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Y a-t-il des économistes à la CAQ?

1 juin 2022

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4min


Comme si un coup de dés avait soudainement changé le cours de l’économie, le gouvernement Legault a annoncé qu’il devra, dans les conditions actuelles de pénurie de main-d’œuvre et d’inflation, presque doubler les budgets accordés au Programme de financement des infrastructures s’il veut créer les 37 000 places en services de garde promises. Alors que la responsabilité du déficit de places appartient en partie au gouvernement libéral passé, ce qu’il en coûtera de réparer ce laxisme incombe par contre aux stratégies de relance malavisées de la CAQ. Pour un gouvernement qui affirmait dans le dernier discours du budget qu’il faisait « de la saine gestion des finances publiques une priorité », il semble que les rouages de la macroéconomie lui échappent puisqu’il a lui-même contribué à hausser les coûts de construction par ses politiques de relance.

Pour justifier qu’un projet de CPE en Chaudière-Appalaches pourrait coûter 1,2 million de dollars supplémentaires, soit près de 70% de plus que prévu, le ministère de la Famille aurait évoqué la pénurie de main-d’œuvre, la rareté des matériaux, des terrains et l’effervescence des marchés. Le hic ? L’État a en partie le contrôle de l’inflation dans le secteur de la construction parce qu’il en est un des consommateurs majeurs.

Pourtant, depuis deux ans, le gouvernement de la CAQ a choisi d’augmenter les dépenses en infrastructures de 18,7 milliards de dollars. Ces dépenses ont été présentées comme des investissements visant à stimuler la croissance économique durant la pandémie. Cette stratégie a été régulièrement utilisée dans le passé lorsque les taux de chômage étaient très élevés et les salaires à la baisse. Or, dès 2021, les données du marché de l’emploi montraient que le secteur de la construction affichait un des taux d’emploi les plus élevés au Québec. En fait, il n’y a jamais eu autant d’emplois dans le secteur de la construction. Dans les 5 dernières années, les données de Statistique Canada montrent une croissance totale de 48 000 emplois en construction au Québec.

La croissance de ces emplois est stimulée par une demande forte, c’est-à-dire que les projets de construction ne manquent pas. Dans ce contexte, une hausse marquée de la demande peut entraîner une hausse des prix. Sachant qu’il y a plus de projets que de personnes pour les accomplir, les entrepreneurs ont tout le loisir de hausser les prix et de choisir les projets qui seront les plus lucratifs. En multipliant les chantiers, le gouvernement participe donc à alimenter la boucle inflationniste qui hausse les coûts de construction partout.

Par contre, il ne faut pas penser que cette hausse des coûts est causée par les nouvelles places en services de garde. Depuis deux ans, 195 millions de dollars ont été investis pour faire croître le nombre de CPE. Cela représente à peine 1% de la hausse du budget consacré aux infrastructures. Durant ce temps, 22,4% des sommes ont servi au réseau routier. En 2022, 2,85 milliards de dollars ont été ajoutés aux sommes supplémentaires de l’an dernier. Du total, 4,3 milliards sur 10 ans serviront par exemple à de nouveaux projets d’élargissement des routes et de construction d’autoroutes en banlieue de Montréal.

N’importe quel·le économiste aurait prévenu la CAQ qu’injecter des sommes astronomiques dans des projets routiers affecterait en contrepartie la construction de toutes les infrastructures essentielles. À ce titre, on ne peut qu’espérer que les prévisibles dépassements de coûts ne réduiront pas le nombre de CPE qui doivent être créés. Parce que s’il y a un moyen de freiner le problème macroéconomique que représente la pénurie de main-d’œuvre, c’est bien en mettant en place les conditions qui permettent aux parents de travailler. Un·e économiste aurait sûrement prévenu la CAQ de cela. Et avant que les prix ne montent.

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1 comment

  1. Pourquoi faire la gorge chaude au sujet des CPE?
    Il serait nettement moins coûteux de conserver l’un des parents à la maison pour élever les enfants.

    À Montréal, la commission Charbonneau aurait confirmé en 2015 que le coût des travaux de voirie sont supérieurs de 30% à ce qu’ils devraient être depuis plus de 40 ans.

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