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Une marque nommée Montréal

7 juin 2015

  • Julia Posca

Voici enfin venu le Grand Prix de Formule 1, grand-messe annuelle de l’automobile et de la vitesse où l’on oublie momentanément l’existence des gaz à effet de serre pour mieux satisfaire notre désir ardent de voir des bolides tourner en rond pendant deux jours. L’année dernière à pareille date, le maire Denis Coderre annonçait fièrement qu’une nouvelle entente de dix ans avait été conclue avec l’entreprise du milliardaire Bernie Ecclestone. « Cela signifie que Montréal fait partie des ligues majeures de la course automobile […]. C’est une belle fenêtre sur le monde. On est une métropole qui veut s’investir dans des projets afin d’être une plaque tournante. »

S’il y a une chose que l’on ne peut reprocher au maire Coderre, c’est bien de « s’investir dans des projets ». La semaine dernière, on apprenait par exemple qu’il s’était mis à genoux, pour ne pas dire à plat ventre, devant l’éminent Guy Laliberté afin de mieux lui signifier son enthousiasme face au projet de cimetière que souhaite implanter le fondateur du Cirque du Soleil sur l’Île Sainte-Hélène. Le maire est aussi en discussion avec les dirigeants de la Fédération internationale de l’automobile (FIA) pour qu’une épreuve de la nouvelle course de Formule E voit le jour chez nous. Apparemment, « le maire a dit vouloir plus “d’événementiel” dans la métropole » pour ainsi mieux « frapper l’imaginaire ».

C’est à se demander si la visibilité est l’unique critère qui préside aux décisions de l’administration en matière de développement. Ainsi, on a appris ce jeudi que la Ville vient d’appuyer financièrement, à hauteur de 250 000$, l’entreprise Corporation Skying Montréal, qui souhaite aménager une piste de ski extrême sur le mat du Stade olympique pour des compétitions de ski acrobatique. Un événement qui, toujours selon le maire Coderre, « contribuera à renforcer à l’échelle internationale l’image de la métropole québécoise comme ville sportive, festive et innovante ». La semaine précédente, l’ancien député fédéral s’est rendu jusqu’à New York afin de discuter avec le commissaire de la Ligue majeure de baseball de la possibilité pour Montréal de se doter à nouveau d’une équipe professionnelle de baseball. On ne serait pas surpris d’apprendre que M. Coderre a commencé à faire du lobbying pour que le Canada remplace la Russie ou le Qatar en tant qu’hôte d’une des prochaines Coupe du monde de soccer de la FIFA, organisation plongée ces jours-ci dans un scandale de corruption sans précédent.

Rendre service aux résidents et résidentes de la ville ne semble tout simplement pas être un critère valable aux yeux du maire. Ceci expliquerait en tout cas le peu de ferveur avec laquelle il traite de la question du transport en commun. Cette semaine par exemple, il n’a semblé aucunement pressé de réaliser le prolongement de la ligne bleue du métro, projet qui est pourtant dans les cartons du ministère des Transports depuis 1979. Vraiment, quoi de plus ennuyant pour une ville que d’investir dans des infrastructures qui ne présentent que l’insignifiant avantage de contribuer à améliorer la qualité de vie de ses citoyens et citoyennes?

Jacques Parizeau, dans une entrevue accordée à Michel Lacombe plus tôt cette année et que Radio-Canada a rediffusée cette semaine à l’occasion de son décès, disait que l’on n’administre pas un État comme on gère une entreprise. Au niveau municipal, malheureusement, certains n’ont souvent aucun scrupule à négliger cette importante distinction.

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