Les bienfaits du syndicalisme
25 janvier 2024
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On ne sait pas encore comment se concluront les négociations collectives du secteur public, puisque les assemblées générales des membres du Front commun s’étaleront jusqu’au 19 février. Il faudra donc attendre quelques semaines avant de connaître la position des syndiqué·e·s par rapport aux offres du gouvernement. On sait déjà cependant que la mobilisation a été utile aux travailleurs et aux travailleuses du secteur public : même si elle est loin de répondre à toutes les demandes des syndiqué·e·s, l’entente de principe signée durant le temps des Fêtes est nettement plus substantielle que les offres précédentes du gouvernement.
Tout au long des négociations, l’appui du public envers les syndiqué·e·s s’est maintenu à des taux historiquement élevés. En comparaison avec les rondes de négociations précédentes, on a donc moins entendu la vieille rengaine selon laquelle les syndicats ne pensent qu’aux intérêts de leurs membres, au détriment du reste de la société. Il peut néanmoins être utile de rappeler que le syndicalisme profite à tous et à toutes.
Des avancées qui bénéficient à tout le monde
Sur le plan des salaires, d’abord, la rémunération des syndiqué·e·s est la plupart du temps supérieure à celle des non-syndiqué·e·s, mais il est aussi avéré que la syndicalisation exerce une pression à la hausse sur les salaires des personnes qui ne sont pas syndiquées. En effet, dans le secteur privé, la peur que les employé·e·s se syndiquent pousse les employeurs à faire des concessions salariales. De plus, quel que soit le secteur, la nécessité d’attirer et de conserver la main-d’œuvre incite les employeurs à offrir à leurs employé·e·s des salaires plus élevés pour rester compétitifs par rapport aux postes syndiqués. C’est ce phénomène qui permettait aux fronts communs des années 1970 de se présenter comme « la locomotive du secteur privé » : les améliorations salariales des syndiqué·e·s du secteur public allaient tirer tout le monde vers l’avant. Une étude publiée par le Fonds monétaire international et portant sur 20 pays industrialisés montre par ailleurs qu’un taux de syndicalisation élevé est associé à une réduction de la part de richesse du 10% le plus riche et à une augmentation des revenus des déciles les plus pauvres.
Le syndicalisme contribue aussi à réduire les inégalités entre les hommes et les femmes. Alors que les Québécoises gagnent 90% du salaire des Québécois, l’écart salarial entre les hommes et les femmes est beaucoup plus mince chez les personnes syndiquées. Les syndicats ont aussi contribué à des avancées sociales majeures pour l’amélioration de la situation des femmes. Ils ont joué un rôle actif dans la promotion de services de garde publics et de l’équité salariale, bien avant la création des CPE et l’adoption de la Loi sur l’équité salariale dans la deuxième moitié des années 1990. De plus, le Front commun de 1975-1976 a été le précurseur d’un changement social important : il a obtenu un congé de maternité de 15 semaines pour les employées du secteur public, ce qui a ouvert la voie au congé de maternité de 18 semaines pour toutes les femmes adopté par le gouvernement Lévesque en 1979. L’entente de principe obtenue par le Front commun actuel prévoit d’ailleurs des bonifications au Régime québécois d’assurance parentale.
Des lieux de délibération et d’apprentissage politique
Une récente étude américaine recense plusieurs autres avantages du syndicalisme identifiés par la recherche scientifique. Aux États-Unis, les États où la densité syndicale est plus élevée ont un salaire minimum plus élevé, des revenus plus élevés, un meilleur accès à l’assurance-maladie et plus de congés maladie. Ils ont aussi moins de restrictions au droit de vote. De plus, les personnes syndiquées ont un meilleur accès aux prestations d’assurance-emploi. Selon une autre étude, pour les personnes blanches, le fait d’être syndiqué est associé à une diminution des attitudes et opinions racistes. D’après l’auteur et l’autrice de l’étude, les syndicalistes seraient incité·e·s à lutter contre les préjugés racistes pour favoriser le recrutement des membres et le bon fonctionnement des syndicats dans des milieux de travail multiethniques. À l’inverse, l’affaiblissement des syndicats a tendance à réduire la participation électorale.
Ces résultats mettent en lumière la contribution des syndicats au filet social, mais aussi à la vitalité démocratique de nos sociétés. En effet, les syndicats agissent comme des organisations intermédiaires entre la vie privée des individus et l’espace public dans lequel se déroulent les discussions collectives. Par les campagnes politiques qu’ils organisent, par les formations qu’ils donnent et par l’accompagnement qu’ils offrent dans les milieux de travail, ils contribuent à l’éducation politique de leurs membres.
Mieux encore, ils offrent un espace à l’intérieur duquel les travailleurs et travailleuses peuvent s’impliquer et se prononcer sur des sujets qui les concernent. Malgré toutes les imperfections de la démocratie syndicale, les assemblées générales des syndicats restent un des rares lieux où des gens aux profils différents peuvent discuter, débattre et prendre des décisions ensemble à propos d’enjeux qui les touchent au quotidien.
L’avenir du syndicalisme
Au Québec, le taux de syndicalisation a atteint son apogée dans les années 1980. Il était de 44,2% en 1981 et il était descendu à 36,8% en 1997. Il a plus ou moins stagné depuis (37,3% en 2022). Toutefois, le taux de présence syndicale se maintient dans le secteur public, alors qu’il diminue dans le secteur privé depuis le début des années 2000. Est-ce que les gains réalisés par le Front commun du secteur public inciteront des travailleurs et travailleuses du privé à se syndiquer et à se mobiliser?
2 comments
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C’est vrai, mais dans le cas précis de la récente grève, le principal irritant, soit le manque de soutien dans les classes, ne semble pas pouvoir être réglé ni par les syndicats, ni par le gouvernement. Comment convaincre les psy, les orthothérapeutes, etc. de revenir au bercail en assez grand nombre et en même temps surtout ??? Par ailleurs, il faut lire la chronique de Patrick Lagacé sur le manque de démocratie réelle dans les syndicats. Un problème qui est soulevé depuis des décennies.
Alors que le syndicalisme du début du XX siècle était d’origine populaire et qu’il était à la tête de tous les combats pour les avancées sociales, Il semble bien que ce ne soit plus le cas. au XXI siècle.
Si les syndicats ne sont plus socialement utiles, il faut:
– ou bine leur rappeler leurs racines;
– ou bien créer autre chose pour remplir le vide.
Les côtés négatifs du capitalisme monopolistiques sont sans fins.
L’état général de la planète en est le témoin incontournable.