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Gaza : un peuple sous les bombes

21 juillet 2014

  • Philippe Hurteau

En Palestine, l’histoire semble avoir oublié de bouger. Elle est au neutre, incapable de se déplacer, résolument prisonnière d’une tragédie. Depuis l’élection du Hamas dans Gaza en 2006, les opérations punitives se multiplient contre ce petit territoire de 360 km² dans lequel s’entassent 1,7 millions d’habitant.e.s. Le nom donner à ces opérations par l’armée israélienne a de quoi faire frémir : « Pluies d’été » en 2006, « Plomb durci » en 2008-2009, « Pilier de défense » en 2012, « Bordure de protection » en 2014. Chaque fois, il est question de punir collectivement une population captive, enfermée entre un mur de sécurité et la mer, dans ce qui lui reste de territoire.

Carte du blocus israélien à Gaza

Sans titre

Source: OCHE «West Bank and Gaza Strip, Closure Maps», juin 2009; Le Figaro, 14 janvier 2010;  Le Monde, 9 juin 2010. 

Depuis la reprise des hostilités, le bilan des perte humaines est de plus en plus lourd. Lundi matin, on comptait quelques 509 morts du côté palestinien contre 20 du côté israélien. Évidemment, chaque mort, peu importe son origine, est un mort de trop. Or, force est de constater que la faucheuse passe recueillir son dû avec plus de régularité du côté palestinien. Ce qu’un survol rapide des données des dernières années nous indique, c’est que, malheureusement, cette disproportion n’a rien d’exceptionnel : elle est la règle dans ce conflit.

Même si l’on ne tient pas compte des effets au quotidien du blocus de Gaza ou encore de ceux de la colonisation en Cisjordanie, le bilan est catastrophique et disproportionné. Depuis l’opération « Plomb durci » de 2008-2009, différentes évaluations montrent que 96 % des morts dans ce conflit se trouvent du côté palestinien. Ce bilan amène à interroger sérieusement l’appui inconditionnel du gouvernement canadien à l’endroit d’Israël. Dans ce conflit, le Canada prend-t-il vraiment parti pour le droit légitime d’un pays de se défendre contre des actions terroristes ou, au contraire, ne sommes-nous pas plutôt résolument et bêtement rangé du côté du plus fort?

Gaza en quelques chiffres

Les conflits armés, surtout les conflits qui durent depuis « toujours », ont tendance à créer un climat dans lequel les belligérants en viennent à nier la part d’humanité chez leur adversaire. Il convient donc de rappeler, que malgré les généralisations qui font de chaque Palestinien.ne une menace potentielle (ce qui fait en sorte que des gens se regroupent en ce moment en Israël afin d’applaudir, comme s’ils regardaient des feux d’artifice, lorsque Gaza est bombardé!), se trouve des gens et que ceux-ci vivent dans des conditions de vie parmi les plus difficiles sur la planète. Voici quelques données :

  • Il y a actuellement 5 271 prisonniers palestiniens, dont 196 ont moins de 18 ans, 17 femmes, 11 membres du Conseil législatif palestinien, dans les prisons israéliennes. La majorité sont originaires de la bande de Gaza et purgent des peines de plus de 20 ans. Depuis 1967, plus de 750 000 Palestinien.ne.s (20% de la population totale et 40% de la population masculine) ont été emprisonnés par Israël.
  • Depuis 1967, 29 000 maisons et bâtiments palestiniens ont été démolis par l’État d’Israël dans le territoire palestinien occupé. On estime qu’il manque environ 60 000 logements pour répondre aux besoins de la population de Gaza seulement.
  • Gaza à l’un des territoires avec la plus forte densité de population au monde : 4 429 habitants par km².
  • Gaza se classe au 114e rang mondial de l’Indice du développement humain du PNUD.
  • 48,8 % de la population à moins de 15 ans et le taux de natalité est de 3,7 %.
  • 34 % de la population est au chômage et 80 % vit au-dessous du seuil de pauvreté.
  • 44 % de la population est dans un état d’insécurité alimentaire.
  • 35 % des terres agricoles et 85 % de la zone de pêche sont inaccessibles en raison des restrictions imposées par l’armée israélienne.
  • On estime que l’occupation israélienne coûte aux Palestinien.ne.s 4,93 milliards d’euros par an, soit près de 85% du PIB palestinien.

Ces chiffres ne disent pas tout, mais ils mettent en lumière que Gaza a bien davantage besoin de solidarité que de bombes. Là-bas, sur les rives de la mer Méditerranée, se rejoue encore la même tragédie voulant qu’Israël et la Palestine se soient embourbés dans une spirale de violence sans fin où les actions d’une des parties déclenchent la riposte juste et mesurée de l’autre. Ce schéma, trop souvent répété, ne rend pourtant pas clairement compte de la situation.

On ne peut qu’espérer – bien qu’il soit difficile d’y croire – que la communauté internationale et le Canada cessent de se porter systématiquement à la défense de la volonté coloniale de l’État d’Israël. Se cacher derrière une condamnation du Hamas et du terrorisme pour ne rien faire en assistant à la lente agonie du peuple de Gaza est une position ni juste et ni mesurée, mais bien la manifestation concrète de notre soutien envers ce qui est inacceptable.

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