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Piketty : contre les inégalités du capitalisme et pour un savoir libre de propriété intellectuelle?

13 juin 2014

  • FF
    Francis Fortier

Au cours des dernières semaines, voire des derniers mois, le livre de Thomas Piketty, Le capital au XXIe siècle, est devenu un véritable bestseller. C’est un fait assez rare de voir un livre économique, et académique par surcroît, devenir le centre de l’univers médiatique. Mais son succès n’est pas si surprenant. Le livre comporte une solution politique qui s’attaque à une vache sacrée de la droite économique, soit une taxation accrue des revenus provenant du capital. Et cela, pour s’attaquer au problème des inégalités économiques qui est en pleine explosion partout dans le monde. Ce constat sur le problème des inégalités croissantes est également fait par des institutions internationales, la Banque Mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), qui ne sont pas nécessairement reconnues comme étant progressistes. Et de l’autre côté, le livre de Piketty met des chiffres sur le mouvement Nous sommes le 99%. Toutefois, le succès médiatique de l’ouvrage et les critiques de la droite économique ont éclipsé un des projets derrière les chiffres utilisés par Piketty. Mais qu’est-ce qui se cachent véritablement derrière ces chiffres?

Bien que ce soit le nom de Piketty qui est sur toutes les lèvres par les temps qui courent, le projet d’une analyse historique et dynamique des inégalités de revenus dépasse le livre de ce dernier. Piketty s’est associé à Facundo Alvaredo, Tony Atkinson et Emmanuel Saez pour produire The World Top Incomes Database. C’est principalement de cette source que proviennent les données de l’ouvrage de Piketty. Nous ne critiquons pas le fait que Piketty utilise ces données, bien au contraire (au sein de l’ouvrage, Piketty fait une place importante à cette base de données), ce que nous critiquons c’est le peu de place qui est offert à ce projet. Nous voulons donc présenter le potentiel politique qu’implique une telle base de données alors que nous vivons dans un monde au sein duquel même le savoir n’est pas exempt des logiques de la propriété.

La première chose à souligner est la gratuité de l’accès aux données. Ça peut sembler aller de soi, surtout que ce sont des données gouvernementales. L’un des points central de leur méthodologie est d’utiliser les statistiques fiscales. Toutefois, il ne faut pas croire que parce que des données sont produites par un organisme public, la gratuité va de soi. Par exemple, plusieurs données provenant de Statistique Canada ne sont pas accessibles sans délier les cordons de notre bourse. La justification de StatCan c’est de payer le travail pour extraire les données demandées. Cependant, la banque de données qu’utilise Piketty comporte justement des données traitées. Par exemple, si nous voulons l’évolution de la part de richesse accaparée par le 1% (il est possible de le faire pour d’autres tranches, pays…)  depuis 1986, en quelques secondes nous avons un graphique : 1

Il y a plusieurs possibilités, notamment avoir accès au fichier excel qui génère le graphique, faire des comparaisons entre les pays… Mais ce n’est pas le but de notre propos qui est plutôt de souligner qu’ils ont créé une banque de données conviviale et gratuite.

Le second aspect que nous voulions mettre en exergue est le principe d’une propriété libre du projet. À l’instar des mouvements qui existent en informatique, le présent projet met à la disposition de la collectivité la propriété de la démarche. En somme, Alvaredo, Atkinson, Piketty et Saez offrent à toutes et tous leur méthodologie et tout le monde peut incorporer les données de son pays dans le projet.

Alors que le mouvement du Nous sommes le 99% se voulait un mouvement de réappropriation de la majorité de la richesse par une majorité de la population, le World Top Incomes Database, se veut une démocratisation d’un savoir qui tend à demeurer dans un cloisonnement de la propriété intellectuelle.

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