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Se rendre jusqu’à la finale

17 juin 2021

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8min

  • Guillaume Hébert

Avec le Canadien de Montréal qui atteint les demi-finales des séries de la Ligue nationale de hockey pour seulement la troisième fois depuis 1993, les Québécois·es ont un motif de plus de vouloir se débarrasser des restrictions sanitaires. À Montréal, les partisans – incluant le premier ministre lui-même –  voudront certainement un aréna aussi bondé qu’à Las Vegas pour encourager le CH, ce qui signifierait admettre bien plus que les 3500 personnes actuellement autorisées à se rassembler dans le cadre d’un événement sportif. Le déconfinement, la levée du couvre-feu et l’abandon progressif des mesures sanitaires suscitent déjà un sentiment d’euphorie. S’il fallait en plus remporter une 25e Coupe Stanley… Pourtant, en pandémie ou en séries, « c’est pas fini tant que c’est pas fini ».

La pandémie de COVID-19 a révélé plusieurs facettes du piètre état de notre organisation sociale et économique. De l’état des résidences pour personnes âgées jusqu’aux prestations d’assurance-chômage, le système a montré ses nombreux points vulnérables. Mais, la situation actuelle est aussi un test à l’égard de notre capacité collective à réfléchir autrement qu’à très court terme. Serons-nous en mesure de vivre au Québec sans la COVID-19 ou sommes-nous condamnés à connaître de nouvelles vagues de ce virus ? Les choix que nous réalisons aujourd’hui risquent d’être déterminants.

OPPORTUNISME

Comme lorsque l’attaquant Paul Byron profite d’un désavantage numérique pour filer en échappée, il nous faut être opportunistes face au SARS-CoV-2. La faiblesse actuelle du nombre de cas de COVID-19 n’est pas un gage de la fin prochaine du supplice covidien, mais bien davantage une opportunité en or de briser le cycle pernicieux qui fait alterner confinements et déconfinements. Saurons-nous la saisir? Si l’on maintient la stratégie perdante des 18 derniers mois, celle qui vise simplement à « contenir » le virus, on se donne toutes les chances de voir un variant se faufiler jusqu’à nous et contribuer à l’apparition d’une quatrième vague de COVID au Québec. Insistons : la vaccination ne constitue pas une garantie contre les mutations de la COVID, comme le Royaume-Uni est d’ailleurs en train  de l’apprendre à ses dépens.

Bien sûr, proposer d’imposer de nouvelles restrictions au moment même où les gens goûtent à nouveau aux plaisirs de l’été et d’une vie un peu plus libre serait aussi suicidaire que de retirer son gardien de but à la faveur d’un sixième attaquant en pleine période de prolongation. Mais ce n’est pas une raison non plus d’être négligent face à un virus pernicieux.

UN PLAN DE MATCH GAGNANT: SUPPRIMER PLUTÔT QUE CONTENIR

Il faut décider une fois pour toutes de tout mettre en œuvre pour supprimer le virus et non seulement limiter sa circulation. Le principe doit faire l’unanimité. Une évidence, vous dites ? Non, puisque la stratégie actuelle du gouvernement consiste en effet à en limiter la circulation. Pour le faire disparaître, il faut donc revoir la stratégie actuelle. Il est possible de supprimer le virus au Québec sans s’empêcher pour autant de profiter de l’été.

Pour ce faire, il faut mettre en oeuvre le plan de match suivant :

  1. Maintenir le contrôle des frontières pour nous protéger contre les variants. La frontière est toujours fermée avec les États-Unis et elle devrait le rester avec les Maritimes et l’Ontario. Il faut aussi s’assurer que les variants ne pénètrent pas en sol québécois par l’aéroport de Dorval.
  2. Mieux soutenir la santé publique plutôt que lui retirer des ressources en réponse à la baisse du nombre de cas quotidiens. Il faut débloquer toutes les ressources nécessaires au déploiement d’une stratégie agressive de dépistage, traçage et séquençage du virus. Comme il y a peu de cas actuellement, chacun d’eux doit faire l’objet d’une analyse détaillée permettant de traquer le virus partout où il apparaît et de supprimer rapidement toute nouvelle éclosion.
  3. Préparer les écoles immédiatement en vue de l’automne. Tout doit être prêt en septembre afin d’éviter un nouveau cauchemar pour les élèves, les professeur·e·s et les parents. Le gouvernement doit s’assurer de tout mettre en œuvre notamment pour que la ventilation soit à point dès la rentrée.
  4. Déconfiner intelligemment. Cela signifie d’abord ne pas céder au lobbying des groupes de pression (par exemple celui que Jean Charest effectue au nom de plusieurs entreprises) et privilégier les avis de la santé publique. Cela signifie aussi respecter les consignes sanitaires de base même si les mesures plus sévères sont levées. La population a développé de nombreuses habitudes sanitaires bénéfiques, comme le port du masque, et cet effort doit se maintenir jusqu’à ce que le virus ait été éliminé au Québec. Et évidemment, il faut se faire vacciner.
  5. En somme, il faut un plan conforme à l’objectif de supprimer le virus et ainsi nous protéger contre toute nouvelle vague de COVID. Cette stratégie est connue et des pays comme la Nouvelle-Zélande, l’Australie et la Corée du Sud l’ont utilisée pour avoir le dessus sur l’épidémie.

PRICE OU ALLEN ?

Après tout ce que nous avons vécu depuis février 2020, il va de soi qu’il est préférable à tous les points de vue – notamment la santé mentale, l’éducation des jeunes, l’activité économique – d’appliquer, au besoin, des mesures sanitaires drastiques sur une courte période afin d’éradiquer le virus plutôt que de recourir à des demi-mesures qui nous condamnent à vivre avec des contraintes importantes pendant très longtemps. Le choix entre les deux devrait être aussi facile à faire qu’entre choisir d’envoyer Carey Price ou Jake Allen garder le filet du CH en séries.

Comment se fait-il que nous n’ayons pas fait le même choix que la Nouvelle-Zélande au début de cette pandémie ? Nous aurions pu retrouver comme là-bas une vie presque normale dès… juillet 2020 ! Comment se fait-il même qu’on ne se soit pas inspiré de la Chine s’il le fallait pour sauver des vies et préserver notre qualité de vie en concentrant brièvement tous nos efforts contre une menace commune ? Sommes-nous à ce point incapables de penser autrement qu’à très court terme ?

ALLER JUSQU’AU BOUT, EN ÉQUIPE

Notre capacité à délibérer collectivement est mise à rude épreuve depuis quelques années. Le déferlement des théories du complot, entre autres, donne parfois l’impression qu’il devient particulièrement ardu de mener des débats raisonnés. Ceci soulève d’ailleurs des questions sur notre capacité collective de faire face à de grands défis. À cet égard, les changements climatiques, une menace plus grande que la pandémie actuelle, font craindre le pire tant notre capacité de réaction est fastidieuse et notre organisation socioéconomique peu résiliente.

Mais comme pour les équipes de hockey, les peuples s’activent parfois au gré d’un élan qui soudainement les transporte alors que l’apathie qui les habitait jusqu’alors apparaissait comme une condamnation à l’impuissance. Profitons de l’été pour refaire le plein de soleil tout en adoptant une résolution disruptive : désormais tout doit être mis en œuvre pour éradiquer le SARS-CoV-2. Ce virus ne doit pas être contenu, il doit être supprimé, et ce, le plus tôt possible.

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