Icône

Aidez-nous à poursuivre notre travail de recherche indépendant

Devenez membre

Brexit : Plus pour les banques, moins pour les citoyens

13 juillet 2016

  • Bertrand Schepper

Depuis que le Brexit l’a emporté au Royaume-Uni, les marchés financiers ont été particulièrement inquiétants pour le gouvernement anglais. La livre sterling a chuté de 9 %  par rapport à l’Euro. La valeur des actions des banques anglaises a connu une baisse de 20 %. Pire, les investissements en propriété commerciale ont connu une baisse de 50 % dans les 3 premiers mois de 2016 (soit avant le référendum). Considérant que depuis 2009 ces investissements représentaient 45 % de la valeur des transactions britanniques vendues, on peut comprendre la Banque d’Angleterre de s’inquiéter. De plus, les compagnies Standard life et Aviva Investor ont annoncé le gel de leurs fonds immobiliers pour éviter l’afflux de demandes de retrait.

C’est pourquoi le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mark Carney, a fait sa troisième apparition depuis le référendum pour rassurer les investisseurs. Il annonçait le 5 juillet que la Banque d’Angleterre permettait aux différentes banques du pays d’augmenter leur capacité à prêter de l’argent en diminuant le pourcentage de liquidité nécessaire pour supporter les prêts de 0,5 % à 0%. Ces liquidités sont sensées être un « coussin » pour amortir les chocs d’un éventuel Krach.

Financièrement, cela a pour effet d’éventuellement permettre aux banques d’ajouter l’équivalent de 253 G$ dans l’économie anglaise, ce qui devrait stimuler la consommation et diminuer les ravages du Brexit. Au Canada nous sommes plus habitués de voir la banque centrale diminuer les taux d’intérêt plutôt que de procéder à ce type de mesure, mais en Angleterre le taux d’intérêt de 0,5 % est déjà historiquement bas. En ce sens, on peut dire que les Anglais sont à la limite de leur marge de manœuvre.

Idéalement pour Carney, cette tactique permettrait d’augmenter les emprunts bancaires aux entreprises et aux ménages et donc stimuler la consommation sur le territoire. D’autre part, il tente de lancer un message rassurant aux banques du pays et aux investisseurs étrangers. Message qui semble peu entendu puisque de plus en plus de firmes gèlent leurs fonds immobiliers dans le pays.

La plus grande inquiétude pour le pays est une baisse potentielle de la valeur du parc immobilier, jusqu’alors connu comme une valeur refuge. Si les achats diminuent rapidement et que la valeur du marché connaît une forte baisse, les suites du Brexit pourraient mener à une crise économique importante. Personne ne veut voir la valeur de leur maison diminuée tout en ayant des paiements hypothécaires élevés. Or lorsque cette situation persiste, les petits acheteurs ont tendance à faire faillite plutôt que de payer l’hypothèque. Ce qui mène à la déroute du système bancaire.

Bien que nous n’en soyons pas là, la banque d’Angleterre à de quoi s’inquiéter. De plus avec l’instabilité au sein du gouvernement, je suis persuadé que monsieur Carney doit en pédaler un coup pour satisfaire les marchés. Or, c’est bien là toute la tristesse du plan puisqu’au final ce seront les banques et les grands investisseurs qui profiteront de l’affaire en augmentant leur possible part de profits et en diminuant la protection du consommateur, sans que les résultats soient nécessairement au rendez-vous. De plus, le gouvernement anglais a déjà annoncé son intention de diminuer les impôts des entreprises sous la barre des 15 %.

Ce type de politique va favoriser une hausse de l’endettement des ménages anglais. Rappelons que pour le moment, le taux d’endettement moyen des Anglais est de 112 % par rapport au salaire moyen. Notez que ce même ratio est sous la barre de 100 % pour les grands pays de l’Union Européenne. En moyenne, 209 personnes par jour font faillite en Angleterre.

Bref, dans cette situation, les Anglais risquent d’accentuer leurs inégalités tout en menaçant de plus en plus leur système bancaire. À cet égard, je trouve malheureusement bien silencieuse à la fois la communauté politique et financière d’Angleterre. De plus, je reste avec la très déplaisante impression que tout plan de sortie de crise économique, financière et politique dans les dernières années mène avant tout à un enrichissement des plus riches aux dépens des moins nantis. La proposition de sortie de crise financière liée au Brexit ne fait vraisemblablement pas exception.

Icône

Restez au fait
des analyses de l’IRIS

Inscrivez-vous à notre infolettre

Abonnez-vous