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Rénovation des écoles et manœuvres électorales

17 janvier 2018

  • Bertrand Schepper

Évidemment, personne ne s’élève contre les investissements de 740 M$ annoncés hier par le gouvernement Couillard pour la rénovation et l’entretien d’écoles québécoises. En fait, l’ensemble des acteurs du milieu s’accorde pour dire qu’il était plus que temps.  Cependant, il importe de relativiser cette annonce qui comporte toutes les apparences d’une manœuvre électoraliste.

Une annonce de 16 millions de dollars

Le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, peut bien s’enorgueillir de faire une telle annonce pour les rénovations et la remise en état des 1282 écoles du Québec. Cependant, il faut noter qu’en mars dernier, le gouvernement avait déjà promis des investissements de 724 M$ . Ainsi, cela signifie que l’annonce d’hier constitue une augmentation du budget dédié à l’entretien des écoles de seulement 16 M$. Elle permet aussi aux écoles de recevoir les sommes associées aux rénovations deux mois plus tôt puisque les confirmations se faisaient généralement en mars plutôt qu’en janvier. C’est évidemment une bonne nouvelle. Il semble cependant que le problème de la rénovation des écoles soit beaucoup plus profond et mérite non seulement plus d’investissements, mais une réelle volonté d’améliorer le parc immobilier en éducation.

Les libéraux pompiers pyromanes

Rappelons que selon le Plan québécois des infrastructures 2017-2027 (p.133) la cote de pérennité moyenne des écoles préscolaires et primaires est de D. Cette cote, à l’image des résultats scolaires, signifie que ces immeubles sont considérés comme inadéquats, mais tout juste passables, par les évaluateur·trice·s (p. 18). Cela signifie que si la situation empirait, la cote serait considérée comme critique pour ne pas dire en état d’échec (un E). Notons que 12 % des écoles ont la cote E au Québec. Pire encore, le déficit d’entretien était évalué à 1,59 G$ en 2016-2017 pour s’établir en 2017-2018 à 1,78 G$ (p. 136), ce qui veut dire que la situation empirerait d’environ 192 M$ cette année.

En fait, selon la chaire Ivanhoé Cambridge d’immobilier de l’ESG-UQAM dans un rapport de 2016 (p.3) :

« La moyenne d’âge des bâtiments du parc immobilier des commissions scolaires est passée de 30,5 ans en 1993 à 44,7 ans en 2003 et à 53,5 ans en 2014. Il semble donc y avoir un taux de renouvellement net faible ».

Bref, outre les rénovations, le gouvernement n’a à peu près pas investi dans de nouvelles infrastructures et a laissé vieillir les bâtiments. En terme de gestion, il s’agit d’une des pires pratiques possibles. Évidemment l’annonce du ministre Proulx, ne peut pas faire de tort, mais amène la question suivante :

Comment un gouvernement au pouvoir depuis presque 15 ans peut-il accumuler une telle détérioration de ses propres infrastructures ?

Cette situation est troublante, d’autant plus lorsque l’on comprend que les dernières années ont mené à bon nombre de compressions dans le système scolaire et que le déficit accumulé est somme toute l’équivalent de 2,45 % du budget provincial d’une année. Ce déficit de 1,78 G$ en pérennité des écoles est aussi inférieur à la baisse d’impôt annoncée en novembre 2017, elle qui est évaluée à 2,3 G$ et qui favorise davantage les plus riches.

Si on ne voulait pas toucher à la baisse électoraliste des impôts annoncée fin 2017, on aurait pu décider d’utiliser les versements accumulés au Fonds des générations, qui s’élèvent à plus de 10,2 G$ (p.51) pendant le mandat du gouvernement actuel. Quelle meilleure façon d’éviter les iniquités intergénérationnelles qu’en favorisant l’édiction de la jeunesse?

À moins d’un an des élections, on peut accueillir l’annonce d’hier de manière positive et se dire qu’il était temps, mais il faut garder en tête qu’en presque 15 ans de pouvoir, les libéraux ont laissé la situation dépérir et que ces millions ne permettront pas de réparer le tort qui a déjà été fait. Pour le moment, on semble mettre un band-aid sur une profonde blessure qui touche le Québec.

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