En un graphique: la croissance des travailleurs agricoles temporaires au Québec
1 mai 2023
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Lors des dernières élections, la question des seuils d’immigration a fait grand bruit. Depuis, le gouvernement de la CAQ affirme vouloir plafonner ces seuils à 50 000 nouveaux arrivant·e·s par année. Or, depuis l’arrivée au pouvoir de la CAQ en 2018, le Québec accueille un nombre croissant de travailleuses et de travailleurs temporaires, particulièrement dans le secteur agroalimentaire. Les reportages qui exposent la précarité de leurs conditions et de leur statut se sont d’ailleurs multipliés, dont le récent documentaire Essentiels.
Le graphique suivant montre l’évolution depuis 2017 du nombre de travailleurs et de travailleuses temporaires œuvrant dans les secteurs agricole et agroalimentaire au Québec.
On voit que sur cinq ans, leur nombre a presque doublé. Une part importante de ces travailleuses et travailleurs sont au Québec en vertu d’un permis de travail lié à un employeur, par opposition à un permis de travail dit « ouvert ». Le permis de travail « fermé » restreint fortement la possibilité des salariés de changer d’employeur, ce qui les place dans une situation propice aux abus. En Israël, la Cour suprême a aboli ce type de permis de travail en 2006, jugeant celui-ci assimilable à de l’esclavage moderne. Le permis de travail fermé est en effet en contradiction avec un des fondements même du libéralisme économique et du capitalisme, soit la liberté donnée à la main-d'œuvre de choisir avec qui elle signe un contrat et vend sa force de travail.
Dans un contexte où une part importante des travailleurs et travailleuses qui sont sur le coup d’un tel statut sont des personnes racisées, il est difficile de ne pas y voir une autre forme de racisme systémique, dans ce cas-ci découlant de programmes d’immigration qui ont pour effet de précariser systématiquement une catégorie de travailleurs venus d’ailleurs.
Au Canada, les travailleurs étrangers temporaires sous permis de travail fermé sont placés dans une situation permanente de menace de déportation et de révocation du droit de travailler. Ce déni de mobilité et de liberté explique en partie que certain·e·s se retrouvent dans des situations d’abus que des réformes sur la surveillance et le contrôle des conditions de travail ne sauraient solutionner. À cet égard, une Association de défense des droits des travailleurs étrangers temporaires entend contester prochainement la constitutionnalité des restrictions au droit de changer d’employeur.
Dans la foulée de la Journée internationale des travailleuses et des travailleurs ainsi que de l’arrivée du printemps et de la saison agricole, il importe de rappeler les inégalités et violences subies par une catégorie de salariés précarisés sur qui repose pourtant une partie importante de l’économie québécoise.
2 comments
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Bonjour
C’est un dossier qui retenait l’attention du MAPAQ dans années 1990. L’augmentation du seuil d’accueil à cette époque était limitée à moins de 1000 travailleurs. La priorité d’alors portait sur l’amélioration des conditions de travail ces travailleurs saisonniers.
Il est triste que ce dossier soit toujours d’actualité. Votre commentaire est pertinent.
Daniel Lemay
Il est plus que temps de réduire la population des villes en valorisant à sa juste mesure le travail de fermier, d’agriculteur et d’éleveur.