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L’ambition n’a pas la cote

17 septembre 2018

  • Julia Posca

Le cadre financier des partis politiques est un exercice approximatif ; il devrait néanmoins proposer, dans le Québec de 2018, un plan pour affronter la crise économique et le désastre écologique à venir. Or, force est de constater que, pour plusieurs, l’objectif de gagner les élections prime sur celui de s’attaquer aux chantiers prioritaires que sont les luttes contre la croissance des inégalités et les changements climatiques.

Le Parti libéral du Québec (PLQ) a eu la curieuse idée de fonder son cadre financier sur une croissance économique hypothétique. Aidée de cette création de richesse spontanée, l’équipe de Philippe Couillard finance plusieurs propositions qui ne sont pas dénuées d’intérêt en santé et en éducation. Or, les compressions des dernières années ont fragilisé ces réseaux, et on ne peut raisonnablement croire que ces mesures, très ciblées, suffiront à payer les pots cassés par l’austérité.

Même problème côté mobilité : la proposition de diminuer le coût des transports en commun pour certaines catégories de la population est louable, mais largement insuffisante pour réduire le nombre de voitures sur les routes. Or, le cadre financier du PLQ n’accorde, de manière générale, que peu d’importance aux enjeux environnementaux.

Comme le PLQ, la Coalition avenir Québec (CAQ) a ciblé son électorat en présentant quelques mesures destinées essentiellement aux aînés et aux familles. La majoration de l’allocation familiale (763 millions) et la baisse des taux de taxe scolaire (700 millions) – les deux mesures les plus dispendieuses du plan caquiste – ne manqueront pas de plaire aux parents propriétaires de maison. Elles constituent, en ce sens, un choix stratégique pour ce parti qui voit les citoyens d’abord et avant tout comme des contribuables.

Confiant, François Legault compte sur son aura d’entrepreneur pour stimuler l’économie et faire croître les revenus de l’État. Il compte aussi sur la hausse des dividendes versés par les sociétés d’État (350 millions), mais promet du même souffle qu’il n’y aura pas de hausses de tarifs au-delà de l’inflation pour leurs usagers.

Le défaut majeur de ce plan est toutefois l’absence de mesures pour l’environnement, un choix indigne d’un parti qui veut former un gouvernement au XXIe siècle.

Le Parti québécois (PQ), qui a voulu se camper à gauche en promettant un État fort, est pourtant le parti qui propose les engagements les moins coûteux. Les mesures prévues pour les CPE, les écoles, les CHSLD et le soutien à domicile sont intéressantes, mais elles sont assorties de budgets qui pourront difficilement renforcer à long terme ces services publics essentiels.

Le PQ se démarque néanmoins du PLQ et de la CAQ en matière environnementale, notamment avec son projet de Grand déblocage. Ce projet phare est cependant financé à même les fonds réservés pour le REM, ce qui implique l’arrêt des travaux déjà entamés et la confiance que la Caisse de dépôt et placement ne contestera pas cette rupture de contrat. Enfin, le plan du PQ pour lutter contre les changements climatiques est financé grâce aux sommes provenant du Fonds vert, une source de revenus tout à fait pertinente, mais largement insuffisante.

Québec solidaire (QS) a fait un choix légitime en présentant un cadre équilibré, mais on aurait pu s’attendre d’un parti de gauche qu’il s’émancipe du carcan du déficit zéro. QS a au moins le mérite d’identifier clairement les sources de revenus qui financeront son plan ambitieux, même si certaines seront difficiles à récupérer, comme l’argent perdu à cause de l’évasion fiscale (450 millions) et de la corruption (390 millions).

Il faut en revanche saluer le choix des solidaires de cesser les versements au Fonds des générations pour financer la transition écologique, puisqu’il est indéniable que la qualité de vie des générations futures dépendra grandement des efforts faits aujourd’hui pour préserver les écosystèmes planétaires.

Ce billet est d’abord paru sous forme de lettre dans l’édition du 17 septembre 2018 de La Presse

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