les travailleuses et les travailleurs.

En effet, McNally souligne que cette reconfiguration des rapports de pouvoir entre l’élite capitaliste et les salarié.e.s est renforcée par l’application de mesures d’austérité par des gouvernements au diapason des exigences du « marché » (le Québec est d’ailleurs exemplaire dans ce domaine), de même que par l’endettement massif des groupes les plus vulnérables de la population par des institutions financières avares de profits. Enfin, l’auteur souligne abondamment que dans les sociétés occidentales, tous ces processus de « dépossession » des classes dominées touchent encore plus durement les travailleuses et les travailleurs appartenant à des minorités ethniques et, comme toujours, les femmes.

Face à la puissance destructrice du capitalisme, McNally insiste toutefois pour dire que de nouvelles formes de résistance émergent à plusieurs endroits dans le monde et que, bien que leur succès soient parfois limités, divers groupes sociaux s’allient de manière originale pour tenter de regagner le pouvoir que des années de politiques néolibérales leur ont arraché. Sa critique virulente du capitalisme s’accompagne donc d’un appel à combattre l’oppression et à reconstruire les solidarités que la violence du système économique s’efforce constamment de défaire. En ce sens, on peut dire que McNally, qui affirme d’ailleurs en introduction que « [s]on but ici est d’offrir un livre qui joint les tâches complémentaires d’interpréter le monde et de le changer » (p. 38), marche fidèlement dans les pas de Karl Marx.

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