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Cryptomonnaies : comment des anarchistes sont parvenus à transformer le charbon en or

11 avril 2019


On savait déjà que l’industrie des cryptomonnaies consomme énormément d’énergie.  On apprenait toutefois, la semaine dernière, que le minage de cryptomonnaies génère également des quantités monstres de déchets électroniques. En effet, la course à la puissance de calcul entre les différents mineurs de cryptomonnaies a mené ceux-ci à investir dans des cartes graphiques spécialement conçues pour les tâches reliées au minage de ces monnaies virtuelles. Puisque la loi de Moore s’applique à ce type de composantes, comme à tout le reste de l’informatique, le matériel utilisé doit être constamment renouvelé pour rester compétitif.

Une industrie, par définition, produit quelque chose d’utile. Dans le cas des cryptomonnaies, l’utilité avancée par ses principaux joueurs est extrêmement mince : elles ne font que permettre la transformation de liquidités d’une forme à une autre. En effet, les calculs mathématiques complexes qui servent à valider les transactions des cryptomonnaies sur les blockchains (ce à quoi l’on réfère lorsque l’on parle de minage) nécessitent une puissance de calcul qui croît de façon relativement proportionnelle à la valeur des dites monnaies et de l’amélioration des technologies disponibles. Autrement dit, le marché des cryptomonnaies tend à faire en sorte qu’il en coûte environ un Bitcoin en matériel informatique et en énergie pour « miner » un Bitcoin. Comme une proportion importante du minage est effectuée dans des centres situés dans des pays qui produisent la plupart de leur électricité à partir d’énergies fossiles, on peut dire que chaque bitcoin vaut son pesant de charbon.

Ce nouveau coût environnemental attribuable aux cryptomonnaies s’ajoute aux différentes critiques soulevées contre elles, que ce soit aux niveaux des nouvelles opportunités offertes aux fraudeurs, aux hackers, aux spéculateurs ou aux acteurs sur les marchés noirs. Dans un contexte où l’industrie des cryptomonnaies tente de s’établir au Québec pour tirer profit de nos hivers (pour le refroidissement des machines) et des bas coûts de notre électricité, il convient de nous demander si les supposés bienfaits de cette industrie peuvent compenser pour ces externalités.

Les défenseurs des cryptomonnaies vantent les mérites de l’indépendance de celles-ci par rapports aux banques centrales des États. Il est vrai que la crise financière de 2007 fut causée par un système bancaire délinquant qui a trahi ses promesses de stabilité et de sécurité des flux de liquidités. Les cryptomonnaies, en reposant sur une infrastructure décentralisée, permettrait de s’émanciper de ces institutions considérées comme archaïques. C’est ici que dépasse le jupon idéologique des fans des cryptomonnaies. Il faut savoir que plusieurs créateurs et promoteurs de celles-ci se définissent comme des anarchistes, ou encore sont influencés par l’école autrichienne en économie, qui promeut la privatisation de la création de monnaie pour retirer à l’État ce levier économique fondamental.

Fort heureusement, l’ensemble des banques centrales et des principales institutions financières dans le monde sont toujours sceptiques face aux monnaies virtuelles et n’ont toujours pas fait d’investissements majeurs visant à la généralisation et à la normalisation de celles-ci. Espérons qu’il en restera ainsi et que les États ne sauteront jamais à pieds joints dans cette « industrie » qui a pour but ultime de tirer le tapis sous leurs pieds en les privant de leurs pouvoirs en matière de politiques monétaires.

Crédits photo : Photo European Union

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