La France du PS: l’austérité et les inégalités
15 octobre 2012
Aux dernières élections françaises, François Hollande promettait de faire les choses différemment: plus de liberté, plus de fraternité, plus d’égalité. Parce que la France en a besoin.
En effet, la crise économique européenne affecte toujours de nombreux pays et semble loin de se résorber. La Grèce continue d’afficher des taux de chômage records et la liste des pays touchés semble s’allonger plutôt que de se rétrécir. Pour essayer de prévenir la contagion, l’Union Européenne a mis en place le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG). Ce pacte budgétaire européen exige des pays signataires des limites très strictes sur les déficits structurels (0,5%) ainsi que des objectifs ambitieux de réduction de dette (un vingtième de réduction par année jusqu’à une dette de moins de 60% du PIB). On remarquera que la spéculation et la financiarisation de l’économie ne sont pas l’objet de ce pacte. Après avoir d’abord résisté à l’appel de l’austérité, le Parti socialiste a choisi de s’y rallier, non sans essuyer son lot de critiques.
Ainsi, le premier budget socialiste cherchera à atteindre un déficit de 3% du PIB en 2013, ce qui voudrait dire une différence de plus de 1,5% par rapport à 2012. Réduire le déficit et freiner l’augmentation de la dette nationale sont devenus les priorités. Pour y arriver, il est important à la fois de trouver un moyen de dépenser moins tout en obtenant plus de revenus, mais également d’avoir une croissance économique. Rien n’est donc moins sûr que l’atteinte de leur objectif: alors que le gouvernement promet une croissance de 0,8%, les économistes de la banque TD prédisent plutôt une croissance nulle.
Ainsi, l’exercice de rigueur pourrait mener à une contraction encore plus importante de l’économie, provoquant du même souffle les maux que l’on cherchait à empêcher. Le magazine de gauche Alternatives Économiques a ainsi mis sur pied l’initiative “Les 3%, c’est pas maintenant” sur Facebook, faisant écho au slogan du Parti socialiste des dernières élections (“le changement, c’est maintenant”). Après avoir concédé que le retour à l’équilibre budgétaire est un objectif louable, ils expliquent que de viser plutôt 4% est non seulement plus réaliste, mais également un meilleur gage de croissance économique. Même Christine Lagarde du FMI met en garde l’Europe (et la France) de viser des objectifs chiffrés plutôt que la mise en place de réformes.
Les exemples de ses voisins en Grande-Bretagne et en Espagne devraient pourtant inspirer la France à essayer autre chose. Ces derniers appliquent depuis maintenant quelques années des mesures d’austérité, sans qu’une amélioration significative soit notée. Au contraire, plusieurs pensent que les coupures drastiques sont responsables d’une part de la détérioration du climat économique et social.
Mais le pacte que la France vient de ratifier lui lie les mains. L’échec de ses efforts pourrait mener à la mise sous tutelle de son budget. Elle perdrait alors sa souveraineté populaire économique. Les conséquences pourraient être dramatiques. Comment mettre de l’avant des choix politiques si on ne contrôle pas son propre budget? Ainsi, plusieurs économistes appellent à la prudence. L’imposition d’une politique économique unique pour l’ensemble des pays de l’Union européenne pourrait mener à des conséquences pires que ce qu’elle cherche à éviter.
Loin de s’inquiéter des conséquences socio-économiques de l’austérité sur les plus pauvres, c’est à la potentielle fuite des portefeuilles qu’il faudrait faire attention nous dit-on. Lors de la dernière campagne électorale française, Le Figaro a même préparé un dossier complet sur l’impact fiscal des promesses de l’UMP et du PS sur des cas “typiques” . Le choix des ménages était révélateur. Sur les cinq exemples donnés, une seule famille ne possédait qu’une seule résidence, aucune n’était locataire et le revenu net le plus faible se situait à plus de 52 000€/an.
S’il est vrai que la France a traditionnellement su garder un certain équilibre dans l’écart entre les riches et les pauvres, cette réalité a toutefois changé dans les 10 dernières années. En 2010, seuls les 10% les plus fortunés ont connu une augmentation de leur pouvoir d’achat. La crise économique explique partiellement cette différence et, bien qu’un taux d’imposition marginal de 75% est prévu pour les revenus de plus de 1 M€, les politiques budgétaires d’austérité risquent d’accentuer l’écart.