COMMUNIQUÉ | Santé Québec pourrait nuire au virage vers le soutien à domicile
14 novembre 2024
14 novembre 2024, Montréal – L’IRIS publie aujourd’hui une nouvelle étude qui s’inspire des modèles les plus reconnus dans le monde pour poser les bases d’un programme national de soutien à domicile adapté au Québec qui mise sur la décentralisation et la déprivatisation des soins.
« Plusieurs pays réussissent aujourd’hui à offrir des soins à domicile accessibles et de qualité. Il serait temps de s’en inspirer », remarque Anne Plourde, chercheuse à l’IRIS et autrice de l’étude.
Seulement 10 % des besoins répondus
En 2023, seulement 10 % des besoins en soutien à domicile au Québec ont été répondus par le système public, obligeant les personnes en perte d’autonomie à se tourner vers l’achat de services privés parfois onéreux. Les dépenses privées des ménages québécois pour l’achat de soins de longue durée étaient en moyenne de 840 $ en 2021.
« Parce que le gouvernement refuse d’investir les sommes nécessaires au virage vers les soins à domicile, il a cherché à faire des économies en sous-traitant les services vers le privé, ce qui a eu des conséquences importantes sur la qualité des soins offerts dans les dernières années », explique Anne Plourde.
Les réformes successives et les vagues de privatisation de ces services ont fortement érodé le caractère public du modèle québécois de SAD, tant sur le plan du financement que de la prestation des services. Aujourd’hui, moins de 13 % des heures d’aide à domicile sont données par du personnel des établissements publics.
Il faut un programme entièrement public et décentralisé
« Confier la gestion du soutien à domicile à Santé Québec ne résoudra pas les problèmes d’accès et pourrait même contribuer à dégrader davantage la qualité des services offerts aux personnes en perte d’autonomie. Des soins de proximité exigent une gestion décentralisée », avertit Anne Plourde.
La centralisation excessive du système de santé et des services sociaux est en partie responsable de la détérioration des services observée dans les dernières années. En effet, l’imposition de méthodes de gestion hiérarchiques et de mécanismes de reddition de compte statistiques réduit l’autonomie des professionnel·le·s, détériore les conditions de travail et déshumanise les services qui sont de plus en plus déconnectés de la réalité du terrain.
« Nous recommandons de confier la gestion des services de SAD à des instances de proximité, locales et démocratiques, réparties sur l’ensemble du territoire québécois ».
Pas d’amélioration des services sans financement massif
« Il n’y a pas de recette magique pour améliorer les soins à domicile au Québec : sans investissements publics massifs, espérer bonifier les services est tout simplement irréaliste ».
Contrairement à ce que soutient la ministre Sonia Bélanger, le Québec reste aux prises avec un sous-financement chronique des soins à domicile. Bien que le Québec ait l’une des populations les plus vieillissantes au monde, il se situe sous la moyenne de l’OCDE pour ses dépenses en soins de longue durée.
« Le gouvernement devrait s’inspirer des pays scandinaves qui ont réussi à effectuer ce virage en consacrant une part importante de leurs dépenses en santé pour les soins à domicile. Fondé sur un financement progressif et redistributif, le modèle nordique offre l’une des meilleures couvertures au monde et la quasi-gratuité des services. Surtout, les pays scandinaves montrent qu’il est possible de consentir à de tels investissements sans provoquer le naufrage des finances publiques ».
Si le Québec dépensait l’équivalent des pays nordiques en SAD, il devrait quadrupler le financement public allant au soutien à domicile.
Pour lire l’étude: bit.ly/soutien-domicile